
Selon une étude de l’Office fédéral allemand de l’environnement, environ 142 millions de tonnes de déchets plastiques flottent déjà dans les océans du monde entier, et chaque année, six à huit millions de tonnes supplémentaires viennent alourdir ce fardeau. On estime qu'environ 15 % des déchets plastiques se retrouvent à la surface de l'eau, tandis que 15 % s’échouent sur les plages et 70 % s'accumulent dans les profondeurs marines. Cette accumulation au fond des océans provoque une pression sur les écosystèmes, contribuant à un manque d’oxygène et modifiant les habitats marins.
Les données les plus récentes estiment qu’environ 24 400 milliards de fragments de microplastiques flottent à la surface des océans, représentant une masse comprise entre 82 000 et 578 000 tonnes. Fait inquiétant : ce chiffre pourrait être largement sous-estimé. En effet, selon des études de l’Ifremer et de SciencePost publiées en 2023, 95 % de la pollution plastique se dépose sur les fonds marins, échappant ainsi aux méthodes d’analyse traditionnelles. Cette réalité souligne l’ampleur d’une crise qui impacte non seulement l’environnement marin, mais aussi les écosystèmes qui en dépendent et, plus largement, la santé de la planète.
Des impacts multiples sur la vie marine et humaineLa présence de microplastiques dans les océans a des conséquences dramatiques sur la biodiversité marine. Ces particules sont ingérées par des organismes marins à tous les niveaux de la chaîne alimentaire, des planctons aux grands prédateurs comme les thons. Une étude menée par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) en 2023 révèle que plus de 80 % des espèces marines étudiées dans les zones côtières européennes contiennent des microplastiques dans leur système digestif.À titre d’exemple, une baleine bleue peut ingérer jusqu’à 10 millions de particules de plastique par jour simplement en filtrant l’eau pour se nourrir, selon RTS. Ces fragments peuvent provoquer des occlusions intestinales et libérer des substances chimiques toxiques, affectant gravement la santé et la reproduction des animaux marins.
Les humains, eux aussi, ne sont pas épargnés. En consommant des poissons ou fruits de mer contaminés, nous ingérons directement ces particules. Une étude publiée dans Environmental Science & Technology en 2022 estime que chaque individu ingère environ 50 000 particules de plastique par an, un chiffre potentiellement sous-évalué lorsqu’on inclut l’eau et l’air.
Par ailleurs, les microplastiques sont suspectés de perturber le système endocrinien et de provoquer des inflammations. Bien que les recherches sur leurs effets à long terme se poursuivent, il est d’ores et déjà évident que cette pollution représente un risque sanitaire croissant.

Le rôle du nautisme dans la lutte contre les microplastiquesFace à ce constat accablant, le nautisme peut devenir un acteur de premier plan dans la lutte contre les microplastiques. Les plaisanciers, les skippers, et les professionnels du secteur disposent d’outils concrets pour limiter cette pollution :
- Réduire les plastiques à bordL’usage de plastiques à usage unique reste courant sur de nombreux bateaux. Pourtant, des alternatives existent : couverts en bambou, gourdes en acier inoxydable, et assiettes compostables, par exemple. L’utilisation de crèmes solaires biodégradables et de wax pour planches de surf en liège peut également limiter les rejets de microplastiques provenant de produits cosmétiques et d’équipements sportifs.
- Soutenir la science marineDe nombreux navigateurs, comme le skipper Fabrice Amedeo, embarquent aujourd’hui des capteurs permettant de collecter des données sur les microplastiques. Ces informations, analysées par des instituts comme l’Ifremer, contribuent à mieux comprendre l’ampleur de la pollution et ses impacts. Selon Ifremer, ces initiatives participent à une meilleure cartographie des zones les plus touchées et à l’élaboration de politiques de nettoyage adaptées.
- Participer aux projets de nettoyage
Des organisations telles que The SeaCleaners mobilisent des plaisanciers pour collecter les plastiques en mer tout en sensibilisant à leur nocivité. Par ailleurs, les nettoyages de plages, même dans les endroits reculés, sont essentiels. Une étude menée sur les îles Pitcairn, dans le Pacifique Sud, a révélé la présence de 4 500 morceaux de plastique par mètre carré de sable, même sous dix centimètres de profondeur. Ce constat montre que l’élimination des déchets ne peut se limiter à la surface visible.
- Privilégier des peintures écologiquesLes peintures antifouling, destinées à prévenir l’encrassement des coques, sont une source importante de microplastiques. Opter pour des alternatives écologiques permettrait de limiter ces rejets, tout en réduisant l’impact global du nautisme sur l’environnement.
Une prise de conscience pour un avenir durable
Réduire les microplastiques dans les océans nécessite des efforts concertés entre scientifiques, gouvernements, industries et citoyens. Si le nautisme adopte des pratiques responsables et soutient la recherche, il peut devenir une force de changement dans la lutte contre cette pollution invisible mais omniprésente.
Cette prise de conscience doit s'accompagner d'un engagement global. Protéger nos océans, c'est garantir la pérennité de leurs écosystèmes et, in fine, notre propre santé. En tant que plaisancier, chaque geste compte pour transformer la mer en un espace d'aventure et de préservation.