Canicule en mer : ce que les plaisanciers doivent savoir pour naviguer sans danger

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Alors que la France traverse une canicule exceptionnelle, les températures élevées ne s’arrêtent pas aux côtes. À bord d’un bateau, la chaleur peut vite devenir insupportable, voire dangereuse pour la santé comme pour les équipements. Coup de chaleur, déshydratation, frigo inefficace, batteries à risque : face à ces menaces, une bonne organisation est indispensable. Voici les bons réflexes à adopter pour continuer à naviguer en toute sécurité, malgré la canicule.

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Alors que la France traverse une canicule exceptionnelle, les températures élevées ne s’arrêtent pas aux côtes. À bord d’un bateau, la chaleur peut vite devenir insupportable, voire dangereuse pour la santé comme pour les équipements. Coup de chaleur, déshydratation, frigo inefficace, batteries à risque : face à ces menaces, une bonne organisation est indispensable. Voici les bons réflexes à adopter pour continuer à naviguer en toute sécurité, malgré la canicule.

La navigation par fortes chaleurs impose une vigilance accrue, une organisation repensée et des réflexes adaptés pour préserver à la fois la santé des équipiers et l’intégrité du bateau. Vivre à bord, c’est accepter de s’exposer longuement à des températures élevées, souvent sans climatisation, sans point d’ombre suffisant, et avec des ressources limitées. La sensation de fraîcheur liée à la mer masque une réalité physique implacable : le rayonnement solaire, la réverbération sur l’eau, l’air stagnant dans les cabines et le manque de récupération rendent les conditions de vie plus difficiles qu’on ne le pense. Mieux vaut le savoir, s’y préparer... et s’en protéger.

Les effets physiques de la canicule à bord
La chaleur, en mer, agit différemment. À terre, on peut se réfugier dans une pièce climatisée, à l’ombre d’un arbre ou profiter d’un ventilateur puissant. À bord, les solutions sont plus limitées. Lorsqu’un bateau reste au mouillage ou navigue sans vent, les cabines se transforment vite en étuves. Le thermomètre grimpe à plus de 35 °C à l’intérieur, voire 40 °C sans aucune aération. Les surfaces exposées deviennent brûlantes, le cockpit se transforme en serre, et le corps humain est directement soumis à cette chaleur constante, parfois pendant plusieurs jours consécutifs.
L’un des principaux risques est le coup de chaleur. Il peut survenir sans prévenir, même chez des adultes en bonne santé. Une température corporelle qui monte au-delà de 39 °C, un état de confusion, des maux de tête, une fatigue intense, une peau sèche : autant de signes qui doivent alerter. Contrairement à une simple insolation, un coup de chaleur nécessite une prise en charge rapide. Il ne suffit pas de boire un verre d’eau et de se mettre à l’ombre. Il faut immédiatement rafraîchir la personne, lui faire boire de petites quantités d’eau régulièrement, et si l’état ne s’améliore pas, déclencher un appel au CROSS ou envisager une évacuation.
La déshydratation est un autre danger sournois. Sur un bateau, l’activité physique est souvent intense : hisser une voile, faire une manœuvre, ramener l’annexe, ou même cuisiner dans une cabine surchauffée. Le corps perd de l’eau en permanence, parfois sans que cela soit perçu comme tel. Et lorsque l’on attend d’avoir soif pour boire, il est souvent trop tard. La perte de lucidité, les crampes, les nausées, l’irritabilité ou encore la baisse de la tension artérielle sont autant de symptômes à surveiller.
La chaleur a aussi des effets plus diffus mais tout aussi importants sur le quotidien : troubles du sommeil, réveils en sueur, sommeil fragmenté, irritabilité. Or, à bord, une mauvaise nuit peut vite impacter toute la journée suivante, et donc la sécurité de la navigation. Les prises de décision sont moins bonnes, les gestes techniques deviennent moins précis, la fatigue s’accumule, et les tensions dans l’équipage peuvent s’amplifier.
Ces effets sont d’autant plus prononcés chez les publics les plus vulnérables : les enfants, dont l’organisme se régule moins efficacement, peuvent rapidement se retrouver en surchauffe s’ils sont peu actifs et peu hydratés ; les personnes âgées, quant à elles, perçoivent moins bien la soif, et sont plus exposées aux coups de chaleur, aux chutes de tension et à la fatigue chronique. La canicule à bord devient alors un facteur de risque sanitaire qu’il faut anticiper avec la plus grande rigueur.

