
Figaro Nautisme : Fabrice, vous venez de remettre votre bateau à l’eau après 3 mois de travail acharné et la mise en place de nouveaux foils, qu'est-ce qui va changer concrètement ?
Fabrice Amedeo : "Nous nous sommes lancés l’hiver dernier avec mon équipe dans le projet ambitieux de changer les foils de mon bateau en trois mois. Ce chantier très important nous a conduits à implanter des foils en C issus du bateau Hugo Boss d’Alex Thomson sur le mien, de procéder à de très importants renforcements structurels mais aussi à changer l’électronique et les pilotes automatiques de mon IMOCA. Tant et si bien que je me retrouve aujourd’hui quasiment avec un nouveau sur lequel je vais devoir réapprendre beaucoup de choses. J’ai pu m’en rendre compte sur la première course de la saison, la Bermudes 1000, qui ne s’est pas forcément passée comme prévu d’un point de vue sportif mais qui m’a permis de découvrir beaucoup de choses à bord. C’est une aventure incroyable qui m’attend aujourd’hui de découvrir le potentiel de mon bateau et de me hisser à son niveau d’ici le prochain Vendée Globe."
Daniel, quelle résonance ce projet a-t ’il pour vous qui dirigez une entreprise où la performance est au cœur des objectifs quotidiens ?
Daniel Hager : "Depuis 1955, le succès de Hager Group repose en grande partie sur le courage, ainsi que sur la volonté de prendre des risques calculés. Nous retrouvons ces deux éléments dans la voile hauturière. Cette pratique associe étroitement l'esprit d'exploration, la curiosité et la volonté d'affronter l'inconnu. Sans une bonne dose de ce dernier, les marins professionnels ne peuvent atteindre de "nouveaux rivages". C'est ce point commun que nous partageons avec Fabrice Amedeo et qui nous a conduit tous deux à unir nos forces sur la route du Vendée Globe 2024. Hager Group s'est fixé pour objectif d'accorder plus d'importance et de visibilité aux performances et, par conséquent, de mettre en évidence les excellentes réalisations. Le partenariat dans le domaine de la voile s'y prête très bien. Beaucoup de choses sont envisageables."
Daniel, qu'est-ce qui a motivé Hager Group à s'associer à Fabrice ?
Daniel Hager : "Nous partageons bien plus qu’un logo sur un bateau ou sur une voile. Nous nous reconnaissons dans la personnalité de Fabrice qui porte des valeurs communes à notre entreprise. Le courage et la détermination nécessaire au dépassement de soi dans une course au large sont des valeurs qui nous parlent et que nous partageons. Son engagement depuis le début de son aventure pour la préservation des océans et de la planète, en mettant son bateau au service de la science nous a également particulièrement touché en tant qu’entreprise engagée à réduire son impact environnemental. C’est ce double projet alliant sportif et préservation de l’environnement qui sont les fondements de notre collaboration. La course au large intéresse aujourd’hui de plus en plus d’entreprises car c’est un sport riche de sens et de valeurs."
Fabrice, ce n’est pas trop compliqué d’intégrer une marque franco-allemande à la famille de partenaires déjà à vos côtés ?
Fabrice : "Non pas du tout, bien au contraire. Hager Group est une entreprise avec un pied en France, un pied en Allemagne, certes, mais surtout avec une dimension internationale, et je suis animé aujourd’hui par une réelle volonté d’internationaliser mon projet. Par ailleurs, j’ai toujours eu une affinité particulière pour le peuple allemand. J’ai fait allemand première langue à l’école et ai étudié la philosophie en Allemagne. J’ai longtemps eu de nombreux amis en Allemagne, je me sens donc très proche des collaborateurs du groupe que j’ai pu rencontrer et je suis très fier d’avoir une entreprise internationale à mes côtés. J’espère que ce n’est que le début et que d’autres viendront ! Par ailleurs, le sujet de l’énergie est vraiment dirimant à bord d’un IMOCA sur un tour du monde et je suis très heureux d’être accompagné sur ce sujet par les équipes d’Hager Group."
Daniel, pouvez-vous nous expliquer comment se concrétise l’engagement de Hager Energy dans le projet ?
Daniel Hager : "Nous avons intégré notre unité commerciale Hager Energy ainsi que notre marque E3DC, dès l’origine de la relation. Hager Energy est spécialisée dans le stockage et la gestion d’énergie. L’objectif est d’apporter un soutien qui dépasse l’aspect financier en apportant des solutions technologiques pour permettre au bateau d’être moins dépendant aux énergies fossiles. Nous croyons fortement à l’apport des personnes, équipes et organisations pour créer un mouvement tourné vers le développement durable et favoriser les changements sur le long terme. L’intelligence collective peut nous aider à aller plus loin. Nous sommes convaincus que nous avons beaucoup à apprendre ensemble ! En concertation avec les équipes de Fabrice Amedeo et les experts internes de la gestion énergétique, nous avons l’ambition de contribuer à faire fonctionner le bateau avec un minimum d’énergie fossile embarquée et de permettre une meilleure gestion de l’énergie générée naturellement par le vent et le solaire. C’est un défi important tant pour Fabrice que pour nos équipes plus habituées à travailler sur des questions liées à la gestion énergétique de la maison et de la voiture que celle sur un bateau engagé sur une course au large."
Quelles sont les prochaines étapes ?
Fabrice Amedeo : "Je vais participer prochainement à la Vendée Arctique, une course entre la France et l’Islande. Cette course est très intéressante d’un point de vue sportif car elle nous conduit à traverser les systèmes météo selon un axe nord-sud alors que nous sommes habitués à partir à leur rencontre sur des traversées de l’Atlantique vers l’Ouest ou à être accompagnés par ceux-ci sur une traversée d’ouest en est ou sur un Vendée Globe. Cette course s’annonce aussi être un voyage très excitant puisque nous allons monter plus nord (65 degrés) que nous ne descendons sud (57 degrés) sur un Vendée Globe, le tout au moment du solstice d’été donc à un moment où nous aurons jour 24 heures sur 24. Je trouve cela fascinant. D’autre part, cette course va nous conduire dans des contrées plus que jamais fragilisées par le réchauffement climatique et ce sera sans doute l’occasion de prendre la parole sur ces sujets. Je compte d’ailleurs poursuivre mes mesures de pollution microplastiques avec mon capteur durant les deux semaines de navigation."
Daniel Hager : "Ce projet de mesure de la pollution des océans au moyen de capteurs embarqués est une initiative que nous soutenons particulièrement. Nous connaissons tous le problème mondial de la pollution au plastique. En parler est une chose mais agir c’est encore mieux. En collectant les microplastiques, Fabrice Amedeo a agi avec patience et persévérance et nous en voyons le résultat aujourd’hui. En aidant la Science, il contribue aux solutions futures. Nous nous associons aux efforts de Fabrice car il est du devoir des entreprises de s’attaquer à ce problème. Nous souhaitons ainsi continuer notre participation au projet dans le futur, en soutenant le fond de dotations Ocean Calling et en accompagnant Fabrice sur ses ambitions océanographiques et pédagogiques, tout ce qui donne aujourd’hui du sens à son projet et à notre présence à ses côtés. En nous mobilisant, tous ensemble, pour préserver nos mers et océans, nous nous préparons je l’espère des perspectives meilleures pour nos enfants."