Alan Roura : « je ne suis plus le petit merdeux de l'époque ! »
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Comment se passe votre préparation au Vendée Globe ?
« Nous avons dû fermer la société pendant toute la période du confinement. Il nous restait seulement une semaine de travail à effectuer sur mon voilier avant sa première sortie. Comme beaucoup, nous avons repris nos activités le 11 mai avant sa mise à l'eau, le 28 mai dernier, à la Base des sous-marins de Lorient. Avec la crise sanitaire, nous avons manqué deux transatlantiques mais nous essayons de naviguer depuis au maximum pour rattraper le retard. Le week-end, j'effectue des sorties offshore de 24 ou 48 heures en solo ou en équipage avant cette première course officielle en juillet. Le programme est intense mais mon équipe a bien travaillé. A la fin de l'été, on prévoit également d'effectuer des contrôles du mât de l'Imoca en Espagne... »
Et votre voilier La Fabrique ?
« C'est un bateau ancien qui date de 2007 mais reste performant et qui affiche un joli look. Un plan Finot qui a terminé second du Vendée Globe en 2008 et deuxième également de la Route du Rhum avec Armel Le Cleac'h. Ensuite, il a appartenu à Bertrand De Broc avant son rachat par notre équipe en 2017. Grâce à mon partenaire, nous avons pu effectuer des modifications comme un nouveau plan de voilure et l'ajout de foils. Idéalement, nous aimerions changer la quille et apporter d'autres évolutions techniques mais le coût global estimé est trop important, de l'ordre de 500-600 000 euros. C'est trop cher ! »
Aux dires de certains, vous êtes à la fois l'autodidacte, le marin d'eau douce et le plus jeune skipper du Vendée Globe, c'est-à-dire sans expérience. Vous bousculez les codes de la course au large ?
« Pour mon premier Vendée Globe en 2016, j'étais à 23 ans, le plus jeune skipper à terminer la course. On me regardait déjà de travers car je ne venais pas du circuit Figaro, j'avais surtout une expérience en Mini 650 et en Class 40. On a monté le projet du Vendée Globe en 11 mois avec une petite équipe de bénévoles ! Mon âge ? C'est surtout un problème de respect. On peut être un jeune marin sans avoir d'expérience en mer mais il faut savoir que certains en ont beaucoup. Personnellement, j'ai vécu sur un bateau dès l'âge de 2 ans et j'ai débuté la navigation en solitaire aux Antilles à partir de 14 ans. Lorsque j'ai terminé 7e de la Route du Rhum en 2018, on m'a regardé autrement. Dans le milieu, je ne suis plus le petit merdeux de l'époque ! (rires). Concernant mes origines hélvètes, j'ai passé seulement 8 ans de ma vie en Suisse, je ne suis pas vraiment un lacustre... »
Vos objectifs sur le Vendée Globe ?
« C'est difficile de définir un classement car il va avoir beaucoup de casse sur cette édition, c'est certains. Mon objectif sportif est de boucler ce tour du monde en 80 jours ! »
En parlant d'aventure, avez-vous des modèles ou des sources d'inspiration ?
« J'ai beaucoup d'admiration pour Ellen MacArthur. C'est la seule personnalité du milieu de la course au large que je n'ai jamais rencontré. Quand on aime la mer, on peut faire de belles choses. J'ai un profond respect également pour Bilou (Roland Jourdain), mon compatriote Bernard Stamm et aussi Francis Joyon. Un marin plein de talent et exceptionnel qui casse les codes de la course au large ! »