
Pas de coups d’éclat tonitruants ni de grandes manœuvres spectaculaires, mais une lutte d’usure, de lecture fine du plan d’eau et de sang-froid. Dans le centre du Solent, le comité de course mené par Stuart Childerley avait tracé un parcours au cordeau : un aller-retour au vent pour chaque classe (1,6 mille pour les AC1, 1,4 mille pour les AC2), bien dégagé de la côte de Hill Head, pour un test pur de vitesse et de finesse.
AC1 : duel de haut vol entre Beau Geste et Jolt 3
Dans cette classe très disputée, le TP52 Beau Geste mené par Karl Kwok (RHKYC) a pris un excellent départ depuis le centre de la ligne, tout comme Jolt 3 de Peter Harrison (YCM). Malgré une entame plus incisive de Black Pearl, c’est Beau Geste qui boucle le premier bord au vent en tête. Solide dans les transitions, il creuse l’écart sous spi. Derrière, Zen (CYCA) sort du bois, tandis que Caro et Black Pearl mènent la chasse dans le peloton.
Au dernier bord, Jolt 3 revient à la faveur d’une trajectoire impeccable et, après correction IRC, coiffe Beau Geste sur le fil... pour trois petites secondes ! Zen s’empare de la troisième place, talonné par un Django WR51 héroïque, revenu de loin après un départ anticipé.
« Une journée façon jeu de l’oie, avec des bascules brutales et aucun répit », souffle un membre de l’équipage de Beau Geste. « On a dû virer à la volée sur un refus de priorité en pleine bascule de 50 degrés. Pas de mots, que de l’instinct. » Dans cette flotte, l’intensité ne faiblit pas. « On partage nos datas le soir entre équipiers des différents bateaux du RHKYC. L’Admiral’s Cup, ce n’est pas juste une addition de performances individuelles. C’est une cohésion d’équipe. »

AC2 : Nola, la surprise venue du Nord
Moins médiatisée, la classe AC2 a offert un scénario tout aussi riche en rebondissements. Si Beau Ideal (RHKYC) a brillé sur l’eau en prenant rapidement la tête, c’est Nola (KSSS), un MAT1220 mené par Taavet Hinrikus, qui a raflé la mise sur le papier. Grâce à un départ parfaitement calé au pin-end et un choix tactique osé vers la gauche du plan d’eau, l’équipage nordique a su capitaliser sur la pression et rester maître de ses trajectoires.
« Le plan, c’était de jouer les shifts à fond et de ne pas se retenir. Juuso (Roihu) a pris le risque, et c’est passé », raconte Aksel Magdahl, le tacticien. « Contre des bateaux plus puissants comme Callisto ou AMP-lifi, on n’a pas le droit à l’erreur. Il faut réfléchir plus vite, agir plus juste. »
Un choix payant : Nola l’emporte avec plus d’une minute d’avance en temps compensé. Beau Ideal termine deuxième, AMP-lifi sauve sa troisième place d’un souffle devant Abracadabra.
Le classement reste serré
Après quatre manches, le Royal Hong Kong Yacht Club conserve une légère avance au classement général, talonné par le Yacht Club de Monaco. Les Néo-Zélandais du RNZYS complètent le podium provisoire, mais rien n’est joué. Les écarts sont infimes, les points des courses offshore pèsent lourd, et chaque régate compte désormais double. Une certitude : dans ce format exigeant, la constance est reine et la moindre erreur se paie comptant.
Prochaine manche : un plan d’eau imprévisible, des équipes en confiance et un trophée encore loin d’être joué. L’Admiral’s Cup version 2025 tient toutes ses promesses.