Etre otage de pirates somaliens est en soi terrible. Le sort de certains marins, souvent originaires de pays pauvres peu pressés de négocier leur libération, est encore pire: naufragés oubliés aux mains de leurs ravisseurs.
Selon des données d'Eunavfor, la flotte européenne déployée au large des côtes somaliennes pour lutter contre la piraterie, au moins 54 marins et pêcheurs sont actuellement retenus en otage. La plupart sont issus de familles pauvres d'Asie et détenus dans de sordides conditions depuis parfois plus de deux ans.
La moitié d'entre eux ont été littéralement abandonnés par les propriétaires de leurs bateaux quand ceux-ci ont sombré, à l'instar du porte-conteneur sous pavillon malaisien MV Albedo. "Maintenant que le navire a coulé, le propriétaire n'a plus aucun intérêt à payer la rançon et sauver l'équipage," ont écrit les familles des marins dans une lettre adressée aux pirates après le naufrage. L'équipage de l'Albedo est retenu en otage depuis novembre 2010. Quand le navire a sombré en juillet, les marins ont été transférés sur un autre vieux rafiot aux mains de pirates: le Naham 3, un bateau de pêche sous pavillon omanais, dont le propriétaire est taïwanais. Le Naham 3 risquant très vite de connaître le même sort que le MV Albedo - il est relié à la partie émergée de l'épave du navire naufragé et menace de couler d'un moment à l'autre - certains pensent qu'une partie au moins des otages a été emmenée à terre.
Les otages "sont des gens pauvres, issus de familles pauvres," relaie John Steed, qui dirige le Secrétariat pour la sécurité maritime régionale, un organisme de liaison entre les ravisseurs et la communauté internationale qui, pour nombre d'otages, constitue le dernier espoir. Le Secrétariat est le seul à encore tenter de convaincre les pirates de les libérer et à faire le liens avec les familles. Les otages rapportent gros aux pirates, véritables hommes d'affaires uniquement motivés par l'appât du gain : l'an dernier, ils auraient extorqué plus de 31 millions de dollars (24 millions d'euros) de rançons, selon un rapport publié en juillet par le Groupe de surveillance de l'ONU sur la Somalie.