En exclu : le carnet de bord de Sam Davies qui passe le Cap Horn et sauve 60 enfants !

Lundi
J’affronte des conditions typiques de l'océan Austral aujourd'hui. La température extérieure est de 5 degrés. Le vent vient de l'Antarctique et apporte avec lui de la grêle qui a rendu ma journée divertissante !
La vitesse du vent varie de 15 nœuds juste derrière le grain, à 35 nœuds sous le grain, et ces « nœuds » sont froids et denses. On affirmer sans se tromper que chaque grain « a du punch » aujourd'hui !
Le dernier est tombé, noir et effrayant ... J'ai roulé le J2 juste à temps. Et après de fortes rafales de vent sont venues avec une énorme tempête de grêle, recouvrant mon bateau de petites boules de glace !! Brrrrrr
Je n'ai pas de radiateur à bord d'Initiatives-Cœur, mais pour l'instant je n'ai pas froid. Le cockpit fermé aide à garder le facteur vent froid, et j'ai de très bons équipements et vêtements pour me garder au chaud.
Maintenant, juste pour passer d'un extrême à l'autre, j'ai parlé à Romain aujourd'hui, qui se trouve au large du Brésil avec 30 degrés à bord de son bateau !!!
Mercredi
Je me rapproche enfin du Cap Horn - moins de 700 milles à parcourir ! Les conditions seront délicates pour m'y rendre, et son passage sera encore plus salutaire et gratifiant.
Le Pacifique Sud a été particulièrement difficile cette année - je pense qu'il en a été de même pour à peu près tous les skippers - avec des vents violents, des mers énormes et des températures glaciales. Ces derniers jours, j'ai été « divertie » environ toutes les 2 heures par une rafale de grêle glaciale, qui soufflaient à plus de 30 nœuds sous eux. Il a été difficile de choisir les bonnes voiles et de me reposer convenablement. Cependant, les vues de ce ciel en colère ont été incroyables.
Les températures devraient commencer à monter avec le vent tournant vers le nord, mais probablement pas encore beaucoup car je suis à 57 degrés sud ! Ce matin, il faisait 4 degrés à l'intérieur de mon cockpit - donc probablement un peu moins sur le pont !
À l'intérieur du bateau, je n'ai pas de thermomètre (ce serait probablement déprimant !) Mais l'huile d'olive est maintenant totalement congelée – on peut l'étaler comme du beurre. Il est étrange de constater que mes 2 autres huiles (de lin et de chanvre) sont encore liquides !
Je navigue en solitaire, mais je vois qu'il y a 2 navires qui vont dans la même direction, et Alexia et Ari ne sont pas loin non plus. Nous sommes souvent en contact via WhatsApp pour partager nos sentiments et comparer les conditions. C’est bien d’avoir ces « amis » ici pour partager nos expériences. Cela me fait me sentir moins seule - et peut-être un peu moins folle de savoir qu'il y en a d'autres ici qui font aussi cette course de dingue !!
Jeudi
Empanner seule dans l'océan Austral n'est pas simple. L'objectif principal est de passer sur l'autre bord sans rien casser !!
Dans plus de 30 nœuds de vent, je préfère l'option « Granny Tack » - d'abord enrouler la voile avant, puis attendre le moment adéquat sur les (énormes !) vagues pour faire tourner le bateau... Parfois cela implique un peu de marche arrière avant de pouvoir effectuer le nouvel empannage, déployer la voile avant, ranger et pousser un soupir de soulagement (ou dire une petite prière selon votre religion !)
J'ai juste « empanné » mais je n’ai pas choisi le bon timing car une rafale de 40 nœuds s’est mise à souffler.
Du côté positif, le vent ne vient plus de l'Antarctique, et au lieu de la grêle, c'est maintenant de la pluie dans les grains. Et cela fait de merveilleux arcs-en-ciel ! En attendant que la rafale passe, j'en ai profité pour prendre quelques photos du paysage à couper le souffle !
Vendredi
30 à 40 nœuds, au portant, c’est comme ça depuis 4 jours, le vent est de plus en plus fort et va encore se renforcer à l’approche du Cap Horn. Je voulais profiter de cette semaine qui met à l’honneur le sport féminin pour rappeler que sur les 6 femmes à avoir pris le départ du Vendée Globe, 4 sont encore en cours. Je suis très fière des performances des 6 femmes sur ce Vendée Globe. C’est prometteur pour la suite. J’espère qu’on aura inspiré des jeunes filles et de futures navigatrices pour faire carrière dans la course au large en espérant qu’une femme finira par gagner le Vendée Globe.
Samedi
Au fil de la journée, l'état de la mer s'est progressivement détérioré et le vent soufflait de plus en plus fort. Au début, Initiatives-Cœur s’en sortait plutôt bien et nous filions à bonne allure sur les vagues. Et puis, le vent est devenu trop fort et nous avons commencé à sauter les vagues et à plonger dans celles d’après. Le vent soufflait à 40 nœuds avec des rafales bien au-delà. C'était un moment délicat car un vent à cette puissance est viable, mais au-delà on s’approche dangereusement de la limite
La Grande Voile est finalement descendue sans soucis, et je l'ai attachée à la bôme. Nous sommes définitivement en mode tempête ici !! Encore quelques heures de vents forts et de grosse mer et 140 milles à parcourir jusqu'au Cap Horn. Je n’oublierai pas ce passage de sitôt !!
Il coïncide avec le cap des 60 enfants sauvés que nous venons d’atteindre et qui était notre objectif avant le départ du Vendée Globe. Cela me fait chaud au cœur d’imaginer les premiers enfants qui sont actuellement en train d’être soignés en France. Je pense aussi aux bénévoles, aux médecins, aux soignants, aux familles d’accueil, à toute cette belle chaîne de solidarité. L’aventure est encore longue et nous espérons en sauver autant que possible. Je suis là pour eux. Et merci à tous pour votre soutien c’est aussi grâce à chacun de vos clics sur nos réseaux sociaux que nous pourrons y parvenir !
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