
Un sel préhistorique… mais pas vraiment himalayenContrairement à ce que son nom laisse croire, le sel rose de l’Himalaya ne provient pas directement des flancs enneigés de l’imposante chaîne de montagnes, il vient en réalité de Khewra, une ville pakistanaise située à environ 300 kilomètres au sud de la chaîne himalayenne. Là se trouvent des gisements de sel gemme vieux de 250 à 300 millions d’années, témoins d’une mer disparue bien avant les dinosaures.La mine de Khewra, parfois surnommée “la cathédrale de sel”, est un site titanesque : plus de 40 kilomètres de galeries souterraines, avec des salles sculptées, un hôpital troglodyte, un petit train minier, une mosquée faite de blocs de sel translucides, des bassins et des ponts. Elle est la deuxième plus grande mine de sel au monde (après celle de Goderich au Canada) et constitue un vrai centre touristique, avec plus de 250 000 visiteurs par an que l'on peut visiter : l’entrée coûte moins de 2 €, et il existe même un hôtel troglodyte à l’intérieur pour les curieux en quête d’immersion salée.
Entre légendes et réalités : qu’a-t-il de si spécial ?Le mythe commence souvent ici : “il contient 84 minéraux essentiels”. C’est vrai… mais très exagéré. Les oligo-éléments comme le magnésium, le potassium ou le fer sont présents, mais à des niveaux si faibles qu’ils n’ont aucun effet mesurable sur la santé dans le cadre d’une consommation normale. Le goût, lui, est parfois perçu comme un peu plus doux, moins amer que celui du sel raffiné, mais là encore, c’est subtil et subjectif.Cela ne veut pas dire qu’il est inutile : non raffiné, sans additifs, non blanchi, le sel rose peut séduire justement par ce qu’il ne contient pas, en opposition au sel industriel enrichi d’anti-agglomérants. Il se distingue aussi par sa texture et sa couleur, bien sûr : allant du rose très pâle au rouge-orangé selon la teneur en oxydes de fer.On l’utilise aussi bien en cuisine (gros cristaux, moulins, plaques de cuisson) qu’en bien-être (lampes, bains, inhalateurs…). Sur ce dernier point, attention à l’emballement : aucune étude scientifique sérieuse ne confirme ses bienfaits thérapeutiques, qu’il s’agisse de sommeil, d’asthme ou de “purification de l’air”. Ces effets relèvent souvent du placebo ou de l’ambiance zen que procure son apparence.

Le goût du sel… et de l’orLe sel rose est un produit exporté dans le monde entier, souvent vendu 50 à 100 fois son prix d’achat au Pakistan. Le pays produit plus de 400 000 tonnes de sel gemme par an, dont une bonne partie est rose, et l’export repose presque exclusivement sur Khewra et quelques mines voisines. Sur place, un kilo coûte moins de 20 centimes. Mais une fois conditionné et distribué dans les épiceries fines d’Europe ou des États-Unis, il peut atteindre 15 à 30 € le kilo, selon le packaging, l’origine certifiée et le discours marketing.Certaines entreprises occidentales ont même tenté d’obtenir l’exclusivité d’exploitation ou de distribution de blocs entiers de sel rose, provoquant un débat au Pakistan sur la nécessité de reprendre le contrôle économique de cette ressource nationale.Ce sel est donc aussi un symbole : celui d’un artisanat ancien devenu produit de luxe mondialisé, au carrefour entre tradition, géopolitique et marketing.
Où en trouver ? Le sel rose se trouve désormais un peu partout, mais tous les produits ne se valent pas. Certains sont de simple sel de Chine teinté (oui, ça existe). Pour éviter les arnaques, voici quelques adresses sûres et testées :À Paris :• Velan (quartier indien, Passage Brady) : bon choix de sels et épices d’import direct, souvent à bon prix.• Le Comptoir Colonial (rue Lepic) : version haut de gamme, conditionnement raffiné.• Terre Exotique (disponible chez Lafayette Gourmet ou La Grande Épicerie) : belles sélections, traçabilité soignée.En ligne :• Épices Shira : boutique sérieuse, gros et petit conditionnement, livraison rapide.• Épices du Monde : large gamme, y compris plaques à cuire en sel rose.• Pakmarket.fr : directement importé du Pakistan, conditionnement simple mais efficace.Tarifs indicatifs :• Moulin de 100 g : entre 3 et 7 €• Sachet d’1 kg en vrac : 4 à 10 €• Bloc de cuisson : de 20 à 60 € selon la taille• Lampe décorative : entre 25 et 80 €

Le sel rose dans tous ses états : insolite, arty et gastronomiquePour les curieux et les passionnés, le sel rose de l’Himalaya réserve aussi son lot d’anecdotes étonnantes. Le Pakistan a notamment édité une série spéciale de timbres à l’effigie de la mine de Khewra, symbole national et fierté minérale. Un musée du sel y a même vu le jour, avec des reconstitutions miniatures des anciennes galeries. Et l’expérience peut devenir immersive : on peut passer la nuit dans un hôtel troglodyte, ou séjourner dans un centre de soins souterrain à 300 mètres de profondeur, conçu pour soulager les pathologies respiratoires. Côté objets, le sel rose inspire les artisans locaux qui sculptent des statues, cendriers ou mortiers dans ces blocs naturellement colorés. Les lampes les plus efficaces restent celles taillées dans un bloc brut, sans LED intégrée. Enfin, en cuisine, certaines tables étoilées utilisent des plaques entières de sel rose comme surface de cuisson, parfaites pour des gambas snackées, des sashimis ou même pour tempérer du chocolat. Un cristal à la fois décoratif, fonctionnel et… plein de surprises.
Le sel rose de l’Himalaya est un vrai produit du terroir… pakistanais. Il séduit par sa beauté brute, sa pureté relative et sa polyvalence en cuisine ou en déco. C’est un produit authentique, ancien, parfois victime de son succès, mais qui continue de faire rêver. Un mythe ? Oui, un peu. Un trésor ? Peut-être. Mais un phénomène culturel et économique, sans aucun doute.