
Sur un voilier, le moteur représente une partie importante de sa valeur. Sur un bateau moteur, c’est le point le plus important. En effet, la valeur du bateau est déterminée par la fiabilité et l’état de celui-ci donc si vous souhaitez acheter un bateau, il faut avant tout les connaitre. Un moteur propre ne signifie rien car il a pu être repeint avant la vente, seule une analyse d’huile effectuée dans un laboratoire indépendant peut vous indiquer son état. Pour en savoir plus, nous nous sommes rapprochés de celui de l’IESPM, fondé en 1962.
Pourquoi faire une analyse d’huile ?
On peut la comparer à une analyse de sang. Lorsque le moteur est en marche, l’huile recueille les particules de métal des pièces en mouvement et des polluants comme l’eau, le carburant et le liquide de refroidissement. Une analyse précise comporte plus de 20 tests par échantillon. Ils permettent de définir l’état de santé du moteur et de révéler l’origine des problèmes. Cette analyse peut être réalisée sur le moteur, l’inverseur, le circuit hydraulique et l’embase. Sur un moteur en ligne d’arbre, il faut la faire sur le moteur et son inverseur.
A quel moment doit-on la faire ?
Elle doit être pratiquée au minimum dans les deux cas suivants :
1. Lors de l’achat d’un bateau d’occasion. En aucun cas, il ne faut se fier à l’aspect extérieur du moteur ni aux factures d’entretien.
2. Suite à l’apparition d’un dysfonctionnement mécanique tel que bruit, fumée, démarrage difficile, manque de puissance, etc. afin de contrôler le moteur avant d’envisager de grosses réparations.
Les différentes phases de l’analyse
Les tests sont réalisés par des ingénieurs spécialisés qui utilisent de l’instrumentation de pointe. Ils reposent principalement sur :
Le test de la tache d’huile
Il permet de déterminer l’’encrassement du moteur, l’état d’oxydation de l’huile, la dispersivité résiduelle du lubrifiant et la présence d’eau ou de gazole.
La mesure de la viscosité (temps nécessaire à l’huile pour s’écouler à une température déterminée)
Elle permet de mesurer le niveau d’altération de la viscosité du lubrifiant. Les résultats s’interprètent toujours en comparaison avec le même lubrifiant neuf. Si la viscosité a augmenté cela signifie généralement une présence de particules de carbone ou une température de fonctionnement trop forte. Si au contraire, elle a diminué, cela signifie un cisaillement du lubrifiant ou une forte présence de carburant imbrûlé.
La spectrométrie d’émission
Cette technique permet de quantifier environ 25 métaux présents dans les huiles en fonctionnement.
La spectrométrie infra-rouge (empreinte digitale du lubrifiant)
Ce test permet de déterminer la qualité résiduelle de l’huile, son éventuelle dégradation et sa contamination par des produits étrangers.
Le quantifieur de particules
Il met en évidence la présence de particules ferriques et dérivées contenues dans l’huile analysée : c'est-à-dire l’usure sévère.
Le point éclair
Il permet de quantifier la présence de carburant et de détecter certains mélanges.
L’analyse des résultats
Lors de l’interprétation, les experts IESPM prennent en considération les résultats de l’analyse d’huile et évaluent leur cohérence ; ils tiennent aussi compte d’un certain nombre de données supplémentaires comme : le type de lubrifiant utilisé, le temps de service de l’huile, le type de moteur du bateau, etc. Puis, ils comparent toutes ces informations à la base de données construite depuis plus de 50 ans.
A partir des résultats d’analyse, les spécialistes formulent un diagnostic précis sur l’état de santé du moteur du bateau. Ils vous indiqueront également, si nécessaire, les interventions à prévoir pour remettre le moteur à niveau.
Analyse sur un moteur YANMAR 2GM20F 321 heures
Résultats : forte présence de sodium et d’eau, teneurs sensibles en aluminium, chrome et étain, quantifieur de particules élevé : infiltration d'eau de refroidissement avec incidence sur l'usure.
Recommandations des experts IESPM : intervenir sur l’organe par un contrôle du circuit de refroidissement, des compressions moteur et de la pression d’huile.
Analyse sur un inverseur TWIN DISC MG5114 RV
Résultats : présence de polluants, encrassement élevé.
Anomalies détectées : usure et échauffement.
Recommandations des experts IESPM : chercher l’origine de la pollution, contrôler la température de fonctionnement, surveiller le bon fonctionnement de l’inverseur, vidanger.
Comment faire pour pratiquer une analyse d’huile et le coût ?
1. Commander auprès du laboratoire le matériel adéquat pour réaliser votre prélèvement.
2. Prélever un échantillon d’huile par la jauge à huile du moteur (et inverseur) en prenant la précaution de faire tourner le moteur pour lui permettre d’atteindre sa température habituelle de fonctionnement.
Cela ne vous prendra pas plus de 5 minutes et ne nécessite aucune connaissance mécanique particulière.
3. La fiche de renseignements fournie par le laboratoire doit être remplie soigneusement car toutes les informations sont utilisées pour l’analyse, les tests et le contrôle qualité. Des informations incomplètes ou fausses auront une incidence sur la pertinence du diagnostic.
Ensuite, sous 3 ou 4 jours, vous recevrez votre rapport d’analyse accompagné de son interprétation. Ce diagnostic complet vous orientera sur les éventuelles actions de réparation à entreprendre pour utiliser votre bateau en toute sécurité.
Le coût d’une analyse est d’environ 80euros.
Nos conseils
Certains mécaniciens, voire vendeurs de bateau, dissent qu’une telle analyse est inutile. C’est faux. Tous les professionnels vous diront de la faire et certaines assurances l’exigent. A titre personnel, j’ai visité un bateau équipé de deux moteurs Nanni totalisant moins de 700 heures. Sur l’aspect, rien à redire, moteur et cale parfaitement propre, mais après interrogation du mécanicien, j’ai appris qu’ils avaient été déposés et repeints. L’analyse d’huile a décelé dans les inverseurs une teneur importante en plomb et en cuivre et sur l’un des moteurs de l’eau et du liquide de refroidissement dans l’huile. Conclusion : je n’ai pas réalisé la transaction.