Poisson-ballon : une espèce toxique et invasive qui menace la Méditerranée

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Présent désormais dans tout le bassin méditerranéen, le Lagocephalus sceleratus pose un risque sérieux pour la biodiversité marine, les activités halieutiques et le tourisme. Son extension vers le nord de l’Adriatique inquiète les scientifiques.

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Présent désormais dans tout le bassin méditerranéen, le Lagocephalus sceleratus pose un risque sérieux pour la biodiversité marine, les activités halieutiques et le tourisme. Son extension vers le nord de l’Adriatique inquiète les scientifiques.

Le poisson-ballon, ou poisson-coffre, fait désormais partie du paysage méditerranéen. Mais derrière son apparence inoffensive se cache l’une des espèces les plus problématiques du bassin. Classé espèce invasive par l’UICN, le Lagocephalus sceleratus est à la fois toxique, agressif, et dommageable pour les écosystèmes. Sa prolifération rapide, alimentée par le réchauffement climatique et les perturbations humaines, soulève des inquiétudes croissantes chez les scientifiques et les professionnels de la mer.

Une espèce toxique et potentiellement mortelle

Originaire de l’Indo-Pacifique, le Lagocephalus sceleratus est arrivé en Méditerranée via le canal de Suez au début des années 2000. Depuis, il s’est rapidement étendu à l’ensemble du bassin, jusqu’à atteindre récemment le nord de la mer Adriatique, selon une équipe de chercheurs croates.
Ce poisson peut mesurer jusqu’à 1,20 mètre pour 9 kilos. Il est capable d’ingérer de l’eau pour gonfler son corps en cas de menace, ce qui lui vaut son surnom de poisson-ballon. Mais son principal danger réside dans sa toxicité extrême : sa chair contient de la tétrodotoxine, une neurotoxine très puissante qui ne disparaît pas à la cuisson. Une ingestion, même minime, peut provoquer paralysie, arrêt respiratoire et décès dans un délai de six à vingt-quatre heures. Aucun antidote n’est actuellement disponible.

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Outre sa toxicité, le poisson-ballon se distingue par un comportement potentiellement agressif. Sa mâchoire très puissante peut causer des blessures graves, notamment chez les pêcheurs qui le manipulent ou les baigneurs qui s’en approcheraient de trop près. Des morsures ont été rapportées, pouvant aller jusqu’à l’amputation partielle de doigts.

Une espèce invasive difficile à contenir

Le Lagocephalus sceleratus fait partie des espèces dites lessepsiennes, qui ont migré de la mer Rouge vers la Méditerranée. Il a été observé pour la première fois dans le bassin en 2003. Sa progression est facilitée par l’absence de prédateurs naturels, un taux de reproduction élevé, et des conditions de plus en plus favorables liées au changement climatique.
Des spécimens ont été signalés dans de nombreux pays riverains : Turquie, Grèce, Liban, Égypte, Italie, France (notamment à Gruissan, dans l’Aude), et tout récemment Croatie. Sa présence dans des zones auparavant épargnées inquiète les scientifiques, qui redoutent des effets écologiques et économiques accrus. Mais il n'est certainement pas le seul des espèces invasives qui peuplent de plus en plus la Méditerranée.

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Une menace pour les filets et les ressources halieutiques

Les conséquences de l’invasion du poisson-ballon se font déjà sentir chez les professionnels de la mer. Il endommage les filets de pêche en y mordant les proies capturées ou en tentant de s’en libérer, ce qui entraîne des pertes de matériel importantes. Sa présence provoque également une baisse des captures de poissons commerciaux, qu’il concurrence directement pour la nourriture.
Plus globalement, il participe à la désorganisation des chaînes alimentaires marines. En consommant coquillages, invertébrés et jeunes poissons, il réduit la disponibilité des proies pour les espèces locales et perturbe l’équilibre écologique.

Un impact croissant sur la biodiversité méditerranéenne

En tant que prédateur opportuniste, Lagocephalus sceleratus déstabilise les écosystèmes. Il s’attaque à des espèces déjà fragilisées par la surpêche et la pollution. Sa capacité à consommer une large variété de proies le rend particulièrement difficile à contrer. Il peut aussi participer à la dégradation des herbiers de posidonie, habitats essentiels pour la reproduction de nombreuses espèces méditerranéennes.
Sa toxicité pourrait également entraîner des effets indirects sur les réseaux trophiques : peu d’animaux peuvent le consommer, ce qui favorise sa prolifération.

Climat, activités humaines et dispersion maritime en cause

Le développement du poisson-ballon est en grande partie lié aux changements climatiques. La hausse des températures marines, les hivers plus doux et la modification des courants favorisent sa survie et sa dispersion.
Les activités humaines accentuent le phénomène. La destruction des habitats, la pollution des côtes, et la surpêche réduisent la résilience des écosystèmes face à ce type d’envahisseur. En parallèle, les eaux de ballast des navires peuvent transporter les larves sur de longues distances, facilitant l’introduction du poisson-ballon dans de nouveaux secteurs.
Des actions de prévention encore limitées
Malgré la reconnaissance de la menace qu’il représente, les moyens de lutte restent limités. Quelques campagnes de sensibilisation ciblent les pêcheurs et les professionnels du littoral, notamment en France, en Grèce ou à Chypre. Mais aucun plan de gestion concerté n’a encore été mis en œuvre à l’échelle régionale.
Dans un contexte de dérèglement climatique et d'intensification des échanges maritimes, la progression du poisson-ballon semble appelée à se poursuivre, à moins d’un effort de coordination à l’échelle méditerranéenne.

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
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Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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