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François Gabart, 29 ans et benjamin de l’épreuve, a franchi le cap Horn en leader. Chapeau l’artiste !
Début d’année en fanfare pour François Gabart (Macif) qui a franchi le cap Horn à 19H20 après 52 jours de course. C'est quatre jours de moins que le temps de passage de son mentor, Michel Desjoyeaux, il y a quatre ans. Le benjamin de la flotte devient donc cap-hornier. Son poursuivant, Armel Le Cleac'h, a franchi le cap Horn à 20h35, 1h15 derrière le skipper de Macif. Les deux navigateurs affrontent le cap Horn avec un flux d'ouest d'une vingtaine de noeuds, et une visibilité faible. Les icebergs compliquent encore leur route: ils doivent gérer 24 heures de veille pour échapper aux growlers, ces glaces trop petites pour être détectées au radar et donc visibles uniquement à l'oeil nu. Les growlers sont issus d'une quinzaine d'icebergs surveillés par les organisateurs du Vendée Globe, aidés par la marine chilienne.
Une délivrance attendue: témoignages de circumnavigateurs
Thomas Coville, multiple circumnavigateur, a surnommé ce passage mythique le « cap de Bonne-Délivrance », en référence au Cap Bonne-Espérance d’Afrique du Sud. « La première fois que j’ai passé le cap Horn, c’était avec Olivier de Kersauson, précise-t-il. Nous avions affronté des conditions de mer très difficiles, le bateau et l’équipage avaient beaucoup souffert. Comme pour chaque première fois, j’étais très, très attentif et je me souviens d’un soleil couchant incroyable, très rouge, qui illuminait tout l’horizon. Et je me souviens aussi du coup de gueule d’Olivier de Kersauson. Il avait raison, il fallait remobiliser les troupes. » Le cap Horn est un goulet d’étranglement où les vagues se croisent après le tunnel des mers du sud à la houle vertigineuse. Marc Pajot, de son côté, a doublé le cap Horn en compagnie d’Eric Tabarly sur Pen Duick VI, à l’occasion de la Whitbread. C’était en 1973, Marc Pajot avait juste 20 ans. « Lors du passage du Cap, je n’avais pas d’appréhension particulière : c’est le privilège de la jeunesse », assure aujourd’hui le navigateur qui renchérit : « Le cap Horn se mérite car il faut affronter deux océans sérieux avant, détaille Marc Pajot. C’est un moment très fort de notre mythologie maritime et c’est aussi un cap libérateur car il sonne la fin du périple et la remontée vers le port. » A bord de Pen Duick VI, il faisait très froid mais la mer n’était pas spectaculaire. Pas de superstition particulière pour le tout jeune cap-hornier de l’époque et une « célébration sans fanfare, comme à bord d’un bateau d’Eric Tabarly. »
L'état de la flotte
Après François Gabart et Armel Le Cleac'h, c'est Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec 3) qui est attendu au cap. Selon les routages, il devrait y passer avec 1 jour et 7 heures de retard sur le leader de la flotte.
Vient ensuite Alex Thomson (Hugo Boss) qui allonge la foulée, flashé ce mardi après-midi à 19,5 noeuds. 1 150 milles dans le sillage du Britannique, Jean Le Cam (SynerCiel) débute bien l’année en progressant à 17 noeuds en route directe vers la porte des glaces Pacifique-est.
A l’arrière, le groupe des cinq Mike Golding (Gamesa), Dominique Wavre (Mirabaud), Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered), Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) et Bernard Stamm (Cheminées-Poujoulat) se tient en moins de 250 milles. Belles bagarres en perspective. Parmi eux, Javier Sanso a passé un réveillon de la Saint-Sylvestre en se faisant une belle frayeur. « Je me suis retrouvé dans une situation terrible. Au moment de dérouler le bout de l’enrouleur du grand gennaker, il s’est pris dans la voile. Il y avait 17-18 nœuds de vent, il faisait nuit. J’ai dû mettre mon harnais et aller à l’extrémité du bout-dehors. Je pensais à Yann Elies quand il s’est cassé le fémur sur le précédent Vendée Globe. Je me suis plusieurs fois écroulé à cause de la force de l’eau. Cette expérience est pire que celle de la montée dans le mât. Mais tout va bien à présent ». Dans la série des pépins, Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) est toujours aux prises avec de sérieux soucis de pilotes automatiques. « J’ai des problèmes de pilote automatique qui m’obligent à avancer sous toilé et donc à réduire ma vitesse. Le bateau nécessite beaucoup d’attention et de présence à l’extérieur et notamment à la barre ». L’heure n’est déjà plus à la fête...
