Dans l'Arctique, la difficile quête d'un tourisme durable

Escales
Dimanche 2 octobre 2022 à 7h04

Comment profiter d'une nature immaculée sans lui nuire? Haut perché dans l'Arctique, un archipel norvégien cherche à jouer la carte du tourisme durable, une piste aussi séduisante que complexe à mettre en oeuvre.

A 1.300 kilomètres du pôle Nord, le Svalbard (ou Spitzberg), c'est l'aventure polaire à portée d'un simple vol de ligne: immensités sauvages à couper le souffle, ours blancs, soleil de minuit ou aurores boréales selon les saisons...

Mais, dans une région qui se réchauffe trois fois plus vite que la planète, c'est aussi, comme le canari dans la mine, une inquiétante vitrine du changement climatique.

Au fil des années, les filons de charbon, la raison d'être historique de la présence humaine sous ces latitudes, ont presque tous fermé et le tourisme est devenu, avec la recherche scientifique, l'un des principaux piliers et employeurs de l'économie locale.

"C'est toujours difficile à défendre parce qu'on sait que le tourisme soulève des défis dans tous les endroits que les gens visitent mais aussi d'un point de vue climatique", admet Ronny Brunvoll, directeur de Visit Svalbard, l'association des professionnels du tourisme.

"Mais on ne peut empêcher les gens de voyager, de se rendre visite, alors il faut trouver des solutions", ajoute-t-il.

Sur l'archipel où 65% des espaces sont protégés, les quelque 140.000 visiteurs annuels (chiffres pré-Covid) doivent, à l'instar des 3.000 habitants, se plier à des règles strictes: interdiction de déranger la faune --traquer un ours polaire est passible d'une grosse amende-- ou de cueillir des fleurs sur ces terres où la végétation est rare...

"On est vraiment face à la nature en fait, on n'a plus beaucoup d'espaces comme ça", témoigne Frédérique Barraja, une photographe française rencontrée à l'aéroport. "Ca attire comme tout lieu rare. Après, ils restent fragiles, donc il faut les visiter de manière respectueuse".

Ultra polluant, le fuel lourd, communément utilisé par les gros bateaux de croisière, est banni des eaux de l'archipel depuis le début de l'année, avant même l'entrée en vigueur de son interdiction progressive dans l'ensemble de l'Arctique à compter de 2024.

Sans doute un autre clou dans le cercueil pour ces mastodontes des mers décriés, qui débarquent parfois jusqu'à 5.000 passagers à Longyearbyen, le modeste chef-lieu de l'archipel dont les infrastructures, de la voirie jusqu'aux toilettes, ne sont pas dimensionnées pour de telles foules.

- L'électrique, c'est fantastique -

Dans un secteur touristique tourné vers une clientèle plutôt exclusive, certains acteurs devancent ou vont au-delà de la réglementation, tel Hurtigruten qui s'est fixé l'ambition d'être "le voyagiste le plus écologique au monde".

La durabilité "ne devrait pas être un avantage compétitif", affirme un haut responsable du groupe, Henrik Lund. "Cela devrait juste être un ticket d'entrée pour pouvoir opérer".

Ayant banni le plastique jetable dès 2018, le tour-opérateur offre aujourd'hui des promenades en motoneige électrique et, depuis peu, des excursions en mer à bord d'un petit bateau hybride diesel-électrique novateur, le Kvitbjørn ("ours blanc" en norvégien).

"Sur les sites d'exploration idylliques, on passe au tout-électrique, on devient silencieux et on n'émet aucune fumée de combustion", vante Johan Inden, président de la division maritime du motoriste Volvo Penta.

Un petit bémol cependant: au Svalbard, l'électricité provient encore d'une centrale au charbon, source d'énergie fossile qui contribue au réchauffement climatique.

"L'électrification a du sens quelle que soit la source d'énergie", rassure Christian Eriksen, un responsable de l'ONG environnementale norvégienne Bellona.

Qu'il provienne de sources "sales" ou "propres", l'électrique "permet de toute façon de réduire les émissions", souligne-t-il, en invoquant une étude sur les voitures électriques concluant en ce sens. Mais "cette réduction sera sensiblement plus importante quand la centrale à charbon sera remplacée".

Un jour qui ne saurait tarder: Longyearbyen veut fermer sa polluante centrale d'ici à l'automne 2023, mettre le paquet sur les énergies renouvelables et réduire ses émissions de 80% d'ici à 2030.

Mais "on peut faire ce qu'on peut localement, y compris sur les émissions de motoneiges ou de voitures, il faut reconnaître que le vrai gros problème, c'est le transport vers et depuis Svalbard tant pour le tourisme que pour nous, locaux, qui vivons ici", dit M. Brunvoll.

"A Longyearbyen, nous avons une empreinte climatique par habitant qui est démente".

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l'atout voyage et évasion de l'équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l'actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne. Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l'édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com. Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l'Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
François Tregouet
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Depuis toujours, François est passionné de voile en général et de multicoques en particulier. En croisière ou en course, de l’Europe à l’Australie, il ne les délaisse que lorsque le règlement l’exige : Mini-transat, Fastnet, Giraglia… Jamais rassasié de nouveautés, il a assisté à la plupart des salons sur les cinq continents. Depuis 2018 il se consacre entièrement à la rédaction et à l’information, notamment pour Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s'est toujours intéressé à l'équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l'auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d'occasion et qui décrivent non seulement l'évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son Targa 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
Eric Mas
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Eric Mas est l'un des fondateur de METEO CONSULT – La Chaîne Météo. Éminent spécialiste de météo, Eric est également un marin passionné qui a routé les plus grands skippers sur toutes les eaux du globe : VDH lors du premier Vendée Globe, Philippe Jeantot, Jean Maurel, Michel Desjoyeaux, Francis Joyon, et tant d'autres. Actuellement il participe au projet de Lalou Roucayrol sur son multi 50.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…