
Un art de vivre
En France, le terme thalassothérapie est utilisé pour la première fois en 1865 par le Docteur Joseph La Bonnardière dans sa thèse Introduction à la Thalassothérapie. Ce néologisme regroupe le mot thalassa qui signifie mer et therapeia, traitement en grec. Pourtant, l’usage de l’eau de mer à des fins curatives et préventives est une pratique bien plus ancienne. Les Égyptiens et les Grecs sont les premiers à reconnaître les propriétés thérapeutiques de l’eau de mer. « La mer lave les maux de tous les hommes », ainsi avisait le philosophe et poète grec Euripide (420 avant J.-C.). D’autres en recommandaient l’usage tel que l’historien grec Hérodote : « la cure de soleil et la cure de mer s'imposent dans la plupart des maladies et surtout dans les affections de la femme ». À l’époque romaine, les bains de mer et de soleil deviennent un art de vivre. Les thermes fleurissent, les esclaves boivent de l’eau de mer dans du vin cuit pour se requinquer tandis que Cléopâtre s’enduit de boue marine venant de la mer Morte.
L’eau de mer : du dégoût à l’apologie
Au Moyen Âge, la mer n’est plus cet élément naturel sacré. Elle est même réduite au dégoût. L’hygiène corporelle importe peu, et on abandonne les bains de mer et les cures thermales. Il faut attendre le XVIe siècle pour que l’eau de mer retrouve sa dignité. En France, c’est Ambroise Paré, premier chirurgien du roi Henri III, qui préconise les bains de mer pour soigner certaines maladies de peau comme la gale. Au XVIIe siècle, les Anglais redécouvrent les vertus thérapeutiques de l’eau de mer grâce au Dr John Floyer qui conseille les bains froids pour soulager les rhumatismes. Les premiers bains thermaux apparaissent alors en Angleterre. Un autre médecin anglais, Richard Russel, en fait éloge dans son ouvrage The use of sea water (l’usage de l’eau de mer) publié en 1753, où il recommande vivement l’usage de l’eau de mer à titre curatif et sous toutes ses formes : « Il faut boire de l’eau de mer, s’y baigner et manger toutes choses marines où sa vertu est concentrée ».
La France commence alors à s’intéresser de près aux pratiques thérapeutiques de ses voisins d’outre-manche. Car jusque là, l’eau de mer est seulement utilisée contre la rage. En 1800, un centre de soins pour rhumatismes et affections dépressives est créé à Boulogne-sur-Mer. Les résultats obtenus sont encourageants si bien qu’un premier établissement de bains chauds ouvre ses portes à Dieppe en 1822. S’ensuit la création, au XIXe siècle, de divers centres de bains de mer thérapeutiques dans toute la France, de Cherbourg à Biarritz en passant par Sète.
Naissance de la thalassothérapie moderne
Après les premiers travaux du Docteur La Bonnardière, sur les vertus du milieu marin, c’est en 1904, que le biologiste et chercheur René Quinton, considéré comme le Darwin français, pose les fondements scientifiques des vertus de l’eau de mer dans son ouvrage L’eau de mer, milieu organique. Il y démontre les ressemblances entre l’eau marine et le plasma sanguin.
En 1894, 150 médecins se réunissent à Boulogne-sur-Mer pour le premier congrès international des bains de mer et d’hydrologie. Cinq ans plus tard, grâce au médecin Louis Eugène Bagot, le premier centre de thalassothérapie d’Europe, l’institut Marin Rock’roum, ouvre ses portes à Roscoff, en Bretagne, ville choisie pour la qualité de son air et de ses eaux. Les personnes souffrant de rhumatismes viennent alors se soigner dans une eau de mer chauffée et en mouvement. Ce sont les premiers soins d’hydrothérapie. Ces instituts d’abord médicalisés, avec le développement du chemin de fer et des stations balnéaires, deviennent des lieux de villégiatures où l’on se soigne dans le plaisir et la détente. Les nouveaux établissements comprennent des espaces de repos, des salons et des casinos. En 1959 est créée la société française de thalassothérapie, puis en 1964, Louison Bobet, le champion du monde de cyclisme, invente un nouveau genre en créant l’institut de Quiberon. Moins médicalisé, cet établissement est précurseur des centres de thalassothérapie modernes qui vont émerger dans toute la France.
Aujourd’hui, ils sont davantage axés sur le bien-être, la remise en forme et l’innovation en matière de technologie thérapeutique, tout en privilégiant le confort et le cadre de vie. À noter que les soins en thalassothérapie se pratiquent toujours en bord de mer, et qu’en France le label Qualicert atteste de la qualité des cures et des soins.