
L’équipe Safran est en pleine réflexion : faut-il construire un nouveau bateau ou adapter l’existant à la nouvelle jauge IMOCA ? Nous avons rencontré Marc Guillemot à Lausanne lors de la remise des prix du championnat du monde.
Figaro Nautisme : Que pensez-vous de la nouvelle jauge IMOCA ?
Il était bien d’imposer un mode de fabrication des quilles mais je pense que la standardisation des mâts était une erreur. Cela signifie un poids supplémentaire et cela impose une structure de bateau. Nos voiliers deviendront donc des monotypes qui ne portent pas leur nom. Personnellement, je n’étais absolument pas favorable mais désormais c’est voté donc il faut l’accepter.
La modification de la jauge a été pensée pour réduire les coûts. Qu’en pensez-vous ?
Comme on ne sait pas encore ce que seront et les quilles et les mâts, on ne peut pas encore parler de baisse de coûts. Ce qui est certain c’est que comme les recherches vont se centrer uniquement sur les coques et les appendices, on peut imaginer que cela va coûter de l’argent car les bassins de carène coûtent plus cher. Et quand on a peu de marge d’innovation, il faut mettre beaucoup d’argent pour essayer de gagner ce qu’il est possible de gagner. Donc si c’est pour un problème de gain de coût, est-ce qu’on a pris la bonne direction ? On le saura plus tard, avec la construction des nouveaux bateaux. Mais j’ai peur que ces changements retardent les constructions de nouveaux bateaux. Pour démarrer en premier dans un nouveau concept, il ne faut pas avoir la frilosité de se planter. Déjà qu’il n’y avait pas 50 000 projets en cours pour la construction d’un bateau neuf…
Qu’envisagez-vous ?
Nous faisions partie des teams qui avions envisagé de lancer un bateau mais aujourd’hui nous ne savons plus. Nous sommes dans une phase de réflexion et les décisions seront prises dans le mois qui vient. Ce qui est certain, c’est que Safran sera au départ de la Transat Jacques Vabre, le 3 novembre prochain au Havre.
Vous serez sur la ligne de départ avec Pascal Bidegorry. Pourquoi avez-vous choisi ce duo ?
Pascal, qui a navigué avec nous pendant toute la saison 2012, est très intéressé par la série IMOCA. Il a le Vendée Globe en ligne de mire. En navigation, nous avons des caractères compatibles. Nous avons fait beaucoup de multicoque donc nous avons une même vision globale de ce type de bateau. C’est un marin très exigeant au nouveau de la performance et le fait de l’avoir à bord va imposer de ne pas lâcher le rythme. Je dois gérer une équipe, un projet, mais avec lui je ne pourrai pas avoir l’esprit sur d’autres sujets que la performance.
La ligne d’arrivée de la Transat Jacques Vabre est cette année à Itajai. Que pensez-vous du parcours ?
Jusqu’à Bahia, nous serons sur le parcours du Vendée Globe puis nous partirons en phase de découverte puisque ni Pascal ni moi ne connaissons Itajai. Les routes qui vont au soleil ne sont pas forcément les plus faciles, nous allons passer dans des secteurs d’alizés, au portant, une allure exigeante, fatigante, qui nous oblige à rester collé à la barre. C’est souvent stressant. Il y a également le passage du Pot-au-noir qu’il faut travailler en amont pour optimiser cette traversée.
Quel a été votre passage du Pot–au-noir le plus compliqué ?
La remontée lors du Vendée Globe 2008-2009 car j’avais de gros problèmes de voilures. J’étais sous-toilé et j’ai passé le Pot-au-noir avec une grand voile et trois ris. Le passage était difficile, poussif, et à certains moments je me suis demandé si j'allais arriver à le passer un jour !
Pensez-vous au Vendée Globe 2016 ?
Mon boulot aujourd’hui c’est de tout faire pour qu’il y ait un bateau Safran sur la ligne de départ. Les décisions seront prises dans les mois qui viennent. Mais il faut qu’on y arrive !