Romain Attanasio change de dimension à bord du Malizia II : « Il faut en tirer sa quintessence »

Course au large
Par Mahault Malmont-Marchal

Après deux participations au Vendée Globe bouclées respectivement en 110 et 90 jours à bord d’anciens bateaux à dérives droites, Romain Attanasio réalise son rêve en achetant le Malizia II, l’ancien foiler de Boris Hermann. Le skipper savoure ses envolés sur l’eau comme ses camarades avant lui et vise les plus belles places sur les prochaines courses.

©Andre Carmo
Après deux participations au Vendée Globe bouclées respectivement en 110 et 90 jours à bord d’anciens bateaux à dérives droites, Romain Attanasio réalise son rêve en achetant le Malizia II, l’ancien foiler de Boris Hermann. Le skipper savoure ses envolés sur l’eau comme ses camarades avant lui et vise les plus belles places sur les prochaines courses.

Quelques mots sur le rachat du Malizia II ?

"Mes contrats de sponsoring prenaient fin à l’arrivée du Vendée Globe. Quinze jours avant d’arriver aux Sables d’Olonne je commençais déjà à appeler des partenaires et à travailler pour la suite alors même que j’étais toujours en mer. J’ai appelé Boris Hermann pour savoir si son bateau était toujours à vendre… Négatif, il était promis à Damien Seguin. Entre-temps j’ai contacté l’un de mes partenaires et je lui ai proposé d’acheter ce bateau avec moi, parce qu’il était trop cher pour moi seul. Il a accepté, j’ai donc rappelé Boris et je lui ai dis, si ça ne fonctionne pas avec Damien (Seguin), rappelle-moi. C’est finalement ce qu’il s’est produit et c’est comme ça que nous avons réussi à avoir ce fabuleux bateau, qui était pour moi le meilleur rapport qualité/prix entre un bateau à foils et un bateau neuf."

Pourquoi être passé d'un bateau ancienne génération à un voilier high-tech à foils construit pour gagner ?

"Parce que c’est le rêve absolu! J’ai toujours financé mes projets moi-même donc je le faisais à mon niveau et avec mes moyens. Quand j’ai démarré en 2015, je ne pouvais avoir que le plus vieux bateau de la flotte, mais ça m’a permis de rentrer dans ce monde du Vendée Globe. Ensuite, avec le Gitana Eighty, qui était mon deuxième bateau, nous étions plus performant, rien à voir avec le Pingouin, mon premier bateau! Pendant cette période avec le Gitana Eighty, c’était l’avènement des grands foils. Tout cela me faisait rêver, mais c'était innaccessible. Je rêvais d’en avoir un, mais je ne pouvais pas me le permettre. Et c'est à l’arrivée du Vendée Globe, lorsque tout s’est aligné, que tous les voyants sont passés au vert avec ce copropriétaire et tous ces sponsors qui souhaitaient poursuivre l’aventure que je me suis retrouvé au mois d’avril, encore dans l’ambiance du Vendée, avec ce bateau."

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Après tes nombreux entraînements, la Fastnet et le défi Azimut, quelles ont été tes premières sensations à bord ?

"Je redécouvre la navigation ! C’est un autre monde… Je retrouve beaucoup plus les sensations de trimarans ORMA quand je naviguais avec Michel Desjoyaux ou Franck Cammas en 2007, que les sensations que j’ai pu avoir sur le Pingouin ou le Gitana Eighty. Le lendemain de la mise à l’eau en mai, nous avions organisé une deuxième sortie avec 16 nœuds de vent et là : le bateau s'est envolé ! C’est la première image que nous avons faite ! (rires). Nous avons halluciné, c’était incroyable ! Je n’en attendais pas tant. Nous avons pu le découvrir sur mer plate et les semaines qui ont suivi avec plus de brise ; c’est là que nous avons commencé à naviguer en mer. J’ai vu que, oui, c’est « fun » mais c’est dur ! Quelques fois le bateau va même plus vite que nous, alors nous sommes surpris, presque dépassés par la bête. Je n’avais jamais encore vécu ça sur un monocoque. C’est impressionnant, il vole haut, il va vite et il saute les vagues ! On ne peut plus se tenir à bord ! Il faut que je l’apprivoise, que j’apprenne à doser. Toutes ces courses nous y aident, tous ces entraînements à Port-La-Forêt... et je pense qu’avec Sébastien Marsset nous étions un petit peu trop sur la retenue. Mais finalement nous tirons énormément sur le bateau, je n’ai jamais autant attaqué avec Gitana ! Dans des conditions normales le bateau tape plus dans les vagues que dans des conditions extrêmes avec Gitana ! Au départ nous pensions trop tirer et puis nous avons réalisé que les autres tiraient plus encore ! Il faut s’y faire, l’objectif maintenant c’est de réussir à doser, de placer le curseur au bon endroit."

