De navire de guerre à chariot de supermarché, coques à la découpe près de Bordeaux

Par Figaronautisme.com

Après avoir écumé les mers, huit ex-navires de guerre français vont achever leur vie près de Bordeaux, où la déconstruction de ces géants d'acier a commencé, un "pincement au coeur" pour la Marine mais la perspective de recycler 30.000 tonnes de matériaux.

À Bassens, en bord de Garonne, l'ancien pétrolier-ravitailleur Meuse a pris place début mars dans la forme de radoub du Grand Port maritime de Bordeaux, une cale sèche de 240 mètres de long.

C'est la première des huit coques à être découpée dans le cadre de ce spectaculaire chantier de 40 mois. Un contrat de "plusieurs millions d'euros" conclu par la Marine nationale avec un groupement d'entreprises, le plus grand marché de ce type en France depuis une décennie.

Minuscules devant l'immense coque de 150 mètres de long, plusieurs ouvriers masqués s'affairaient mardi après-midi, chalumeau à la main, pour retirer les équipements du pont arrière, araser le château au centre et, à la proue, découper l'étrave dans des gerbes d'étincelles.

C'est une "petite séquence émotion", a reconnu auprès de l'AFP le capitaine de vaisseau Grégory Lerenard, directeur adjoint du service de soutien de la flotte de la Marine nationale, à Brest.

"Il y a toujours un petit pincement au coeur quand on voit partir à la retraite des navires sur lesquels on a navigué. Ça fait partie du cycle de vie des navires, on sait qu'après ils vont être recyclés et servir à autre chose", observe-t-il.

- Valoriser 98% des matériaux -

De 1980 à 2015, la Meuse a accompagné en opération les porte-avions Foch, Clemenceau et Charles-de-Gaulle. Le tonnage de ce pétrolier-ravitailleur, jadis doté d'un hôpital embarqué, de salles d'état-major et d'amples cales, pouvait atteindre 18.000 tonnes une fois chargé en carburant.

À ses côtés, à quai, se trouve l'ancien Suffren, reconnaissable au large radôme (sorte de boule abritant le radar) à son sommet. Cette ex-frégate a servi de 1967 à 2001, avant d'être utilisée comme brise-lames près de Toulon puis remorquée jusqu'à Bordeaux.

Au moment de leur démobilisation, ces anciens navires avaient déjà été dépouillés de leur motorisation, de leurs canons et de nombreux équipements.

Mais il reste entre quatre et huit mois de chantier pour chaque navire, afin de dépolluer les coques puis recycler 98% des matériaux.

"Il y a de l'amiante, des PCB, des FCR (fibres céramiques réfractaires, NDLR), du plomb... Il faut en tenir compte", souligne Nathalie Le Rest, responsable des opérations de déconstruction au sein du service de soutien de la flotte.

"C'est un processus industriel qu'on maîtrise de bout en bout", répond Nicolas Masson, directeur de Cardem, filiale d'Eurovia (groupe Vinci) chargée du démantèlement.

Snadec Environnement (dépollution) et Sirmet (recyclage) complètent le groupement, également chargé de revendre les métaux recyclés à des aciéries désireuses de réduire leur empreinte carbone.

- De "futures voitures ou casseroles" -

"À la fin de la boucle, on a des bateaux qui vont servir à faire des métaux de construction. Peut-être que vous en retrouverez des morceaux dans vos futures voitures ou casseroles", sourit Nicolas Masson.

Ou bien encore dans des chariots de supermarché, car "tout acier peut être recyclé à l'infini", abonde le capitaine de vaisseau Lerenard, qui précise que l'éventuelle rouille des coques est seulement superficielle et facile à décaper.

Avant 2005, les bateaux militaires étaient océanisés, c'est-à-dire coulés au large, parfois après avoir servi de cibles d'exercice. Depuis, cette pratique est interdite et les navires sont déconstruits en France ou à l'étranger après le lancement d'appels d'offres.

Ces dernières années, d'autres prestigieux navires de combat, comme l'ancien croiseur Colbert ou le mythique navire-école Jeanne d'Arc, ont achevé leur vie près de Bordeaux, l'un des 18 sites européens habilités.

Et d'autres chantiers sont en vue pour la Marine nationale. "Sur la décennie à venir on peut comptabiliser une centaine de coques de fort et moyen tonnage à déconstruire, et un peu plus de 300 petits navires et engins nautiques", détaille Nathalie Le Rest.

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
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Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
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Albert Brel
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Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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