LES VOIX DU LARGE
Bernard Stamm (Cheminées-Poujoulat) : « On ne sait pas trop quand est-ce qu'on passe de 2012 à 2013 avec tous ces changements d'heures et de date. Mais l'important c'est qu'on le fasse. Exit 2012, bonjour 2013. Ce n’est pas que 2012 ait été une mauvaise année, non, c'était plutôt riche en événements. Je la qualifierais plutôt de compliquée. 2013 sera plus simple, je le sens. En tous cas, le passage à la nouvelle année s'est plutôt bien déroulé, mieux que Noël. Vent pas trop fort, assez stable, une bonne grosse manœuvre pour digérer la mignonette de champagne qui n'a pas manqué de me couper les jambes, comme prévu. Une coupette de champagne agrémentée d'une petite boîte de foie gras de canard : un vrai bonheur. J'en profite donc pour vous souhaiter à tous une excellente santé et du bonheur pour cette année. J'estime avoir une grande chance d'avoir une famille, des amis et des partenaires comme ceux que j'ai, qui me suivent dans des aventures aussi folles que celle que nous vivons en ce moment. C’est sympa aussi que d'autres organisent ce genre d'événement et qu'on trouve assez de dérangés pour y participer, justifiant par leur présence et leur talent, l'intérêt de l'exercice. Donc, un grand merci à tous et que 2013 soit un millésime inoubliable ».
Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) : « Bonne Année 2013 à vous tous à terre ! Moi ça va, j'ai des problèmes d'autopilotes qui m'obligent à avancer sous-toilé et donc réduire ma vitesse pour continuer à naviguer en sécurité. Le gennaker de tête est déchiré. Dans la mesure du possible, je vais continuer à envoyer photos et vidéos mais s’il y a du retard ou je saute des envois, c'est dû au fait que le bateau nécessite beaucoup plus d'attention qu’avant et de présence à l'extérieur et à la barre. Bonne journée et encore Bonne Année ».
Tanguy de Lamotte (Initiatives-coeur) : « Je m'apprête à fêter mon deuxième réveillon, à passer pour la deuxième fois en 2013 ! Sur mon bateau à remonter le temps, j'ai fait un peu le retour vers le futur et je vis un jour sans fin qui ressemble un peu à un marathon du réveillon...Une chose est sûre, c'est que j'ai été très ému de fêter le réveillon seul en mer dans l'océan pacifique sur mon beau bateau. C'était une super belle journée pour commencer l'année 2013 : ciel bleu, soleil, vent, vagues, albatros...parfait ! ».
CLASSEMENT
Positions du 01/01 à 16 heures : 1. François Gabart (Macif) à 7 061,5 milles de la ligne d’arrivée; 2.Armel Le Cléac´h (Banque Populaire) à 35,7 milles du leader; 3.Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec) à 485,1 m; 4.Alex Thomson (Hugo Boss) à 956,5 m; 5.Jean Le Cam (SynerCiel) à 2 105,8 m; 6.Mike Golding (Gamesa) à 2 559,2 m; 7.Dominique Wavre (Mirabaud) à 2 632,4 m; 8. Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered) à 2 681,6 m; 9.Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) à 2 797,5 m; 10.Bernard Stamm (Cheminées-Poujoulat) à 2 803,4 m; 11.Bertrand De Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) à 3 888,4 m; 12.Tanguy de Lamotte (Initiatives-Coeur) à 4 176,1 m; 13.Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) à 5 201,5 m. Abandons : Marc Guillemot (Safran); Kito de Pavant (Groupe Bel); Samantha Davies (Savéol); Louis Burton (Bureau Vallée); Jérémie Beyou (Maître CoQ); Zbigniew Gutkowski (Energa); Vincent Riou (PRB).
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