C’est une image symbolique : au quai Pierre-Callet, un géant des mers a branché son câble d’alimentation, coupé ses moteurs et laissé place au silence. Le port du Havre devient le premier port français à proposer un raccordement électrique à quai pour les paquebots de croisière. Un geste fort pour l’environnement, et un signal d’avenir pour toute la filière maritime.
Un port pionnier en Europe
Le dispositif, baptisé RENAQ (Raccordement Électrique des Navires à Quai), permet désormais aux navires à l’arrêt d’être alimentés en électricité depuis le réseau terrestre plutôt que par leurs moteurs diesel. L’investissement est colossal : 32 millions d’euros, financés par HAROPA PORT, l’État et les collectivités. Le système repose sur un bras articulé mobile capable d’acheminer jusqu’à 13 MW d’énergie vers un navire. À terme, trois quais du terminal croisière - Pierre Callet, Roger Meunier et Joannes Couvert - seront équipés pour accueillir plusieurs paquebots simultanément.
« C’est une avancée technologique majeure pour réduire les nuisances sonores et les émissions en zone portuaire », souligne HAROPA PORT, gestionnaire des installations havraises.
Une escale sans moteur, un air plus pur
Jusqu’ici, même à quai, les paquebots devaient faire tourner leurs moteurs pour assurer la vie à bord : climatisation, cuisine, éclairage, systèmes informatiques... Résultat : des émissions de CO? et de particules fines considérables, parfois équivalentes à celles de milliers de véhicules.
Désormais, un navire raccordé au réseau local peut éteindre ses générateurs et fonctionner entièrement à l’électricité. Selon HAROPA PORT, cette innovation permettra d’éviter jusqu’à 20 000 tonnes de CO? par an.
Pour les riverains du port, l’amélioration sera aussi sonore : les vibrations et le ronflement constant des moteurs laissent place à un quai beaucoup plus paisible.
La croisière face à sa transition écologique
Cette première mondiale pour un port français s’inscrit dans une stratégie plus large de décarbonation du transport maritime. D’ici 2030, les ports européens devront généraliser le branchement à quai pour les navires de croisière et les porte-conteneurs. Au Havre, où les escales touristiques se multiplient, cette transition est vue comme une nécessité. Le port accueille plus de 200 000 passagers par an, un chiffre appelé à croître encore.
« Les armateurs n’ont plus le choix : la réduction des émissions devient une condition d’accès aux ports », explique un représentant de la capitainerie.
Après Le Havre, Marseille et Cherbourg devraient suivre. L’objectif est clair : faire des ports français des acteurs exemplaires de la croisière durable. Pour la ville, ce virage technologique s’inscrit aussi dans une démarche d’attractivité touristique : un port plus propre, plus silencieux et plus respectueux de son environnement, sans renoncer à l’accueil des grands paquebots.
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