Archipel des Ebihens : les îles sauvages de la côte d'Emeraude

Pour rejoindre l’archipel, il faut guetter les horaires de basse mer, espérer un coefficient supérieur à 50 et s’élancer depuis la plage du Rougeret ou la baie de l’Arguenon. Un banc de sable se découvre alors, mince passage éphémère entre continent et île. Trois heures avant l’étale côté Arguenon, deux heures côté Saint-Jacut : le timing est serré. La traversée prend une trentaine de minutes, et le retour doit impérativement s’amorcer au plus tard une heure trente après la basse mer. Ceux qui l’oublient se retrouvent piégés par les flots, contraints d’attendre la marée suivante.
Un écrin naturel préservé
Une fois sur place, le contraste est saisissant. Vingt hectares de nature brute, entre lande balayée par les vents, pinèdes noueuses et petites criques translucides. L’île est privée, partagée entre plusieurs propriétaires, mais les chemins restent accessibles. Aucun panneau, aucune clôture : seuls quelques écriteaux rappellent que les lieux ne doivent ni être souillés ni dégradés. Le respect du site se fait ici par évidence, tant le décor impose le silence et l’humilité.
L’île aux trois visages
En suivant les sentiers, on découvre des paysages variés. À l’est, la plage de la Chapelle étonne par ses couleurs. Sous un soleil généreux, l’eau y prend des teintes turquoise et la température grimpe souvent de deux degrés par rapport à la côte. Parfois, quand la lumière s’y prête, elle évoque presque les grèves tropicales. La baignade y est douce, l’atmosphère, presque irréelle. D’autres criques plus discrètes ponctuent les bords de l’île, notamment côté ouest, idéales pour une pause à l’écart. Plus au nord, une ancienne tour de guet domine les hauteurs. Construite à la fin du XVIIe siècle par Siméon de Garangeau, élève de Vauban, elle surveillait jadis l’embouchure de l’Arguenon. Aujourd’hui, elle offre un point de vue superbe sur la baie. Enfin, à l’extrémité de l’archipel, la pointe dévoile une ligne d’horizon inoubliable : Fort La Latte, Cap Fréhel, Saint-Cast, Saint-Briac... Un panorama à couper le souffle, sculpté dans la lumière changeante de la Manche.
Le privilège des randonneurs
Les voiliers aiment jeter l’ancre au large des Ébihens, mais seuls les marcheurs peuvent fouler ses sentiers. Entre deux passages d’eau, le temps semble suspendu. Pas de commerce, pas de réseau, pas de nuisance. Juste une île à taille humaine, que l’on traverse en une heure, sans jamais se lasser. Un paradis pour les amateurs de nature, de solitude choisie, de pêche à pied ou de pique-nique sur les rochers. La diversité des sentiers, entre lande sèche, chemins boisés et points de vue dégagés, en fait aussi une destination de choix pour les randonneurs à la recherche de variété en quelques kilomètres.
Une nuit par an, sous les flambeaux
Depuis 1998, une tradition singulière perpétue la magie du lieu. Chaque été, au cœur du mois d’août, l’office de tourisme de Saint-Jacut organise une randonnée aux flambeaux jusqu’aux Ébihens. La soirée commence sur la côte avec jeux bretons, musique et restauration. Puis, lorsque le soleil décline, les marcheurs traversent la grève éclairés par des centaines de flammes. L’île, alors baignée d’une lumière vacillante, révèle une autre facette de sa beauté. L’édition 2021 aura lieu le mercredi 18 août. Une date à retenir pour ceux qui rêvent de découvrir l’archipel... autrement.
Les Ebihens ne sont pas une destination comme les autres. Ils ne s’improvisent pas, ne se consomment pas à la hâte. Il faut vérifier les marées, prévoir ses horaires, emporter de quoi boire et se protéger du soleil ou du vent. Mais ce léger effort logistique est largement récompensé. Car une fois sur place, plus rien ne compte. Ni le temps, ni le réseau, ni la foule. Juste un bout de Bretagne, resté sauvage, offert quelques heures aux marcheurs attentifs. Une parenthèse rare, précieuse, et profondément vivante.
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