Jérémie Beyou (Charal) 13e du Vendée Globe

Par Figaronautisme.com / Vend?e Globe

Ce samedi 6 février à 09 heures 15 minutes et 58 secondes (heure française), Jérémie Beyou a franchi la ligne d’arrivée des Sables d’Olonne après 89 jours 18 heures 55 minutes et 58 secondes de course autour du monde en solitaire sans escale et sans assistance.

Le skipper de Charal termine 13e du Vendée Globe à l’issue d’un périple marqué par son retour au port pour réparer de multiples avaries, un come back en course plus de 9 jours après ses congénères et une remontada au cœur de la flotte, en doublant 13 concurrents. Une belle consolation pour celui qui était estampillé grand favori de ce 9e Vendée Globe et qui dû lutter contre sa nature profonde de compétiteur pour se fixer d’autres objectifs.

Sur une mer plate, dans un vent de 12-13 nœuds de secteur Nord, l’ombre du bateau noir Charal s’est dessinée au large des Sables d’Olonne.

La course de Jérémie

Plus qu’un combat avec ses concurrents, comme il en a l’habitude, c’est un combat intérieur qu’a dû livrer Beyou pour son 4e Vendée Globe. Toutes les cases étaient cochées pour faire de sa campagne 2020 un projet gagnant : une équipe structurée, bateau de dernière génération conçu et construit avant les autres (mise à l’eau en août 2018) qui a bénéficié de deux années de mise au point et de deux saisons de courses, marquées par un podium sur la Transat Jacques Vabre et une victoire dans la Vendée Arctique Les Sables d’Olonne. À 44 ans, le triple vainqueur de la Solitaire du Figaro, déjà sur la troisième 3e marche du podium lors de sa dernière participation au Vendée Globe, visait en toute logique une victoire.  Mais des avaries techniques en ont décidé autrement.

Le 11 novembre (trois jours après le départ), au grand large du cap Finisterre, et après plusieurs classements en tête, Jérémie annonce qu’il fait demi-tour. Il rentre au port des Sables d’Olonne pour réparer, entre autres, une bastaque tribord cassée et un safran endommagé. Le règlement lui en laisse le droit. Il a jusqu’au 18 novembre 14h20 pour repartir en course. « Ce qui est dur, c’est la décision de faire demi-tour. Tu sais que tu es forcé de renoncer à ce sur quoi tu t’es concentré pendant quatre ans de préparation. (…) déclarait un Jérémie défait à son arrivée au ponton de Port Olona. Maintenant, revoir tout le monde ici, ça remet une grosse dose d’émotion et ce n’est pas facile à gérer. Tu aimerais être partout sauf là ».  Dès l’amarrage du bateau noir dans le port vendéen le 14, son équipe se met au travail, de jour comme de nuit. Entre autres dégâts, il faut aussi réparer une cloison de barre d’écoute endommagée. Mission accomplie, puisque le 17 novembre à 17h10, Charal franchit la ligne de départ pour la deuxième fois, alors que la flotte est dans son 9e jour de mer et que le leader HUGO BOSS est sur le point de franchir l’équateur !

Pour Jérémie, c’est une autre course qui commence. Une course faite de petites victoires quotidiennes, que le compétiteur doit désormais apprendre à apprécier.  Il lui faut : 1 / se faire une raison 2/ trouver de nouveaux objectifs 3/ les assumer 4/ retrouver l’appétit, le sommeil et le sourire.  « Je découvre une facette de mon sport que je ne connaissais pas » révèle t-il.

Pendant presque un mois, il va naviguer totalement seul, à la poursuite de la queue de flotte. Très mal servi par la météo en Atlantique Sud, il fait néanmoins la jonction début décembre et dépasse son premier concurrent (Stark) le 11, avant le franchissement du cap de Bonne Espérance. Aux portes du Grand Sud, le skipper de Charal n’est pas mécontent d’être à nouveau entouré par ses pairs. Le naufrage de Kevin Escoffier a jeté un froid et chacun prend désormais conscience de l’importance de naviguer groupé dans le long désert liquide des mers australes, où les concurrents alentours sont finalement les meilleurs anges gardiens.

