
Pionnier des foils il y a dix ans avec son catamaran volant de 72 pieds conçu pour conquérir l’Aiguillère d’Argent, l’équipe néo-zélandaise menée par Grant Dalton ne pouvait qu’être la première à innover. On leur avait promis 3 à 4 années de labeur avant de voir leur projet de foiler hydrogène baptisé ‘Chase Zero’ réellement opérationnel. Preuve de l’expertise du team kiwi, neuf mois plus tard, leur prototype fend déjà les eaux du port de Waitematã. Le catamaran de 10 mètres de long par 4.50 de large, ne pèse que 4 800 Kg tout équipé grâce à la maitrise du composite carbone utilisé en haute compétition. L’objectif de performance, 50 nœuds en pointe et 35 nœuds en vitesse de croisière avec alors 180 milles d’autonomie, ne pouvait passer que par des foils sustentant le bateau, pour le libérer en très grande partie de la résistance de l’eau. Mais une seule innovation d’importance ne suffisait visiblement pas à occuper les têtes bien faites de l’équipe d’ingénieurs kiwis, entre deux campagnes pour garder la coupe. Aussi, Dan Bernasconi le coordinateur du projet, a choisi l’hydrogène pour fournir toute l’énergie nécessaire à ces performances exceptionnelles.

Les Kiwis en pole
Toyota, sponsor de longue date de la célébrissime équipe s’est mué en partenaire technique en fournissant deux piles à hydrogène de 80kW de toute dernière génération, encore en préproduction. L’hydrogène vert, est stocké sous forme gazeuse à 350 bars dans quatre réservoirs de 8Kg chacun. L’électricité fournie par les deux piles à combustibles embarquées, une dans chaque coque, ne rejette que de l’eau pure après catalyse. Si ces deux piles fournissent la majorité de l’énergie nécessaire en vitesse de croisière, un parc batteries de deux fois 42kWh assure sans délai les pics de demande, lors de fortes accélérations ou pour atteindre les 50 nœuds. Un seul safran central avec foil en T assure la direction. Les deux moteurs de 220kW chacun actionnent deux hélices situées à l’extrémité des torpilles présentes de chaque côté du grand foil transversal situé au tiers avant, à 2.20 sous la coque. Une hauteur qui, une fois en vol, permet de s’affranchir des vagues et soigne le confort des six passagers pouvant prendre place à bord. Dans tous les cas, la mer n’est jamais très forte lors des régates d’AC75, aucun départ n’étant donné au-delà de 15 nœuds de vent. Après des premiers tests très concluants aux antipodes, Chase Zero fera donc surement le show à Barcelone en octobre 2024 pour la 37ème édition de la plus ancienne compétition au monde.

22 nœuds, 5cm de vagues de sillage et…le silence

Entre temps, l’équipe française de Sail GP, le circuit lancé par Larry Ellison, disputé sur les catamarans volants F50 issus justement de l’ancienne jauge de l’America’s Cup, aura écumé les Grands Prix suivi comme son ombre par un Candela C7. Le Suédois vient en effet de signer un partenariat avec l’équipe menée par Bruno Dubois. Son ‘tender’ électrique de 7.70m permettra de vivre au plus près l’intensité des régates de ce circuit mondial, sans aucune émission de CO2 « localement » comme a l’honnêteté de le préciser le constructeur. Sa filiale américaine étant dirigée par un certain Tanguy de Lamotte, ancien skipper du 60 pieds Imoca désormais aux mains de Sam Davies, la connexion avec le monde de la régate a été des plus aisée et le Candela C7 a pu faire sa première apparition dès le Grand Prix de San Francisco en mars dernier. Construite en série, la coque carbone ne pèse que 1 300 Kg toute équipée. La hauteur des foils permet de s’affranchir de vagues jusqu’à 1.10m de haut, tout en croisant à 22 nœuds. L’électricité n’étant pas produite à bord, elle est stockée dans un parc batteries de 40kWh permettant une autonomie de 50 milles nautiques au moteur de 55kW. Comme le Chase Zero kiwi, Candela a opté pour des moteurs à pods et a soigné leur efficacité : 80% de rendement, seulement 0,8kWh d’énergie au mille soit l’équivalent de 0,1 litre d’essence. Mais c’est le contrôleur de vol qui impressionne le plus. La technologie, issue de l’avionique, permet d’ajuster automatiquement les foils jusqu’à 100 fois par seconde, assurant un cocktail optimal entre confort, performance et sécurité. Avec un sillage de seulement 5 cm de haut et dans un silence absolu, le Candela est un parangon de discrétion. Mais paradoxalement, après les catamarans en compétition, il pourrait être le bateau le plus en vue lors du circuit 2022 de Sail GP.