Chronique méditerranéenne : l'esprit de STARESO

Au bout de quelques minutes, on débouche sur la corniche, face à la Méditerranée. La pointe Revellata est là, avec son phare, point de repère pour retrouver dans sa lignée et au niveau de la mer la station océanographique. Il faut encore 25 bonnes minutes de voiture pour accéder au site, après avoir emprunté un chemin de terre parsemée de grosses pierres. Il vous rappelle rapidement l’importance du bon état de votre suspension et de vos pneus. Une fois arrivé sur site, le premier sentiment qui vous envahit est celui d’un lieu unique, atypique, perdu au bout du monde où votre regard ne sait pas où se fixer tellement cela grouille de vie. Il y a des personnes concentrées devant des ordinateurs, d’autres dans l’eau, d’autres encore portant de l’instrumentation ou bien contemplant la mer en prenant un café. La vue est unique. En face, il y a Calvi et sa citadelle et les montagnes de la Corse. Certaines encore revêtues de quelques traces de neige.
Ce lieu unique pour la recherche scientifique en Méditerranée existe depuis plus de 50 ans. Il a été créé en 1972 par le roi des belges qui souhaitait offrir à ses chercheurs un lieu pour étudier la Méditerranée et pour former les étudiants en océanographie. Ne trouvant aucune place sur le continent où les stations marines existantes n’étaient pas prêtes à un accueil, il s’est fait proposer par le maire de Calvi un terrain à bâtir à la pointe Revellata, une pointe éloignée et isolée de la cité, mais parfaite pour une installation dédiée à la recherche. Stareso est naît. Aujourd’hui, la station marine est gérée par un fondation privée corse.
Depuis, la station accueille des générations de chercheurs belges, français, suisses, allemands, américains, japonais et de bien d’autres nationalités. Ce site les pieds dans l’eau ne serait qu’un lieu vide sans son cœur et ses poumons que sont les membres de la station. Il est difficile de tous les listés, mais en vous parlant de Michel, le responsable du site, accompagné avec bienveillance par Pierre, on peut évoquer Lovina, la wonderwoman, Sylvain qui tous les jours depuis des décennies relève la température de la Méditerranée à 7h du matin, Aubin, l’un des derniers arrivés, qui, avec quelques images et quelques mots vous fait aimer le zooplancton et vous fait comprendre qu’il est dommage de ne pas l’avoir fait avant. Il y a ou aussi Cyril, le logisticien avec qui vous pouvez parler rock’n roll et partager quelques notes d’ACDC pour vous changer des poissons et tous ceux qui vous accueille avec le sourire pour faire que votre séjour se passe parfaitement ou pour vous parler de leurs travaux scientifiques.
C’est un lieu où l’on apprend que l’on peut dresser les girelles, que les sars reconnaissent « son » plongeur ou que le mérou n’aime pas regarder son image dans un miroir. Posidonie, coralligène, poissons, écotoxicologie, rejet urbain, aquaculture, phytoplancton, séries à long terme, stages, thèse, postdoc, appui aux politiques publiques, formations, éducation à l’environnement et même lieu de tournage pour des documentaires sont autant de thématiques pour lesquelles les journées et les soirées sont bien remplies et parfois terminées par quelques notes de musique.
Mais au-delà de la science, la station est un lieu de vie et d’échanges internationaux où les différentes nationalités qui se croisent sont une opportunité pour progresser et parfois aussi pour savoir au travers d’une amicale compétition quel pays à le meilleur fromage ou le meilleur vin, avec modération bien sûr.
Les générations se succèdent depuis 1972. L’esprit d’accueil, d’ouverture et d’excellence perdure. On ne peut que remercier les anciens et rappeler la responsabilité qu’ont les nouveaux à garder l’esprit du lieu.
On ne vient pas à Stareso par hasard. On y part toujours avec regret, sans dire au revoir, mais plutôt à bientôt.