Dans l’océan Indien, Jérémie confie : « j’essaie vraiment de ne pas trop charger le bateau et d’être un peu plus en glisse qu’en force. Mon seul objectif est de passer le cap Horn avec un bateau en bon état ». Alors il ne force pas. N’atteint jamais des vitesses supersoniques. Ce qui ne l’empêche pas de doubler un à un ses prédécesseurs, jusqu’à gagner 7 places.

À l’entrée du Pacifique, il rattrape le groupe suivant et passe le cap Horn en 17e position en compagnie d’Arnaud Boissières et Alan Roura qu’il finira par déborder au large de l’Argentine. Au passage, il avoue aussi découvrir un autre aspect de sa situation à l’arrière de la flotte : le plaisir de discuter plus légèrement et plus librement avec ses compagnons de voyage, chose presque impossible lorsqu’on se bagarre à couteaux tirés pour la victoire avec la tête de course.

Il revient progressivement à la hauteur de Romain Attanasio, lequel s’englue de très longues heures dans le pot au noir.  Les deux hommes vont naviguer de conserve pendant toute la remontée de l’Atlantique Nord. Ils passent ensemble à l’intérieur de l’archipel des Açores alors qu’ils se font secouer dans une grosse dépression. Et terminent l’un derrière l’autre, jusqu’à l’arrivée, discutant et se réconfortant par messagerie interposée.

Reparti 32e, soit bon dernier (Nicolas Troussel avait déjà abandonné) plus de neuf jours derrière ses congénères, Jérémie a réussi un exploit qui ne figurait pas dans la liste de ses objectifs : terminer ce 9e Vendée Globe en milieu de flotte, après avoir proprement 13 bateaux ! Il a aussi relevé un autre challenge, mental celui-ci : il est allé au bout du voyage, même lorsque sa quête victoire - son carburant, sa motivation, sa raison d’être là -, est devenue impossible.

« Un jour, j’aimerais bien gagner cette course. Si ce n’est pas cette fois-ci, ce sera une autre fois » confessait-il avant le départ. Alors oui, ce sera pour une autre fois ! Rendez-vous dans quatre ans.

Les stats de Jérémie Beyou (Charal)

Vitesse moyenne de 11,31 nœuds sur le parcours théorique de 24 365,74 milles.

Distance réellement parcourue sur l’eau : 29 728,45 milles à la vitesse moyenne de 13,80 nœuds.

Les grands passages

Equateur (aller)

32e positon le 29/11/2020 à 09h42 UTC après 20j 20h 22min à 10j 20h 23min du leader HUGO BOSS

Cap de Bonne Espérance

27e le 12/12/2020 à 01h07 UTC en 33j 11h 47min à 11j 01h 56min du leader Apivia

Cap Leeuwin

20e le 23/12/2020 à 18h58 UTC en 45j 05h 38min à 10j 07h 33min du leader Apivia

Cap Horn

17e le 11/01/2021 à 15h34 UTC en 64j 02h 14min à 9j 01h 52min du leader Maître CoQ IV

Equateur (retour)

14e le 25/01/2021 à 04h05 UTC en 77j 14h 45min à 8j 08h 53min du leader Bureau Vallée 2

Distance max sur 24 heures

Le 25 décembre 13h00 UTC : 476.66 nm, à 19.9 nœuds de moyenne

Leadership (pointages en tête)

Du 08 novembre à 15h00 UTC au 09 novembre 04h00 UTC pendant 13h 00min 00s

Du 10 novembre 04h00 UTC au 10 novembre 11h00 UTC pendant 07h 00min 00s

Son bateau

Charal, plan VPLP (foils) construit chez CDK Technologies, mis à l’eau le 18 août 2018

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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