
Depuis leur départ hier en début d’après-midi de Boulogne-sur-Mer, donné dans de tous petits airs et sous une brume persistante, les onze concurrents de la Course des Caps-Boulogne-sur-Mer - Banque Populaire du Nord ont connu un début de course délicat. Ce n’est qu’au milieu de la nuit que la cadence s’est légèrement accélérée, grâce à l’établissement d’une petite brise de nord-est soufflant autour de dix nœuds. Alors qu’on pouvait s’attendre à voir la flotte se disperser au passage du DST des Casquets, les équipages ont finalement choisi de rester groupés, se marquant de près et régatant au contact, à la manière d’une course en Figaro Beneteau. La suite s’annonce toutefois complexe, avec la négociation d’un col barométrique prévue en fin d’après-midi, synonyme d’une nouvelle zone de vents très faibles qui pourrait piéger les bateaux. Des complications sont donc à prévoir, mais sur le plan météo, la bonne nouvelle est que, selon les derniers routages, la fin du parcours pourrait s’avérer plus rapide que prévu : les premiers bateaux pourraient en effet franchir la ligne d’arrivée dans la nuit de samedi à dimanche.
Le peloton accélère, mais reste soudé
Ce lundi matin, la situation s’est légèrement décantée grâce à un vent d’est-nord-est plus soutenu qu’annoncé, permettant à la flotte de filer à des vitesses à deux chiffres sur une mer encore étonnamment plate. Loïs Berrehar (MACIF Santé Prévoyance) confie ainsi : « Cette nuit, la progression se faisait un peu au gré des bascules de courant. Le positif, en tout cas, c’est que depuis le départ, on ne s’est pas vraiment arrêtés : on a toujours trouvé un peu d’air pour avancer, et c’est plutôt rassurant, car on craignait quand même de devoir mouiller l’ancre. La messe n’est pas encore dite, mais pour l’instant, on peut régater dans de bonnes conditions, et c’est assez chouette. On sait cependant que la pointe sud-ouest de l’Angleterre sera un passage délicat, avec une ou deux zones de transition qui pourraient piéger certains bateaux. Ce sera un moment clé à bien négocier. »
Des sourires à bord malgré la pression
De son côté, à bord de VULNERABLE, vainqueur du premier Sprint - le Trophée des Hauts-de-France - couru entre le départ et le DST Longitude Sud, Ambrogio Beccaria affiche un enthousiasme communicatif : « On enchaîne les jibes près des zones interdites au large de l’Angleterre. On est aux avant-postes, on a la banane, il y a du vent, on avance au portant : c’est magnifique ! C’est sympa de se retrouver tous groupés après 24 heures de course. J’ai l’impression que ça va rester serré encore un moment. L’important, c’est de continuer à bien naviguer. On a fait deux fautes hier, il faut essayer de ne pas en refaire, ou en tout cas d’en limiter le nombre au maximum. Là, ça glisse à 14-15 nœuds, le foil siffle à nouveau, il est content et nous aussi. Les conditions sont super agréables ». Un constat partagé sur l’eau où, pour l’heure, les écarts restent infimes : les huit premiers se tiennent en moins de cinq milles, et les trois leaders évoluent dans un mouchoir de poche, à peine séparés d’un mille, promettant une bataille serrée pour toute la suite.
Les bateaux archimédiens dans le match
Fabrice Amedeo (FDJ United - Wewise), à bord de son IMOCA à dérives droites, se réjouit aussi de ce scénario serré. « Assez rapidement, on s’est retrouvés dans une ambiance très différente des autres courses au large, où les foilers s’échappent avec un différentiel de vitesse presque deux fois supérieur à celui de bateaux comme le mien. Là, on reste au contact, on est dans le rythme. C’est très excitant », explique-t-il. Concernant la stratégie, il précise que passer au nord du DST des Casquets a été « un choix pragmatique, lié au timing des bascules de courant », une option finalement adoptée par l’ensemble de la flotte. Fabrice reste néanmoins vigilant : « La phase de transition sans vent qui arrive va nous freiner pas mal, et ça promet des rebondissements. En tout cas, pour l’instant, on s’amuse beaucoup ! »
Une météo toujours piégeuse
Dans l’immédiat, les équipages continuent de progresser efficacement vers la pointe sud-ouest de l’Angleterre. Mais on l’a compris, la situation devrait de nouveau se compliquer en fin de journée, avec la traversée d’une zone de calmes liée à un col barométrique formé entre deux systèmes anticycloniques. Ce passage pourrait générer de premiers écarts significatifs au sein de la flotte, avant le retour d’un vent de nord à nord-ouest qui devrait leur permettre de contourner Land’s End puis les Scilly durant la deuxième partie de la nuit prochaine. Pour la suite, les derniers modèles confirment un scénario plus optimiste : la tête de flotte pourrait franchir la ligne d’arrivée à Boulogne-sur-Mer dans la nuit de samedi à dimanche. En revanche, de gros écarts risquent de se creuser, la redescente le long de la côte est britannique s’annonçant nettement plus rapide pour les premiers, qui pourraient effectuer ce tronçon d’un seul bord. À ce stade, rien n’est évidemment encore joué, mais la tendance est encourageante pour un dénouement plus rapide que ce qui était envisagé il y a encore quelques jours.