En quoi ce bateau bouscule-t-il tes ambitions sportives ?

"Nous nous retrouvons naturellement aux avant-postes puisque le bateau va vite. Ça nous motive pour rester devant quand on y est, on attaque plus. Et il faut être digne d’un tel bateau ! Je n’ai pas envie que l’on puisse se dire « il ferait mieux de le laisser à quelqu’un d’autre parce que lui n’en fait rien ». Le bateau est capable de faire des performances tout à fait exceptionnelles mais il faut arriver à le faire ! Il faut arriver à en tirer sa quintessence, c’est ce qui est excitant. C’est une nouvelle approche de la navigation. Je suis heureux de vivre cette aventure avec Sébastien Marsset, je voulais quelqu’un qui m’accompagne tous les jours dans la prise en main du bateau et c’est ce que nous faisons. Sébastien gère aussi un peu la performance, alors finalement, nous sommes deux à découvrir le bateau."

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Avec une "bête" qui performe autant, comment appréhendes-tu le Vendée ?

"Sur le papier, beaucoup de bateaux vont finalement être encore plus performants que le nôtre. Avec du recul c’est un peu désagréable parce que j’ai enfin un superbe bateau à foils et ils sont treize ou quatorze bateaux neufs et je ne sais combien de bateau 2020. Mais ici on atteint peut-être certaines limites... Le skipper, même avec le meilleur talent et la meilleure volonté, ne peut pas aller plus vite que ce qu’il peut résister. Donc ça va niveler un peu les performances. Et puis finalement, qu’est-ce qui est le mieux ? Avoir un bateau rapide sur le papier mais que l’on connaît mal, ou un bateau moins rapide que l’on connaît parfaitement ? La question se pose avec cette nouvelle génération de bateau."

Fortinet rejoint tes partenaires historiques, selon toi, qu’est-ce qui les a séduit dans ton projet ?

"Certainement le fait d’avoir démarré à la voile, seul et d’avoir monté mes propres projets ; ils sont passionnés par ces histoires ! Le défi technologique leur plaît aussi. Eux voulaient de la haute technologie en terme de navigation, ils ne seraient pas venus si je n’avais pas eu un foiler. C’était finalement nécessaire d’acheter ce bateau pour ensuite attirer les sponsors que j’ai aujourd’hui ! Il fallait prendre ce risque-là pour optenir ce résultat. Encore une fois c’est un équilibre à trouver, toujours. La voile c’est toute une histoire de compromis !"

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Quel est le programme des deux prochaines années ?

"Beaucoup d’entraînements : il faut arriver à maîtriser la bête. Certainement quelques modifications pour rester au top de la technologie ! Cette dernière évolue vite, tout le monde travaille beaucoup, les foils vont encore se parfaire à une vitesse folle. Je vois les concurrents, les nouveaux foils qui ont été fait cet hiver, ils volent plus tôt que nous, plus vite… Donc nous allons encore faire évoluer le bateau jusqu’au Vendée Globe, c’est certain. Cet hiver par exemple nous allons faire une peinture pour retirer l’après : le bateau a été peint plusieurs fois, ça va nous permettre de l’alléger. Et l’année prochaine nous verrons... Mais il va falloir se tenir prêt à le faire évoluer ! Je ne sais pas encore si nous mettrons de nouveaux foils, ce qui est certain, c’est que nous allons changer ce mât qui a déjà fait deux tours du monde. Il faut fiabiliser le bateau.

Concernant les courses, je vais faire tout le programme ! Ce qui est génial avec ces partenaires anciens et nouveaux c’est que nous avons signé le projet jusqu’en 2025, en intégrant la Transat Jacques Vabre 2025. J’ai trop longtemps regretté de ne pas avoir procédé ainsi sur la campagne précédente, ça m’avait un peu stressé sur la fin du Vendée... Mais ça m’a aussi permis de relancer le projet tant que c’était encore chaud. Aujourd’hui tout cela nous permet de préparer sereinement les trois ou quatre prochaines années et de faire toutes les courses du calendrier IMOCA : les grandes courses et les plus petites. On arrivera au Vendée Globe bien préparés !"

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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