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Dans l'attente de subir les effets d’un anticyclone, Armel Le Cléac’h caracole toujours en tête de la flotte en surveillant l’option sud prise par un Bernard Stamm ambitieux.
Mercredi après-midi, à l’approche de la porte des glaces de Crozet, les cinq leaders continuaient d’imprégner des vitesses élevées comprises entre 17 et 19,5 nœuds, poussés par un vent de sud-ouest de plus de 20 noeuds. Si Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) occupe toujours le fauteuil de leader dans cette traversée de l’Océan Indien, il ne possédait plus que 14 milles d’avance sur François Gabart (Macif), et 37 sur Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec). Les trois hommes naviguaient de concert sur une route nord à la lisière des Quarantièmes Rugissants en se posant probablement la même question : que va donner l’option sud prise par Bernard Stamm ? Le skipper de Cheminées Poujoulat, quatrième larron de la flotte, a plongé pratiquement deux degrés plus sud en latitude que le trio de tête, en espérant ne pas être englué dans les calmes d’un anticyclone qui rattrape les leaders à grandes enjambées. Réponse vendredi.
Un trio pas verni !
Derrière, c’est l’horreur ! Le trio de quinquas composé de Mike Golding (Gamesa), Jean Le Cam (SynerCiel) et Dominique Wavre (Mirabaud) est déjà emprisonné dans les nasses du fameux anticyclone. En naviguant à moins de 10 noeuds, ils vont encore concéder un paquet de milles. Depuis 15 jours, tous les passages à niveau météorologiques se sont refermés devant leurs étraves. Rageant.
Porte à porte
A 660 milles du tableau arrière de Mirabaud, les poursuivants, de Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered) à Tanguy de Lamotte (Initiatives Cœur) visent non pas la porte de Crozet, mais celle des Aiguilles, au sud de l’Afrique du Sud, et se réjouissent du solide flux d’ouest-nord-ouest (25-30 nœuds) qui les propulse à vive allure vers l’entrée de l’Océan Indien.
Heureux d’être en mer
A l’arrière, dans les parages de la petite île de Tristan da Cunha, Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) ferme la marche et profite des dernières journées tièdes sous le soleil pour procéder à une toilette en règle sur le pont de son bateau. A plus de 2 470 milles des leaders, le franco-italien ne fait pas du tout la même course en savourant le bonheur de participer à une belle aventure planétaire.
LES VOIX DU LARGE
Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) : « Depuis hier soir, le bateau atteint des vitesses dignes de ce nom, avec des pointes à plus de 24 noeuds. Il a fallu adapter la voilure progressivement au vent et à la mer qui s’est formée de l’ordre de 2,5m-3mètres maximum. Mais tout ça nous pousse et nous aide à faire des glissades. Ce vent soutenu marque symboliquement l'entrée d'Akéna dans les mers du Sud. Mon père m’a fait remarquer dans un email, ce matin, que je me trouve non loin de la position géographique d’il y a quatre ans ! Je vais tout faire pour garder ce flux soutenu le plus longtemps possible.... Il fait frais à bord mais le corps humain s’habitue progressivement. A l’intérieur, c'est compliqué de tenir debout sans se tenir mais c'est marrant. On se croirait dans le métro avec les accélérations ! ».
Tanguy De Lamotte (Initiatives-cœur) : « La nuit a été assez mouvementée. Depuis que je suis passé dans les îles de l’archipel de Tristan da Cunha, le vent est monté crescendo. Le bateau avance plutôt pas mal. C’est assez génial de glisser comme ça, il y a des albatros dans mon sillage qui me suivent. Il y a des belles séries de vagues donc on part en survitesse assez rapidement. Les mouvements sont assez brutaux, il faut bien se tenir. Il y a des belles vagues, c’est délicat. On a du vent et le bateau ne force pas. Il n’y a aucun souci pour tenir la cadence dans les prochains jours. Je vais passer assez facilement la prochaine porte. On devrait atteindre celle des Kerguelen dans six jours sans trop de difficulté ».
Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) : « Nuit assez tonique. Pas mal de vent, pas mal de grains. La mer s’est un peu calmée, l’anticyclone pousse derrière nous, il ne faut pas trainer. Il faut vite passer la porte devant nous avant qu’il n’arrive ».
Mike Golding (Gamesa) : « Je me sens vraiment bien. Je sens que le bateau est également en bonne condition. Et je commence à me dire que nous avons déjà fait une bonne partie du parcours. Pour être tout à fait honnête, j'aimerais que l'écart avec les leaders soit moindre mais nous sommes dans le même système météo qu'eux. Au départ, j'ai eu du mal à trouver mes marques, mais ça y est maintenant, je suis complètement dedans et prêt à prendre la course à bras le corps ».
Dominique Wavre (Mirabaud) : « Ça tape beaucoup, on est un peu secoué, comme dans un shaker. La mer est très indisciplinée. On est rattrapé par un anticyclone. On est tellement nord qu’on a une route vers les anticyclones plus que vers les dépressions. On a une atmosphère lourde. L’Océan Indien est compliqué. Je vais passer pas mal de temps sur la table à carte. Pour l’instant, je sais ce que j’ai à faire, mais je ne vais pas vous le dire, car j’ai deux petits gars pas loin qui aimeraient bien savoir ».
Jean Pierre Dick (Virbac-Paprec) : « Ça va, il y a du vent, beaucoup de mer. La mer est forte, beaucoup de grosse houle et dans des directions assez croisées. Quand on passe dans une vague, l’étrave enfourne dans et le bateau s’arrête. Ça fait beaucoup de bruit et c’est très inconfortable ».
CLASSEMENT
Positions du 05/12 à 16 heures : 1.Armel Le Cléac´h (Banque Populaire) à 17 289 milles de la ligne d’arrivée; 2.François Gabart (Macif) à 14 milles du leader; 3.Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec) à 37,6 m; 4.Bernard Stamm (Cheminées-Poujoulat) à 51,4 m: 5.Alex Thomson (Hugo Boss) à 158,9 m; 6.Mike Golding (Gamesa) à 597,4 m; 7.Jean Le Cam (SynerCiel) à 673,5 m; 8.Dominique Wavre (Mirabaud) à 683,4 m; 9.Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered) à 1 343,9 m; 10.Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) à 1 647,5 m; 11.Bertrand De Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) à 1 764,6 m; 12.Tanguy de Lamotte (Initiatives-coeur) à 1 812,7 m; 13.Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) à 2 477,6 m. Abandons : Marc Guillemot (Safran); Kito de Pavant (Groupe Bel); Samantha Davies (Savéol); Louis Burton (Bureau Vallée); Jérémie Beyou (Maître CoQ); Zbigniew Gutkowski (Energa); Vincent Riou (PRB).