
Les sept équipes engagées sur The Ocean Race Europe se rapprochent des côtes italiennes, lors de la quatrième étape entre Nice et Gênes. Avec les vents légers attendus avant l’arrivée, le classement pourrait être totalement redistribué.
C’est ce qu’explique le vainqueur du denier Vendée Globe, le Français Charlie Dalin, qui a confié à la Classe IMOCA que, la flotte étant désormais engagée dans le détroit de Bonifacio, la prochaine portion de la quatrième étape se déroulera au portant, dans des conditions musclées, sous l’influence d’un flux de sud généré par une dépression centrée sur Gênes. Selon lui, cette partie de la course pourrait sourire aux deux sisterships dessinés par Antoine Koch et le cabinet Finot-Conq : Paprec Arkéa, mené par le Français Yoann Richomme, et Allagrande MAPEI Racing, skippé par l’Italien Ambrogio Beccaria.
La fin de l’étape s’annonce particulièrement stratégique, avec une grande boucle à effectuer depuis la côte italienne à hauteur d’Alassio (waypoint Gallerina) avant de repartir au large sur un cap est-sud-est, puis de virer au niveau du waypoint Livourne pour remonter vers Gênes. C’est dans cette portion que Dalin estime que la hiérarchie pourrait être totalement bouleversée, offrant une chance aux poursuivants de revenir dans le match. Mais cette transition pourrait également donner l’occasion au leader Meilhat et à son équipe de tirer leur épingle du jeu en anticipant mieux que leurs rivaux.
« Tout pourrait se jouer à nouveau dans la dernière chicane », explique Charlie Dalin. « Car les équipages vont devoir traverser le front de la dépression de Gênes et probablement entrer dans une zone de vents faibles. Une fois encore, un bateau polyvalent pourrait en tirer profit, mais tout dépendra de ce qui se passera sur la remontée vers le nord. »
Dalin s’est dit impressionné par la manière dont Paul Meilhat et son équipage ont navigué sur cette course qu’ils dominent depuis le départ. Selon lui, The Ocean Race Europe correspond parfaitement aux qualités de Biotherm, dessiné par Guillaume Verdier.
« Ce que l’on sait de ce bateau, c’est qu’il est particulièrement polyvalent par rapport à d’autres de la flotte, et The Ocean Race Europe est une épreuve aux conditions très variées, où l’on peut rencontrer de tout, du près comme du portant. Chaque étape a été changeante, et disposer d’un bateau polyvalent constitue clairement un avantage », souligne Dalin.
« L’autre bateau qui possède ces mêmes qualités, c’est Holcim-PRB, mais évidemment, la collision subie au début de la course ne met jamais dans les meilleures dispositions pour performer. On a toutefois l’impression qu’ils commencent à se remettre dans le rythme », ajoute-t-il.
Selon Charlie Dalin, Paul Meilhat est lancé dans une véritable dynamique de victoire, comme en témoigne sa place de leader au classement général avec 12 points d’avance sur Holcim-PRB, après avoir remporté toutes les étapes et engrangé deux points supplémentaires à chacun des quatre Bonus Scoring Gates.
« Paul est bien parti et, quand vous gagnez une ou deux étapes, vous entrez dans une sorte de spirale de succès et de confiance », explique Dalin. « Vous êtes alors dans le bon état d’esprit pour prendre les bonnes décisions tactiques et stratégiques. »
Dalin souligne également qu’au sein de cette course, où chaque étape se dispute en configuration équipage complet et avec peu d’options de navigation, la variable clé reste la vitesse pure. « La vitesse intrinsèque du bateau est plus importante que, disons, dans une course en solitaire », précise-t-il. « Car en solitaire, il faut aussi un bateau rapide, mais vous devez surtout vous préparer à ce qui arrive, alors qu’en équipage, vous avez toujours la bonne voile en place. »
Si Meilhat et son équipe dominent jusqu’ici la compétition, Dalin prévient que rien n’est encore joué. La dernière étape, entre Gênes et le Monténégro, pourrait se révéler passionnante, quels que soient les écarts au classement général. Il s’attend à une manche particulièrement exigeante, avec des marins fatigués confrontés aux effets thermiques le long de la côte italienne, avant un final ardu dans la baie de Boka.
« La situation va être très délicate pour les navigateurs, avec une bonne probabilité de vent de nord-ouest en direction du Monténégro. Les skippers devront alors décider soit de longer la côte italienne, soit de traverser vers l’Albanie, une décision qui pourrait s’avérer déterminante », explique Charlie Dalin.
Ayant participé à la dernière édition de The Ocean Race à bord du vainqueur 11th Hour Racing, Dalin sait à quel point ces courses en équipage complet, avec des escales courtes et intenses, sont exigeantes. « C’est vraiment dur », confie-t-il. « Les équipages accumulent évidemment de la fatigue, il faut donc prévoir une rotation suffisante pour renouveler l’énergie à bord, mais sans perdre le noyau dur ni l’esprit d’équipe. C’est un équilibre difficile à trouver. Ce n’est pas un événement simple à gérer de ce point de vue. »
Pour autant, il estime que Paul Meilhat est désormais en position de force. « Ils sont clairement lancés dans une dynamique gagnante, et le classement le reflète. Quand vous disposez d’une bonne avance au tableau de scores, vous pouvez aborder les choses différemment : vous n’êtes pas obligés de prendre autant de risques que les autres et vous êtes assis dans un siège relativement confortable pour gérer la course », conclut Dalin.