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Soixante-quatorze équipages représentant une douzaine de nations se sont donc donnés rendez-vous le 21 février pour prendre le départ au sud d’Anguilla, la ligne étant mouillée aux pieds des fameuses Colonnes d’Hercule à la sortie d’English Harbour. Si la première arrivée en temps réel était promise à l’un des dix multicoques de la classe Mocra, la victoire finale était réservée à un monocoque, règlement et tradition britannique obligent. Mais lequel des 65 concurrents répartis entre Class40 et 6 classes IRC allait l’emporter ? Bien malin qui l’eut deviné au matin du départ, tant le parcours sinueux et la météo variable, ouvrent grand le jeu pour les tacticiens et les stratèges qui ne manquent à bord des magnifiques unités présentes. Il y a là le ClubSwan 125 Skorpios, le magnifique plan VPLP/verdier Comanche skippé par Mitch Booth, le 100’ Farr Leopard, une dizaine de 70 pieds issus de la Volvo, et même le 60’ Open de Richard Tolkien. Mais est-ce qu’en compensé ce ne sera pas un Pogo 12.50, un J121, un Sydney 47 ou un JPK qui l’emportera ? Impossible à prévoir.
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Lancés dans 15 nœuds de vent avec des rafales à vingt, les 700 marins ont tout de suite offert un spectacle magnifique. Le 100’ Comanche rasait les falaises, le 125’ Skorpios croisait de près les Volvo 70, et le trimaran MOD70 de PowerPlay de Peter Cunningham s’envolait sur un flotteur, pour le plus grand bonheur des vidéastes et photographes présents. Ce sont ensuite des alizés modérés qui attendaient les concurrents sur l’ensemble d’un parcours, dont la difficulté résidait plus dans la houle océanique pour les bateaux et la chaleur tropicale pour les équipages. Au sud de la Guadeloupe, comme attendu, trois trimarans pointant régulièrement autour de 30 nœuds, avec des pointes à 35, s’affichent en tête : le Maserati de Giovanni Soldini, Argo de Jason Carroll, et Powerplay de Peter Cunningham mais qui semble quelque peu décroché. À mi-parcours, le record de l’épreuve (30 heures et 49 minutes) en multicoque semble pourtant à portée des étraves. Idem en monocoque, Skorpios qui mène alors d’une heure devant Comanche en temps réel pourrait bien faire tomber les 37 heures et 41 minutes de référence. Si en Class40 le podium provisoire est français avec dans l’ordre Guidi de Charles-Louis Mourruau, Minnimo d'Hervé Thomas et Vitican d'Olivier Delrieu est troisième, en IRC1 les Anglais sont aux avant-postes sur des bateaux…français, Lombard 46 et JPK 1180. Enfin en IRC2, le trio de tête est également anglo-saxon à mi-parcours, mais cette fois sur un Oyster 48, un JPK1010 et un Sigma 38.
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Finalement c’est bien le MOD70 Argo qui coupera la ligne le premier en battant le record de l’épreuve, dépassant Maserati 20 minutes seulement avant l’arrivée, le précédant de seulement deux minutes après 29 heures et 38 minutes d’un duel ininterrompu qui les a vu échanger leurs places respectives cinq ou six fois. À 35 nœuds, sous le vent St Kitts et Nevis, c’était du véritable match racing d’une intensité folle. Une heure plus tard seulement, le ClubSwan 125 Skorpios remportait la classe IRC0 en étant le premier monocoque à rejoindre Antigua. Première participation et première victoire donc pour le bateau noir et jaune Dmitry Rybolovlev, skippé par Fernando Echavarri, alors que le Comanche de Mitch Booth se classe deuxième à près d’une heure. Pour les autres classes et surtout la victoire au général en temps compensé il a fallu encore patienter. Il a fallu quatre jours et quatre nuits de course pour décider du vainqueur en IRC1. Après avoir remporté le Fastnet l’été dernier, le JPK 1180 Sunrise du britannique Tom Kneen devance une nouvelle fois son compatriote Ed Bell sur son sister-ship Dawn Treader. En ORC2, l’Oyster 48 Scarlet Oyster s’adjuge une septième victoire dans la Caribbean 600.
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Le comble du suspens et à porter au crédit de la Class 40, qui avec neuf bateaux offrait un plateau de choix. Le dénouement a été à la hauteur de l’excellent niveau des équipages, 61 secondes séparant les vainqueurs français à bord de Finimmo, dont un certain Kito de Pavant, du second, Guidi qui avait pourtant mené presque toute la course. Mais le trophée le plus prestigieux reste celui de la victoire au général en temps compensé pour les monocoques. Et le grand vainqueur de la RORC Caribbean 600 2022 est le Pac52 Warrior Won de Christopher Sheehan (USA) qui courrait en IRC0, une catégorie vraiment très disputée. Félicitations donc à Warrior Won et rendez-vous d’ores et déjà l’année prochaine, sur l’eau cette fois ?
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