Les Grands Lacs au fil des saisons

Les Grands Lacs des Etats-Unis recouvrent 243000km². Si vous faîtes un séjour sur la lune vous pourrez les repérer aisément. Et ces plans d’eaux sont prisés puisque ce ne sont pas moins 4,2 millions de bateaux de plaisance qui y croisent. Moi je suis tenté… peut-être pas à n’importe quelle saison.
Par définition un lac est une étendue d’eau au milieu des terres. Etendue d’eau qui subit donc un climat continental, c’est-à-dire qu’à l’opposé de la tempérance océanique, les conditions météo d’un lac, en particulier les températures, peuvent être extrêmes. Et le Capitaine Haddock avait-il observé que si l’eau de mer a besoin d’une température nettement négative pour geler, l’eau d’un lac gèle dès 0°. Quand la mer se refroidit, sa salinité, donc sa densité, augmente et l’eau froide de surface plonge en étant remplacée par de l’eau plus chaude. Sur un lac, l’eau gèle dès que la température est à 0°C et la glace reste en surface.
En hiver, il y a peu de chances de pouvoir naviguer. À mesure que la saison progresse, la glace s'étend depuis la côte vers le milieu du lac jusqu’à atteindre son maximum en février, avec une couverture d'environ 75% de la superficie pour le lac Supérieur, 50 % dans le lac Huron, 25% dans le lac Michigan.
Le printemps est souvent très court. On bascule rapidement du très froid au vraiment chaud. Cela donne parfois lieu à de drôles de phénomènes comme le « ice tsunami ». En 2014, il a gelé jusqu'au 25 avril et une couche de glace se trouvait encore en surface quand est arrivé brutalement, le 11mai sur les rives du Minnesota, de l’air à 25°C. La glace est devenue friable et des vents de 50km/h ont poussé de gros blocs sur la rive, envahissant rues et maisons. En été, les dépressions passent généralement au nord des Grands lacs et c’est de l'air chaud et humide qui arrive du sud. Sur l’eau plus froide, comme chez nous en mer d’Iroise, cela donne du brouillard. Les fronts froids apportent de l'air instable qui se traduit par de gros orages. Et si de belles périodes ensoleillées réchauffent la couche supérieure de l'eau, sa température ne dépasse pas beaucoup les 20°C… et encore faut-il être à proximité du rivage.
Puis l’automne arrive. Parfois indien, là il faut naviguer à vue des forêts pour le plaisir des yeux, parfois méchant, là il faut se souvenir du Big Blow de 1913. Cette tempête d’origine tropicale a été d’une force exceptionnelle puisqu’elle a soulevé des vagues de plus de 10 mètres et occasioné un blizzard (White Hurricane) mortel. Restant plusieurs jours sur les eaux encore relativement chaudes des lacs, elle a pris la vie de 235 marins.
Les marins d’eau douce n’oublieront pas que, sans être aussi extrêmes, les tempêtes d’automne sur les Grands Lacs répondent à un phénomène normal de conflits d'air chaud et d'air froid et sont donc fréquentes en cette saison.
Et notre Léman
Bien que 143 fois plus petit que le lac Supérieur, notre grand croissant de 72km de long est quand même le plus grand lac d’eau douce d’Europe. L’océan et son climat tempéré n’est pas si loin, 650km dans son ouest alors que ses grands frères américains sont à 3000 km du Pacifique. Les masses d’air qui arrivent sur la frontière franco-suisse sont donc beaucoup plus tempérées. Le Léman est alors considéré comme un lac chaud qui ne gèle que très rarement. Au plus froid, on enregistre la même température de 6°C en surface comme en profondeur.
Quant aux vents, ils sont particulièrement nombreux et tarabiscotés. Vaudaire, Bise, Bornan, Rebat, Séchard sont le plus souvent faibles. Quand la Bise se fâche, elle peut creuser des vagues de plus de 1,50m qui sont tellement courtes qu’elles en deviennent véritablement dangereuses.
Le Capitaine Haddock peut jurer mais naviguer en eau douce demande du bon sens marin pour, même s’il n’y a pas le feu au lac, mener sa barque à bon port… et pour les ports il y a le choix puisque le Léman en compte 70.
Mille sabords.