Aux avant-postes sur son monocoque sans foils, Damien Seguin réalise une entrée dans l’océan Indien fracassante, meneur de jeu d’un groupe de cinq solitaires aux trousses des trois leaders. A l’entame de cet océan Indien à la mauvaise réputation, le skipper de Groupe APICIL se fait grandement secouer.
« Ce n’est pas du tout apaisé : la mer est défoncée, c’est vraiment mal pavé dans le coin ! Surtout qu’elle a changé légèrement de direction et je l’ai plus par le travers. Ce n’est pas très agréable pour le bateau comme pour le skipper… Ça saute les vagues et on a l’impression de passer des dos d’âne tout le temps. Et il y a encore pas mal de vent : il faut savoir temporiser car on est encore sur le dos de la dépression australe. Mais on va enfin quitter la zone du cap de Bonne-Espérance et les méandres du courant des Aiguilles, ça devrait s’améliorer prochainement.
La zone des glaces a été remontée au niveau de l’archipel de Crozet et on va pouvoir glisser après, mais cela va dépendre de la météo. A chaque jour suffit sa peine… Le champ s’ouvre un peu plus stratégiquement : on risque moins de se faire coincer sur la ZEA.
Le quotidien reste assez rude ! Je ne mets pas souvent le nez dehors, parce que déjà, l’état de la mer est impressionnant, et surtout ça mouille énormément… Je suis complètement trempé si je sors, et en plus, ça commence à pincer : il fait 7°C à l’extérieur et probablement pareil à l’intérieur. Ça rend la vie dans le bateau plus difficile : on est déjà un peu du style « ermite », un peu cloîtré devant la table à cartes, en essayant de faire les bons choix de voile sur du long terme (parce qu’on ne va pas manœuvrer tout le temps), et de savoir où est-ce qu’on veut aller ou ne pas aller !
On sent bien que ceux qui reviennent pour la deuxième, troisième, quatrième fois dans ces mers du Sud ont incontestablement un avantage, parce qu’ils savent comment gérer ces choix, comment faire la part des choses entre manœuvres et performances. L’expérience n’a pas de prix dans le Sud !
L’ambiance, c’est plutôt gris, même si j’ai eu le droit à quelques rayons de soleil au petit matin. Mais après, ce fut pluie, grêle, grains : je ne m’attends pas à voir le père Noël sur son traineau au coin d’une vague, mais tout de même, si ça continue comme ça, il va neiger ! C’est vraiment nouveau pour moi et il faut que je m’y habitue parce qu’il ne faut pas que je me demande en permanence ce que je fais là… On est tout de même un peu emprisonné dans notre bateau. »