"Ce serait dramatique mais pas sans précédent": le plus grand iceberg au monde menace des manchots

Par Figaronautisme.com / AFP

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Traqué par satellites, le plus grand iceberg du monde - long de 80 kilomètres - dérive actuellement depuis l'Antarctique vers une île reculée où il pourrait s'échouer et bloquer les manchots et otaries qui s'y reproduisent. Cet immense plateau de glace - 30 fois plus vaste que Paris - s'éloigne depuis des années de l'Antarctique et, propulsé par les courants, se dirige potentiellement vers l'île britannique de Géorgie du Sud, un site important pour la reproduction de la faune sauvage.

D'après les images satellitaires, cet iceberg, contrairement aux précédents icebergs géants, ne semble pas se fragmenter en de plus petits morceaux au cours de sa dérive, a expliqué vendredi à l'AFP Andrew Meijers, océanographe au British Antarctic Survey. Selon l'expert, il est difficile de prévoir avec exactitude sa trajectoire, mais les courants dominants laissent penser que ce colosse atteindra les abords du plateau continental, situé en eaux peu profondes, autour de la Géorgie du Sud d'ici deux à quatre semaines. Ce qui pourrait se produire ensuite reste incertain.

L'iceberg pourrait éviter le plateau continental et être emporté vers les eaux profondes de l'Atlantique Sud, au-delà de la Géorgie du Sud, un territoire britannique d'outre-mer situé à environ 1.400 km à l'est des îles Falkland. Mais il pourrait aussi heurter le fond incliné, rester bloqué pendant des mois, voire se briser en plusieurs morceaux. Les murs de glace pourraient alors empêcher otaries et manchots d'accéder à l'océan pour se nourrir eux-mêmes ainsi que leurs petits à terre, explique Andrew Meijers. "Ce serait assez dramatique, mais pas sans précédent", dit l'expert. "Des icebergs se sont déjà échoués à cet endroit par le passé, causant une mortalité importante parmi les poussins de manchots et les jeunes otaries", rappelle-t-il.

" Immense falaise blanche"
S'étendant sur environ 3.500 kilomètres carrés, l'iceberg baptisé A23a est aussi le plus vieux du monde. Il s'est détaché de la plateforme glaciaire de l'Antarctique en 1986. Il est ensuite resté coincé sur le plancher marin pendant plus de 30 ans avant de se libérer en 2020, entamant alors sa lente dérive vers le nord. Il est resté plusieurs mois en 2024 au même endroit à tourner sur lui-même.

Andrew Meijers, qui a observé A23a de près fin 2023, le décrit comme "une immense falaise blanche, haute de 40 à 50 mètres, qui s'étend à perte de vue". "C'est comme un gigantesque mur blanc qui rappelle +Game of Thrones+, on a l'impression qu'il est sans fin", a-t-il ajouté. Pesant près de 1.000 milliards de tonnes, le gigantesque bloc d'eau douce est entraîné par le plus puissant courant océanique du monde, le courant circumpolaire antarctique, à 20 centimètres par seconde, selon le British Antarctic Survey.

L'iceberg suit "plus ou moins une ligne droite" jusqu'à la Géorgie du Sud, a indiqué Andrew Meijers.

Un obstacle pour les animaux
Pendant l'été austral, le long des côtes sud de la Géorgie du Sud, les manchots et les otaries partent en expédition dans les eaux froides pour ramener suffisamment de nourriture à leurs petits. "Si l'iceberg se retrouve coincé là, il bloquera l'accès aux zones d'alimentation", explique Andrew Meijers. "Les animaux pourraient être obligés de le contourner. Cela leur ferait dépenser beaucoup plus d'énergie, ce qui signifie moins de ressources pour les petits et donc une augmentation de la mortalité." Les populations d'otaries et de manchots de la Géorgie du Sud connaissent déjà une "mauvaise saison" en raison d'une épidémie de grippe aviaire. La présence de l'iceberg pourrait aggraver la situation.

Lorsque A23a ou ses fragments finiront par fondre, ils pourraient laisser dans leur sillage des morceaux de glace plus petits mais toujours dangereux, compliquant la navigation pour les pêcheurs. Cependant, il apportera également des nutriments dans l'eau, favorisant le phytoplancton, une source essentielle de nourriture pour les baleines et d'autres espèces marines. La fonte aidera aussi les scientifiques à mieux comprendre comment ces proliférations de phytoplancton absorbent le CO2 de l'atmosphère.

Bien que la formation d'icebergs soit un phénomène naturel, Andrew Meijers estime que leur perte accélérée en Antarctique est probablement due au changement climatique d'origine humaine.

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Nathalie Moreau
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Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
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Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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