Oeuvre d'ingénierie emblématique du 20e siècle, le canal de Panama, par où transite 5% du commerce maritime mondial, célèbre ce 15 août ses 100 ans, confronté à des projets concurrents alors que son chantier d'élargissement a déjà plus d'un an de retard.
L'idée, envisagée dès le 16e siècle par l'empereur Charles Quint, était belle: relier les océans Atlantique et Pacifique, pour éviter aux navires de devoir contourner l'Amérique du Sud.
Une fois le projet démarré, en 1880, il faudra plus de 30 ans pour accomplir le rêve de l'ingénieur français Ferdinand de Lesseps, déjà "père" du canal de Suez.
Son inauguration le 15 août 1914 marque la fin de longues années de travaux, d'abord par les Français qui échouent, puis par les Américains.
"Pour le Panama, le canal a signifié le progrès", raconte Jorge Quijano, son administrateur actuel. "Nous sommes passés d'une province oubliée (appartenant à la Colombie jusqu'en 1903, ndlr) à un Etat indépendant qui pouvait choisir son avenir".
Mais il fait face à la concurrence, notamment du canal de Suez."Personne ne pouvait se douter que le canal de Suez pouvait nous concurrencer. Mais je pense que c'est le cas et nous en avons ressenti les effets sur les 18 derniers mois", reconnaît Jorge Quijano.
Grâce à une plus grande capacité, Suez "a sapé lentement les revenus" de Panama, affirme-t-il. Et les choses pourraient s'aggraver : le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi vient de lancer le creusement d'un "nouveau canal de Suez" pour fluidifier le trafic du premier, avec l'objectif ambitieux d'aboutir d'ici un an.
Un projet qui s'ajoute à celui du Nicaragua, où une compagnie chinoise prétend construire un canal entre le Pacifique et les Caraïbes, attendu d'ici cinq ans.
Pour résister, le canal de Panama mise sur son agrandissement, mais ce chantier pharaonique, qui doit presque tripler sa capacité, a pris du retard. Prévu au départ pour célébrer dignement ce 100e anniversaire, il ne devrait finalement être mis en service qu'en 2016, ralenti notamment par une dispute avec le consortium chargé des travaux, qui réclamait une rallonge.
Le chantier de plus de 5 milliards de dollars équipera le canal de nouvelles écluses permettant le passage de navires "Post-Panamax" transportant jusqu'à 12.000 conteneurs contre 5.000 actuellement, pour doubler le transit à 600 millions de tonnes par an.