Les mers du Sud avec Thomas Coville

Course au large
Par Figaro Nautisme

Thomas Coville, navigateur aux multiples tours du monde, nous embarque dans les mers du Sud, à quelques jours de repartir à la chasse au record sur son maxi trimaran Sodebo.

Thomas Coville, navigateur aux multiples tours du monde, nous embarque dans les mers du Sud, à quelques jours de repartir à la chasse au record sur son maxi trimaran Sodebo.

Les marins du Vendée Globe affrontent les mers du sud, la majorité dans l’Océan Indien et les deux de tête – Armel Le Cleac’h et François Gabart – dans l’océan Pacifique. Ils ont franchi la longitude du 146°55’E, ce mardi matin, avec moins de vingt minutes d’écart, suivis par le troisième larron, Jean-Pierre Dick. « C’est parfait, il ne reste plus que cet océan, le cap Horn et hop ! Direction la maison », se réjouit le bizuth François Gabart. Mais les mers du sud ne sont pas si faciles à dompter, comme nous l’explique Thomas Coville.


Une entrée forte en symbole
 

Le multiple circumnavigateur ne se plie pas aux superstitions du Cap Horn mais il ne déroge pas à celle de l’entrée dans les mers du Sud : l’offrande à Neptune. « La première fois, je n’avais rien préparé et je me suis senti vraiment bizuth, se souvient Thomas Coville. Alors j’ai brisé la petite chaînette d’enfant que j’avais autour du cou. Je m’étais laissé embarqué parce que toute l’équipe autour de moi avait prévu une offrande à Neptune, souvent une petite fiole d’alcool. Juste après, je me suis dit que c’était quand même très précieux ce que j’avais choisi comme offrande, mais finalement je suis content de cette étape symbolique. J’ai tout donné, de façon très spontanée, dans un moment fort en émotion. »


La fiole d’alcool, c’est le choix fait par Jean Le Cam sur ce Vendée Globe.

 

Une rude entrée en matière
 

« L’océan Indien c’est celui que je redoute plus que tout, reprend Thomas Coville. C’est un premier contact viril avec l’océan, à un moment où nous ne sommes pas encore suffisamment amarinés pour supporter la rudesse de cette mer. L’Indien prend aux tripes, tout de suite. Puis au fil de la navigation, on s’habitue, on devient plus animal et moins frileux. » Frileux dans tous les sens du terme, précise Thomas Coville qui ajoute que cette première appréhension est salutaire. « Avec l’océan Indien on s’aguerrit, on est plus présent, plus dans l’instinct. » Pour illustrer cette idée, Thomas Coville choisit l’image du montagnard qui sent de plus en plus le mouvement de ces pas dans la neige, sur la glace. « Le montagnard s’aguerrit au fil de l’ascension pour prendre les bonnes prises, et bien en mer c’est pareil. »

 

Une seconde partie usante
 

« L’océan Pacifique c’est l’océan pacifique, celui qui use, présente Thomas Coville. Sa difficulté c’est sa durée. » Dans sa présentation du parcours du Vendée Globe, Alain Gauthier précisait : « L’heure de la délivrance approche mais il faut absolument rester sur ses gardes. Les icebergs accompagnent les skippers jusqu'à des latitudes relativement nord, les plus sournois étant les growlers, ces blocs de glace à la dérive que les radars ne détectent pas. » Au niveau de la mer, les vagues sont plus rangées. « Avec sa grande houle, cet océan est grandiose », raconte Thomas Coville. Il est aussi particulièrement isolé : au milieu de l’océan Pacifique, les concurrents seront à 2200 milles de la première terre, soit près de huit jours de mer. Ils devront également affronter le froid de cet océan qui borde l’Antarctique : « Il ne faut surtout pas craquer face à un certain engourdissement dans un environnement très froid, explique Thomas Coville. Le skipper est fragile, comme le montagnard au sommet. »

 

Sur Banque Populaire, le voilier d'Armel Le Cleac'h, même l'huile d'olive gèle

 

Des vents et des vagues que rien n'arrête

 

Les 40e rugissants et les 50e hurlants des mers du sud correspondent à un très long couloir de vent d'ouest dominant, "et sur ce grand fleuve rapide, sont entraînés des petits tourbillons", précise Eric Mas, directeur de l’information météo chez Météo Consult – La Chaîne Météo. "Avec les portes de glace, les concurrents du Vendée Globe sont le plus souvent du bon côté des dépressions." Ces dépressions prennent de la vitesse car aucun obstacle ne les arrête, "il n'y a pas de relief pour briser le rapis roulant." Et les variations thermiques très importantes les nourissent. Les concurrents naviguent sur une houle énorme qu'un vent très fort décapite au sommet, créant des déferlantes. "La houle se déplace à la même vitesse et dans la même direction que le vent qui la génère donc elle est tout le temps entretenue et prend cette dimension impressionnante", précise Eric Mas. Fréquemment, l'horizon se brouille avec du crachin et du brouillard, en raison de la rencontre entre les eaux froides et un air doux et chargé d'humidité.

 

Même si la vidéo écrase les vagues, la caméra embarquée avec Arnaud Boissières (Akena) envoie des images impressionnantes dans le grand sud.

 

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L'océan Indien avec Roland Jourdain

Le parcours du Vendée Globe décrypté par Alain Gauthier
 

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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