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Le bateau aussi souffre de la chaleur
On oublie parfois qu’un bateau, lui aussi, a ses limites face à la chaleur. Les équipements embarqués ne sont pas conçus pour fonctionner durablement à des températures extrêmes. Les instruments de navigation, les panneaux de contrôle, les chargeurs, les batteries et les frigos sont autant de composants sensibles à la surchauffe.
À commencer par les batteries, lithium ou AGM. Une température extérieure élevée les met en surchauffe, surtout si elles sont installées dans un coffre mal ventilé. Résultat : elles peuvent perdre en autonomie, chauffer au-delà des seuils de sécurité, et dans les cas extrêmes, présenter un risque thermique ou devenir hors service. La consommation d’électricité augmente également : ventilateurs, pompes de refroidissement, frigos et congélateurs tournent en continu, sollicitant les sources d’énergie à leur maximum.
Les équipements électroniques ne sont pas épargnés. Beaucoup de plaisanciers ont vu leur GPS ou leur tablette se mettre en mode sécurité en pleine navigation, simplement parce que le soleil tapait en direct sur l’écran. Certains instruments perdent leur précision ou s’éteignent sans avertissement. Il est donc indispensable de les protéger de la chaleur directe, de les éteindre quand ils ne sont pas nécessaires, ou de prévoir des alternatives (cartes papier, instruments de secours).
Même le frigo, souvent négligé, devient un élément stratégique. Avec plus de 35 °C dans le carré, il perd en efficacité, surtout s’il est ancien ou surchargé. L’intérieur reste tiède, les produits tournent plus vite, et le risque d’intoxication alimentaire est bien réel. Ouvrir la porte trop souvent, ranger des aliments encore tièdes ou mal emballés augmente encore le problème.
Enfin, l’eau douce devient une denrée précieuse. La consommation quotidienne monte en flèche : boisson, hygiène, cuisine, rinçage... Or, les réservoirs sont rarement illimités. En cas de forte chaleur, il faut anticiper les ravitaillements, limiter les usages non essentiels, et s’assurer que l’eau reste propre et fraîche. Une panne de pompe ou une fuite dans un circuit peut alors devenir critique.

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Conseils concrets pour mieux vivre la canicule en mer
Pour limiter les effets de la chaleur, mieux vaut organiser ses journées différemment. La règle d’or : éviter les efforts entre 12h et 17h. Cela signifie adapter les navigations, lever l’ancre tôt, arriver tôt dans les ports ou au mouillage, et consacrer les heures les plus chaudes à la récupération, à l’ombre ou à la baignade. Le rythme de vie à bord doit changer : sieste, pauses fréquentes, hydratation régulière - même sans soif.
L’ombre devient un élément vital. Tout ce qui peut protéger le cockpit ou le pont doit être mis à contribution : bimini, taud, drap tendu, voile d’ombrage improvisée. Il est même utile d’envisager une double toile, avec un espace d’air entre les deux, pour améliorer l’effet isolant. Un coin frais, même sommaire, permet de protéger les équipiers les plus fragiles.
La ventilation est un autre pilier. Les panneaux de pont doivent être ouverts en diagonale pour favoriser les courants d’air. Les ventilateurs à bord, même portables ou à piles, font une vraie différence. Certains plaisanciers investissent dans des petits climatiseurs mobiles ou dans des rideaux mouillés pour créer un effet évaporatif naturel. En soirée, si la température extérieure baisse, ouvrir tous les capots et laisser circuler l’air aide à abaisser la température intérieure.
L’alimentation, aussi, joue un rôle. On privilégie les repas froids, les fruits frais, les aliments riches en eau et faciles à digérer. Les plats chauds et lourds alourdissent la digestion, et accentuent l’effet de fatigue. Les boissons doivent être nombreuses, peu sucrées, sans alcool en pleine journée. L’eau reste la meilleure option, avec éventuellement du sel ou des minéraux en cas de transpiration excessive.
Enfin, la tenue vestimentaire doit être adaptée : tissus respirants, manches longues légères pour éviter les coups de soleil, chapeau couvrant, lunettes de qualité, crème solaire à renouveler plusieurs fois par jour. Des accessoires simples comme un brumisateur ou un linge mouillé sur la nuque peuvent apporter un soulagement immédiat.

Vivre la canicule en mer demande préparation, adaptation et bon sens. Contrairement aux idées reçues, le large n’épargne ni le corps ni le bateau. La chaleur intense altère les performances humaines et techniques, multiplie les risques, et fragilise le quotidien. Pourtant, avec quelques réflexes bien ancrés - gestion des horaires, création d’ombre, ventilation, surveillance de l’eau et de l’équipement -, il est tout à fait possible de continuer à naviguer sans se mettre en danger. La clé, c’est l’anticipation. En mer comme à terre, affronter la canicule n’est pas une question de bravoure, mais d’organisation. Mieux vaut alléger son programme et préserver son équipage que de subir les conséquences d’une chaleur mal gérée. La navigation reste un plaisir... à condition de ne jamais négliger les réalités du corps et du climat.

Et avant de partir en mer, ayez les bons réflexes en consultant la météo sur METEO CONSULT Marine et en téléchargeant l'application mobile gratuite Bloc Marine.

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...