De la mini au maxi, à chaque bateau sa météo

Voiliers
Par Figaro Nautisme

Si la réflexion stratégique pour trouver la meilleure route est l’activité principale de chaque coureur au large, elle n’est pas alimentée, une fois sur l’eau, par les mêmes informations météorologiques selon les courses ou les types de bateaux.

Si la réflexion stratégique pour trouver la meilleure route est l’activité principale de chaque coureur au large, elle n’est pas alimentée, une fois sur l’eau, par les mêmes informations météorologiques selon les courses ou les types de bateaux.

En cet automne 2013, pas moins de six classes de bateaux s’affrontent, du Mini 6,50 au Trimaran de 31 mètres de Thomas Coville, avec pour chacun une accessibilité différente aux données météo.

 

Le strict minimum


Il y a une cinquantaine d’années, si l’humidité relative d’un torchon renseignait Moitessier sur l’approche d’un front, aujourd'hui l’information météo arrive à bord d’un mini 6,50 par un moyen qui peut surprendre par sa simplicité. En effet, le système utilisé est la Bande Latérale Unique, connue sous le nom de BLU, soit une radio customisée qui est utilisée dans le monde maritime ou aérien. Elle diffuse quotidiennement un bulletin type Grand Large, dicté par le directeur de course et adapté à la position de la flotte sur l’océan. Pourquoi ? La Mini-Transat reste la seule course où il n’y a pas de lien entre le bateau et la terre et c’est ce qui fait toute sa force. À bord, il n’y a pas d’ordinateur relié à un Iridium, donc pas de possibilité de se connecter à un service météo. Pourquoi n’y a-t-il pas de fac-similé (système de fax connecté à une BLU qui reçoit des cartes isobariques papiers) qui permettrait de recevoir des cartes isobariques ? Est-ce la crainte de la course à l’armement ? Peut-être. Parce que capter le bulletin météo correctement sur la BLU, réussir à le noter, puis en faire une carte isobarique pour comprendre la situation météorologique, le tout sur une coque de noix humide et instable, est un vrai challenge. S’entraîner n’est pas un vain mot !

Une « monotypie » des informations

Pour respecter un principe d’égalité des chances, le circuit Figaro propose aux coureurs un package météo pour les Transats. L’objectif est que tout le monde ait la même information au même prix ; et que la manière de recevoir l’information soit compatible avec un téléphone satellite, les données à récupérer ne doivent pas en effet être lourdes. Sur le bateau, le coureur télécharge des fichiers de vent numériques ou « Gribs ». Il les intègre ensuite au logiciel de navigation qui calcule le routage théorique, c’est-à-dire une route optimum. La qualité du coureur intervient dans sa capacité à comprendre le routage proposé et à mettre en évidence les différences entre la théorie et la pratique. Le vent n’est pas toujours celui indiqué par le Grib et le bateau peut aller plus ou moins vite que sur le fichier, la route idéale est donc modifiée et le coureur la redessine lui-même.
 

« Open bar » !

Pour les Class40’ et 60’ de la Transat Jacques Vabre, l’avis de course précise que « l'accès aux informations numériques ou graphiques n'est autorisé que si elles sont accessibles, à titre gratuit ou payant, à l'ensemble des concurrents, sans qu'aucune exclusivité ne puisse exister entre un fournisseur de données et un concurrent ou un groupe de concurrents ». Les bateaux sont équipés de terminaux utilisant des réseaux satellitaires, connus sous les noms de Fleet, OpenPort ou autre. Ils offrent la possibilité de télécharger des données lourdes en poids très rapidement, de surfer sur le web et d’envoyer des vidéos… Est-ce plus simple pour autant d’avoir accès à toutes les informations possibles ? Pas sûr, car « trop d’infos tue l’info » : récupérer l’information pertinente sans y passer des heures est un exercice à part entière. L’objectif est de consacrer du temps à l’analyse et non à la récupération de données ; qui plus est, la connexion coûte cher ! Aussi le temps passé à la table à carte en début de course peut avoir raison de quelques estomacs.
 

La spécificité du routage

La navigation en multicoque est un art délicat. Charles Caudrelier, équipier sur le MOD 70 Gitana, disait à l’arrivée de la Transat Jacques Vabre 2013 au Brésil « C’était très usant car il y avait en permanence l’un de nous deux à la barre. Et on ne la lâchait pas pendant nos quarts. Pour faire la moindre action, il fallait réveiller l’autre ». Les MOD 70 ont été conçus pour faire de l’équipage. Mener ces bateaux en double et gérer la météo en même temps aurait rendu l’exercice dangereux, ou dégradé le rythme de la course. Le routeur a donc été autorisé, c’est-à-dire qu’une personne ou une équipe à terre récupère les données météo, les analyse, les adapte au bateau et propose une trajectoire aux marins. Autant dire que le routeur vit au rythme de son bateau, certes au chaud, mais en veille durant toute la course. Il envoie une mise à jour de la trajectoire à chaque nouveau fichier, il tient compte de l’état du bateau ou de la capacité de l’équipage à le faire avancer ou pas, de la capacité du bateau à supporter telles conditions de mer ou de vent. Les navigateurs ne sont pas pour autant téléguidés, c’est un vrai dialogue entre le terrien et le marin qui demande confiance et complicité.

 

L’évolution des technologies et le besoin toujours croissant de communiquer vont-ils modifier la donne dans les années à venir ? La Mini-Transat, qui interdit toute communication avec la terre, restera-t-elle un cas à part ? Pour la classe Figaro, la question « d’ouvrir » la jauge, aujourd’hui restreinte au téléphone satellite, et d’autoriser des équipements permettant de recevoir davantage de données météo, se pose avant chaque transat. Quelle est la pertinence, pour les Multi 50 de la Transat Jacques Vabre, d’avoir un routeur à terre, puisque ces bateaux sont plus « maniables » que des MOD 70 ? À chaque série de bateaux sa réflexion, les questions restent ouvertes.
 

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Denis Chabassière
Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…