
Du plaisancier au coureur au large, de plus en plus de navigateurs participent à des programmes scientifiques destinés à mieux connaître l’océan, sa faune et sa flore.
Ils vont jouer au Petit Poucet : les coureurs de la Barcelona World Race s’apprêtent à semer dans leur sillage des balises Argos, mises à l’eau dans les mers peu fréquentées du grand Sud. Tous les équipages de la course ont ainsi accepté de lester leur bateau d’un flotteur de 20 kg. Mais c’est pour la bonne cause. Le domaine marin est encore peu connu et toutes les bonnes volontés permettent de faire progresser la science. Près de 4 000 balises Argos, petits robots autonomes chargés de mesurer la température et la salinité de l’eau, sont ainsi déployées sur tous les océans de la planète, sous l’égide de l’UNESCO. L'association Voiles Sans Frontières participe également au programme. Chaque année, l’association équipe une quinzaine de voiliers de plaisance qui vont larguer les flotteurs selon un protocole précis. « Nous formons les skippers avant leur départ car il faut savoir initialiser la balise avant de la déployer », précise Michel Huchet, fondateur de l’association.
Apprendre à regarder la mer autrement
Très répandues à terre, les sciences participatives commencent à se développer dans le milieu marin. « La mer est grande et les chercheurs disposent de moyens limités », explique Céline Arnal, océanologue responsable de l’association Cybelle. Depuis 2007, l’organisme recrute des plaisanciers pour le comptage des cétacés en Méditerranée : dauphins, rorquals, cachalots. Une soixantaine de voiliers de particuliers contribuent ainsi au programme. « Avec la pratique de la voile, les plaisanciers utilisent l’énergie du vent, ils font attention à la gestion de l’eau et de l’électricité. Ils regardent la mer autrement et ont envie de s’impliquer dans sa protection », reprend Céline Arnal. Car le but du comptage des cétacés, c’est d’apprendre à mieux les connaître pour savoir mieux les protéger.
Des équipiers très preneurs
Très connu du grand public, le voilier Tara a fait des émules. Une dizaine de voiliers de grand voyage, battant pavillon français, sont impliqués dans le recueil de plancton pour la Station biologique de Roscoff (Finistère). Le programme mondial « Plankton for the planet » a pour objectif de fournir des échantillons aux scientifiques afin de déterminer l’ADN du plancton. La goélette La Cardinale vient d’arriver à Ushuaia et va participer à un protocole expérimental jusqu’en 2016. Depuis son départ de Nantes, d’escale en escale, ses équipiers ont d’ores et déjà effectué de nombreux prélèvements. Comme le note Pierre-Jean Jannin, l’un des initiateurs du projet porté par l’association Objectif Grand Sud, « en grande croisière, on s’ennuie vite si on n’a pas quelque chose de précis à faire. Les passagers que nous embarquons sont très preneurs. »
Par ailleurs, le Réseau des sciences marines participatives (RIEM), associé à l’Ifremer, le CNRS et la Station biologique de Roscoff, organise chaque année des rencontres entre scientifiques et plaisanciers. Les prochaines auront lieu le 21 mars 2015 à Lorient (Morbihan).