
Figaro Nautisme : En 2018 Fountaine-Pajot a repris le chantier Dufour. Quelles sont vos ambitions pour ces deux chantiers mythiques pour tous les amateurs de voile ?
Romain Motteau : Les chantiers Fountaine-Pajot et Dufour ont un même ADN : celui de passionnés de voile qui ont été pionniers dans l’accessibilité de la plaisance. Nous imaginons et construisons des bateaux confortables et marins pour des propriétaires et des équipages qui recherchent à prendre du plaisir en navigation comme au mouillage.
Aujourd’hui, notre responsabilité essentielle est aussi de permettre à notre industrie de devenir la plus neutre possible en termes d’émission d’équivalent carbone. C’est un engagement que nous portons depuis longtemps, que cela soit dans nos process de construction, dans nos choix de la préservation de l’environnement - comme par exemple pour la posidonie. Cela se concrétise depuis des années par des actions comme de privilégier le train plutôt que l’avion dans nos déplacements quand cela est possible ou être moteur de la mise en place d’un Ecoscore européen pour connaître la réalité de l’impact de nos bateaux...
Figaro Nautisme : Peut-on réellement concilier la construction de bateaux neufs et l’obligation de préserver notre planète ?
Romain Motteau : Nous avons clairement affiché notre objectif : diminuer de 60% notre empreinte en 2030 pour arriver à une contribution nette zéro en 2050. C’est un gros challenge, mais nous avons la volonté d’y arriver. Prenons l’exemple des méthodes de construction : le choix de l’âme du sandwich entre le Balsa, le PET ou RPET issu du recyclage peut diviser l’empreinte carbone par 10. Mais cela implique de la recherche et développement importants. Il faut se donner les moyens et nous nous les donnons. Sur le volet industriel, nous avons isolé nos bâtiments, on essaye de limiter la quantité de résine ou d’utiliser des sous-traitants locaux... Mais ne nous leurrons pas, c’est dans sa phase d’utilisation que le bilan carbone d’un bateau est le plus lourd. A nous de proposer des bateaux qui marchent bien à la voile pour éviter de devoir mettre le moteur quand le vent est trop léger ou d’imaginer une production d’énergie propre pour éviter l’utilisation déraisonnée des groupes électrogènes...
Figaro Nautisme : Quelle est l’actualité pour vos deux marques en 2025 ?
Romain Motteau : L’année 2025 va être importante pour le chantier Dufour avec deux nouveautés très attendues : les Dufour 48 et 54. Deux bateaux qui innovent vraiment, en offrant des espaces de vie extérieurs inconnus jusqu’ici sur les monocoques et des intérieurs lumineux, rappelant ceux des catamarans. Des unités qui restent de vrais Dufour, marins, performants sous voile et surtout des bateaux de sensations, qui gîtent et à bord desquels on vit avec les éléments, la nature et la lumière. Du côté Fountaine-Pajot, nous présentons aussi deux grandes nouveautés en 2025 : les 41 et 44 connus aujourd’hui sous les noms de code New 41 et New 44. A découvrir - tout comme leurs noms de baptême officiels - cet été pour le 41 et en septembre pour le 44.

Figaro Nautisme : Fountaine-Pajot et Dufour ont toujours été, chacun dans leurs domaines, moteur de l’innovation dans le nautisme. Comment envisagez-vous les bateaux des années 2030 ?
Romain Motteau : En convergence avec ce que nous faisons avec Fountaine-Pajot, les monocoques Dufour seront encore plus agréables à vivre, avec des lieux de vie différents, des espaces extérieurs repensés, optimisés, et un intérieur plus lumineux, à l’instar de nos catamarans. Grâce au talent des architectes navals, nous parviendrons à offrir un volume optimal sans grever les performances. Un Dufour doit rester marin et offrir de vraies sensations ! A bord de ces monocoques, on prend du plaisir à être à la gite, à vivre avec les éléments marins.
Pour répondre à votre question, les bateaux dans 10 ans seront motorisés à l’électrique pour au moins la moitié de notre production. Ce sera possible avec les hard-tops que nous avons déjà sur les Dufour de la nouvelle génération ou sur les catamarans qui offrent encore plus de surface. Aujourd’hui, un monocoque peut être équipé de plus de 2000 W de panneaux solaires pour une véritable autonomie...
Figaro Nautisme : Gîte assumée, mono safran : les Dufour ne vont-ils pas à contre-courant des monocoques d’aujourd’hui ?
Romain Motteau : Un safran profond, mais un seul pour donner de la vie au bateau, ça répond, ça bouge, ça gîte... L’idée est de proposer des bateaux à vivre, sur lesquels nous profitons vraiment de la navigation, que ce soit pour quelques heures ou quelques jours...Des bateaux qui vous nourrissent, vous donnent de l’adrénaline mais sans avoir besoin, pour cela, d’aller jusqu’à régater. Je viens, à la base de ce monde de la course et de la régate, et j’aime vraiment ça. Et oui, pour moi, quand on part naviguer en famille en monocoque, nous voulons avant tout passer un bon moment à faire du bateau, même et surtout si ça bouge et qu’il faut manoeuvrer !
La réalité des marins d’aujourd’hui est de ne surtout pas opposer catamaran et monocoque. Ce sont deux propositions différentes d’un même plaisir de naviguer. Le catamaran offre une plateforme idéale pour vivre à bord. Aux Antilles, bien sûr, mais pas que : je reviens tout juste d’une navigation à Tromso pour une randonnée ski/cata. Et je vous garantis que je n’imagine pas faire ce type de programme sur un monocoque ! En revanche, le week-end prochain, si nous sortons en mer en famille depuis La Rochelle, ce sera forcément en monocoque. On va vraiment s’amuser, même si on n'appareille que pour quelques heures pour aller faire le tour de l’île d’Aix ou aller à l’île de Ré...
Monocoque ou catamaran, voile ou moteur : chacun va offrir une expérience différente mais enrichissante. Maintenant, la réalité économique est aussi que les monocoques sont moins chers. Et tout le monde n’a pas les moyens de louer ou acheter un grand catamaran. Les monocoques ont donc encore de très beaux jours devant eux, j’en suis persuadé. A nous, constructeurs, de proposer les bons bateaux pour répondre aux besoins de chacun !
Figaro Nautisme : Votre prochaine croisière : sur un Dufour ou un Fountaine-Pajot ?
Romain Motteau : Ma dernière grande croisière était sur un Fountaine-Pajot : nous sommes partis dans le nord/nord de la Norvège pour une rando ski cata. Une navigation un peu extrême avec de la neige sur le pont du catamaran. J’aime vraiment explorer les capacités des catamarans au maximum. Ma prochaine nav sera sûrement cet été, plutôt sur un Dufour, mais je ne sais pas encore où ni sur quel bateau. D’ici là, j’ai pas mal de travail...
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