
Techniquement, oui : ce sont des mollusques. Mais si quelqu’un vous dit que "c’est juste une limace", vous pouvez lui répondre que certaines ressemblent davantage à des bijoux vivants qu’à des gastéropodes.
Il existe plus de 3 000 espèces connues. Certaines portent des rayures parfaites, d’autres des pois, d’autres encore adoptent des tons fluorescents que même les poissons se retournent pour admirer.
On les trouve partout : Pacifique, Atlantique, océan Indien, Méditerranée, et même le long de nos côtes françaises. Elles se cachent dans les algues, les récifs, sur les éponges, dans les anémones, entre deux rochers... et parfois en pleine eau, comme si de rien n’était.
Petites, discrètes... mais flamboyantes
La beauté des limaces de mer, c’est qu’elles parviennent à être incroyables tout en mesurant à peine 2 à 5 cm en moyenne. Elles brillent, elles ondulent, elles arborent des panaches délicats... et pourtant, vous pouvez passer à côté sans les voir.
Ce sont les maîtresses du camouflage, non pas pour se fondre dans le décor, mais au contraire pour signaler très clairement : « Je suis toxique, ne me mange surtout pas ».
Et parfois, elles se donnent en spectacle. La plus connue : la limace danseuse espagnole (Hexabranchus sanguineus), qui se met littéralement à onduler comme un voile rouge de flamenco quand elle nage. Performance artistique 100 % naturelle.

Nudibranches : les branchies les plus stylées de l’océan
La plupart des limaces de mer appartiennent au groupe des nudibranches, littéralement "branchies nues". Dit autrement : elles portent leurs organes respiratoires comme des accessoires de mode.
On trouve deux grands types de silhouettes :
o Les doridiens, avec un panache de branchies à l’arrière, comme une petite fontaine vivante.
o Les aéolidiens, recouverts de papilles fines et colorées, des sortes de plumes miniatures qui ondulent à chaque mouvement.
Certaines espèces jouent la carte du minimalisme, d’autres celle du baroque, mais toutes rivalisent d’élégance. Même les poissons semblent parfois hésiter entre les manger ou les admirer.
Les stars méditerranéennes
Dans nos eaux, deux espèces font régulièrement craquer les plongeurs débutants :
o le doris dalmatien (Peltodoris atromaculata), un petit bolide blanc à taches noires, très chic ;
o la flabelline mauve (Flabellina affinis), d’un violet presque électrique, hérissée de papilles transparentes.
Elles vivent discrètement sur les éponges et dans les champs d’algues, mais une fois qu’on les repère, difficile de ne pas tomber amoureux.

Une tête pleine de capteurs
Chez la limace de mer, tout est miniaturisé... mais tout fonctionne.
Sur la tête, on trouve :
o deux tentacules tactiles pour se repérer,
o et surtout les rhinophores, ces petites antennes olfactives qui analysent l’eau comme un nez de sommellerie.
Elles détectent nourriture, dangers, partenaires... bref, tout ce qui vaut le coup dans la vie d’une limace.
Hermaphrodites, mais avec style
Les nudibranches sont toutes hermaphrodites : chaque individu possède les deux systèmes génitaux. Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, elles ne s’auto-fécondent pas.
La reproduction est un véritable pas de danse, où deux individus s’échangent simultanément leurs gamètes. Oui, c’est coordonné, élégant... et plutôt impressionnant pour des animaux de quelques centimètres.

Et la palme de l’excentricité ?
Sans aucun doute : Goniobranchus tinctorius.
Cette espèce pratique une stratégie reproductrice spectaculaire :
elle perd son pénis après l’accouplement, comme si c’était un accessoire jetable.
Rassurez-vous : un nouveau repousse en quelques heures. Dans le monde marin, c’est ce qu’on appelle avoir le sens du renouvellement.
Une armure invisible... mais redoutable
Les limaces de mer n’ont pas de coquille, mais elles ont mieux :
o Certaines stockent les toxines de leurs proies pour devenir immangeables.
o D’autres recyclent les cellules urticantes des anémones qu’elles ont mangées.
o Et certaines vont encore plus loin en intégrant des algues microscopiques dans leur corps pour profiter... de la photosynthèse.
Oui, il existe des limaces de mer à énergie solaire.
Inutile de chercher une équivalence terrestre : aucune limace de jardin n’a encore tenté cette stratégie.
Observer une limace de mer, c’est comme voir un petit défilé aquatique : couleurs irréelles, formes improbables, mouvements ondulés, panaches battant doucement au gré du courant.
Ce sont les petites touches de poésie des fonds marins : discrètes, fragiles, mais incroyablement fascinantes.
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