Pollution des mers : comment les navigateurs aident la recherche scientifique

Par Figaronautisme.com

Les océans, véritables poumons de la planète, sont au cœur des préoccupations environnementales. La pollution, le réchauffement climatique et l’appauvrissement de la biodiversité marine inquiètent les scientifiques. Face à ces défis, les navigateurs en solitaire et les skippers engagés dans des courses au large jouent un rôle croissant dans la protection des océans, en collaborant avec les chercheurs pour collecter des données précieuses. Leur contribution, qui a pris un tournant décisif avec des événements comme le Vendée Globe, est devenue un exemple à suivre dans le monde du sport et au-delà.

Vendée Globe : une course au service de la science

Depuis 2014, la collaboration entre la classe IMOCA et la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO a permis de lier performance sportive et recherche scientifique. Lors de l’actuelle édition du Vendée Globe, cette initiative s’est renforcée. Les skippers ont embarqué des bouées météorologiques et des flotteurs Argo à bord de leurs IMOCA pour collecter des données essentielles sur les océans.

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© Anne Beauge / Alea

25 skippers participent activement à ce projet en déployant du matériel scientifique dans des zones maritimes souvent inexplorées, comme l’Atlantique Sud. Ces instruments, dont les bouées météo et les flotteurs Argo, mesurent la température, la salinité et la pression atmosphérique. Les données collectées enrichissent les bases mondiales utilisées pour améliorer les modèles climatiques et les prévisions météorologiques.
Par exemple, les flotteurs Argo, robots autonomes capables de plonger jusqu’à 2000 mètres de profondeur, transmettent des informations en temps réel à la communauté scientifique mondiale. Ces capteurs sont essentiels pour comprendre les effets du réchauffement climatique sur les courants océaniques et les écosystèmes marins.
Parmi eux, Fabrice Amedeo (Nexans-Wewise) se distingue en transformant son IMOCA en un véritable « bateau pédagogique ». « Mon projet est tourné vers la préservation des océans, » explique-t-il. À bord, il compte trois capteurs pour mesurer le CO2, analyser les microplastiques et étudier la biodiversité. En plus, il a embarqué des bouées pour analyser les vagues et courants ainsi qu’un flotteur Argo. « Je sais que l’ensemble des données collectées sont très précieuses au niveau climatologique, océanographique ou encore météorologique, » ajoute-t-il.

Des initiatives qui s’intensifient

En dehors du Vendée Globe, d’autres courses au large intègrent des missions scientifiques. En 2023, lors de la Guyader Bermudes 1 000 Race, plusieurs skippers ont largué des bouées météo fournies par l’Ifremer et l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Ces bouées, bien qu’anodines à l’œil, permettent de recueillir des données précises sur des zones maritimes peu accessibles aux navires de recherche traditionnels. « C’est fascinant de voir comment, en tant que marins, nous pouvons contribuer directement à la recherche et à la protection des océans, » souligne Julien Pulvé, skipper de l’Imoca Maître-Coq en 2023.
Les retours des marins sont unanimement positifs. Ces collaborations renforcent leur sentiment d’engagement envers la protection des océans. De plus, la classe IMOCA a rendu obligatoire, pour la prochaine édition en 2028, l’embarquement de matériel scientifique sur chaque bateau participant. Une évolution qui pourrait faire école auprès d’autres disciplines sportives et professionnels du nautisme.

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© Anne Beauge / Alea / VG2024

Des skippers comme ambassadeurs

Le rôle des skippers dépasse la simple collecte de données : ils deviennent des ambassadeurs de la recherche scientifique et de la sensibilisation environnementale. Louis Burton (Bureau Vallée) a ainsi embarqué un photomètre Calitoo pour analyser l’atmosphère. « On a la chance de pouvoir se balader à travers le monde et d’aller sur des routes peu empruntées, » explique-t-il. « Si ça peut rendre service à ceux qui font attention à ce qui se passe dans l’atmosphère et aider à ce que la nature reste belle, je trouve ça très bien. »

Antoine Cornic (Human Immobilier) partage cette vision, embarquant plusieurs matériels scientifiques, dont une bouée météo. « Depuis que je suis en IMOCA, je me suis toujours porté volontaire, je le fais vraiment avec plaisir, » confie-t-il. « J’aime la science, j’aime l’idée qu’on puisse faire évoluer les connaissances et que ça puisse participer à sensibiliser les jeunes générations. »

Guirec Soudée (Freelance.com) et Sam Goodchild (VULNERABLE), tous deux bizuths du Vendée Globe, ont également embarqué des flotteurs Argo, à larguer entre le Brésil et l’Afrique du Sud. « Je m’en serais voulu de ne pas prendre ça à bord de mon bateau, » affirme Guirec. « Ce n’est pas très lourd (20 kg) et ça permet de collecter des datas qui bénéficieront à beaucoup de monde, dont nous les marins. » De son côté, Sam Goodchild ajoute : « Si les scientifiques nous disent que c’est utile, que ça les aide dans leurs recherches, il faut les aider. Nous allons là où ils ont peu de datas donc cela paraît logique. »

Une science en mouvement grâce aux skippers

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© Anne Beauge / Alea


Les contributions des skippers ne se limitent pas au Vendée Globe. Des équipements comme l’OceanPack, embarqués par Boris Herrmann (Malizia - Seaexplorer), Nicolas Lunven (Holcim-PRB) et Oliver Heer (Ocean Racing), permettent de récolter des échantillons d’eau de mer en continu. « Cela permet d’analyser plusieurs paramètres comme la salinité, la température, l’oxygène et le CO2, » précise Nicolas Lunven. « Ces données participent à améliorer notre connaissance de la santé des océans. »

Pour Boris Herrmann, l’impact va au-delà de la science : « C’est aussi grâce à ce type d’initiatives qu’on arrive à comprendre un peu mieux le changement climatique et son implication dans l’eau. »

Un avenir prometteur

Ces initiatives soulignent une prise de conscience croissante au sein du monde de la voile et des courses au large. En associant sport, recherche scientifique et écologie, les skippers donnent un exemple inspirant. Ils montrent que chaque acteur, quel que soit son domaine, peut jouer un rôle déterminant dans la lutte contre la pollution et le changement climatique.

Le Vendée Globe, en tant que pionnier de ces collaborations, ouvre la voie à un avenir où la compétition sportive se mêle à la science pour le bien commun. Au-delà de leurs performances, ces marins deviennent des gardiens de l’océan, prouvant que la voile peut être bien plus qu’un sport : un véritable levier pour protéger notre planète bleue.
Retrouvez chaque jour notre analyse météo de la course avec METEO CONSULT Marine dans notre dossier spécial Vendée Globe.

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…