Pourquoi la vitesse d’un navire est-elle calculée en nœuds ?

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Si vous avez déjà scruté un écran de cartographie marine ou suivi une régate, vous avez forcément remarqué que la vitesse des bateaux s’exprime en nœuds et non en kilomètres par heure (km/h). Cette particularité nautique peut intriguer, surtout lorsqu’on est habitué aux unités terrestres. Pourtant, derrière ce choix se cache une logique historique et scientifique qui remonte à plusieurs siècles et qui continue de structurer la navigation moderne. D’où vient cette unité ? Pourquoi perdure-t-elle encore aujourd’hui à l’ère du numérique et des GPS de précision ? Décryptage d’un système qui a traversé le temps et les océans.

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Si vous avez déjà scruté un écran de cartographie marine ou suivi une régate, vous avez forcément remarqué que la vitesse des bateaux s’exprime en nœuds et non en kilomètres par heure (km/h). Cette particularité nautique peut intriguer, surtout lorsqu’on est habitué aux unités terrestres. Pourtant, derrière ce choix se cache une logique historique et scientifique qui remonte à plusieurs siècles et qui continue de structurer la navigation moderne. D’où vient cette unité ? Pourquoi perdure-t-elle encore aujourd’hui à l’ère du numérique et des GPS de précision ? Décryptage d’un système qui a traversé le temps et les océans.

Un héritage des marins d’antan : le loch à bateau
Pour comprendre pourquoi la vitesse d’un navire est mesurée en nœuds, il faut remonter à l’époque des grands voiliers du XVIe siècle, quand les instruments de mesure étaient rudimentaires et que les marins s’orientaient avec le soleil et les étoiles.
À cette époque, la navigation reposait sur des calculs manuels, notamment pour estimer la vitesse du navire et anticiper la distance parcourue. Mais comment mesurer la vitesse d’un bateau en pleine mer, sans repères fixes ni technologies avancées ?
Les marins ont trouvé une solution ingénieuse : le loch à bateau. Cet instrument consistait en une planchette de bois lestée, attachée à une longue corde elle-même divisée en segments marqués par des nœuds espacés d’environ 1,85 mètre.
Le fonctionnement était simple :
1. La planchette était jetée à l’eau depuis l’arrière du navire.
2. Elle restait immobile à la surface tandis que le bateau continuait d’avancer.
3. Un sablier d’environ 30 secondes permettait de mesurer le temps écoulé.
4. Une fois le sablier vidé, on comptait combien de nœuds avaient défilé dans les mains du marin.
Si, par exemple, six nœuds avaient été déroulés en 30 secondes, cela signifiait que le bateau avançait à six milles nautiques par heure. C’est ainsi que le terme "nœud" est devenu une unité de mesure officielle de la vitesse en mer.

Le mille nautique : une unité taillée pour la navigation
Si le nœud est resté l’unité de référence, c’est aussi parce qu’il est lié à une autre mesure essentielle en mer : le mille nautique. Contrairement au kilomètre, qui est une unité arbitraire de distance, le mille nautique est directement lié aux dimensions de la Terre.
Un mille nautique correspond à une minute d’arc de latitude sur un méridien terrestre. Autrement dit, si vous parcourez 60 milles nautiques, vous avez parcouru exactement un degré de latitude.
Cette relation avec la géographie de la planète simplifie énormément la navigation. Les cartes marines sont conçues en milles nautiques, les distances entre ports s’expriment en milles nautiques, et donc la vitesse des navires est naturellement calculée en nœuds (1 nœud = 1 mille nautique par heure).
Un mille nautique vaut précisément 1 852 mètres, ce qui signifie que :
• 1 nœud = 1 852 mètres par heure (1,852 km/h)
• 10 nœuds = 18,52 km/h
• 20 nœuds = 37,04 km/h
Un voilier filant à 12 nœuds avance donc à environ 22 km/h, soit l’équivalent de la vitesse d’un vélo en pleine randonnée.

Une unité toujours incontournable dans la navigation moderne
On pourrait se demander pourquoi, à l’ère des GPS et des capteurs électroniques, les marins continuent d’utiliser le nœud plutôt que le kilomètre par heure. La réponse est simple : c’est l’unité la plus pratique et cohérente pour la navigation maritime et aérienne.
1. Une correspondance directe avec les cartes marines
Les cartes nautiques sont établies en milles nautiques. Si on utilisait le kilomètre, il faudrait sans cesse convertir les distances, ce qui introduirait des risques d’erreur dans les calculs de navigation.
2. Une unité utilisée dans les prévisions météo
Les bulletins de Météo Consult Marine et d’autres services météorologiques spécialisés expriment les vitesses du vent en nœuds. Un vent de 20 nœuds signifie qu’une embarcation subira une brise soufflant à environ 37 km/h. Pour un skipper, il est plus simple d’analyser les prévisions si elles sont exprimées dans la même unité que la vitesse de son bateau.
3. Une unité partagée avec l’aviation
L’aviation utilise aussi le nœud comme unité de mesure de vitesse. Les avions, comme les navires, évoluent dans des espaces où les distances sont basées sur les coordonnées géographiques, et non sur des repères fixes au sol.
4. Une standardisation internationale
Le nœud est reconnu par toutes les nations et utilisé sur toutes les mers du globe. Un cargo, un voilier de course ou un paquebot de croisière affiche sa vitesse en nœuds, qu’il navigue en Méditerranée, dans l’Atlantique ou dans l’océan Indien.

De la tradition à la technologie : le nœud toujours d’actualité
Aujourd’hui, la navigation s’appuie sur des outils ultra-modernes comme les GPS, les anémomètres et les centrales de navigation. Les marins n’utilisent plus de loch à bateau en bois, mais la vitesse d’un navire est toujours indiquée en nœuds sur les instruments de bord.
Les régatiers suivent leur vitesse sur l’eau (SOG - Speed Over Ground) et leur vitesse par rapport au vent (VMG - Velocity Made Good) en nœuds. Même les bateaux de plaisance affichent leur vitesse en nœuds sur leurs écrans électroniques.

Le nœud est bien plus qu’une simple unité de vitesse. Il est un héritage direct des marins du passé, qui ont su développer une méthode pragmatique pour mesurer leur progression en mer. Grâce à son lien avec le mille nautique et les coordonnées géographiques, il s’est imposé comme la référence absolue en navigation, aussi bien maritime qu’aérienne.
Si aujourd’hui la technologie a remplacé les cordes à nœuds et les sabliers, l’unité, elle, est restée intacte. La prochaine fois que vous entendrez parler d’un bateau avançant à 15 nœuds, vous saurez que cela signifie 27,78 km/h, et surtout, que cette mesure provient d’une tradition vieille de plusieurs siècles.
Alors, prêt à hisser les voiles et à filer à 6 nœuds vers l’horizon ?

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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