
En traversée ou au mouillage, en solitaire ou en équipage, un Noël en mer a toujours une saveur particulière.
« 25 décembre. 12 h TU. Le GPS donne la position 00°00’00. » Roger et Nicole se souviendront longtemps du Noël 2011 à bord de leur Bavaria 44. Ils sont au beau milieu de l’Atlantique et viennent de franchir l’équateur. Passer dans l’hémisphère sud est pour eux le plus beau des cadeaux. Avec en prime, un troupeau de dauphins jouant à saute-mouton autour du bateau. « Être sous les tropiques et avoir du mal à se convaincre que c’est Noël ne nous a pas empêché de le fêter dignement », raconte de son côté Hervé Nieutin qui a navigué un an dans les Caraïbes avec sa femme et ses trois enfants à bord d’un Nautitech 395. « À la fin du repas, les petits étaient au comble de l’excitation. Même les grands ont fait semblant de croire aux balivernes des parents : le père Noël descendra par le mât puis se glissera par un panneau de pont pour déposer les jouets. Bien sûr, il manquait la neige, le froid et le feu dans la cheminée. Les gamins ont pourtant eu dans les yeux cette étincelle typique de la magie de Noël. »
Des cadeaux dissimulés en douce
Lors du précédent Noël, sur le Vendée Globe 2012-2013, les marins ont également tenu à conserver une part de magie. C’est le moment d’ouvrir les cadeaux dissimulés en douce par la famille avant le départ et d’améliorer le menu du bord, avec du chocolat, voire un quart de champagne. Puis de se filmer avec un bonnet de père Noël sur la tête. Mais en course en solitaire, il n'est pas toujours possible de le fêter le jour J. Jean Le Cam, skipper de Synerciel, s'est ainsi offert un bon repas avec du ris de veau le… 23 décembre : « C’était ma dernière opportunité avant que le vent ne monte trop » a-t-il expliqué. D'autre part, les marins étant dispersés de part et d'autre de l'antiméridien, ils n'ont pas tous fêté Noël au même moment. Comme les concurrents du Vendée Globe, Bernard Moitessier naviguait également dans les mers du sud pour Noël, lors de sa première course en solitaire autour du monde. Mais il navigue alors sur une mer plate et sans un souffle de vent. Il raconte dans la Longue Route qu’il s’imagine arriver en Nouvelle-Zélande où il croiserait un yacht et inviterait ses occupants à venir partagerchampagne et vins français à bord de Joshua. « On se raconte des petites histoires quand on est seul en mer », écrit-il. Mais le naturel philosophique du navigateur reprend vite le dessus : « Il y a une grande paix tout autour. Je passerai le réveillon bien tranquille en compagnie des étoiles. »
Le père Noël hélitreuillé
Rien à voir avec les cérémonies organisées à bord des bâtiments de la Marine nationale, réputée festive dans ces grandes occasions. C’est ainsi que le 24 décembre 2010, en plein Golfe arabo-persique, le père Noël a débarqué sur la frégate Aconit en descendant du ciel : il était suspendu par un filin à un hélicoptère de la Royale ! Détail surprenant, il portait des palmes et un masque. « Avant de distribuer les cadeaux, il nous a expliqué que ses rennes n’avaient pas supporté la chaleur de l’océan Indien », se souvient Jean-Louis, alors aide-mécanicien du bord.
Mais les plus belles fêtes de Noël, témoins de la solidarité des gens de mer, avaient lieu chez les pêcheurs. En campagne du côté de l’Irlande, ils stoppaient les bateaux dans la nuit du 24 décembre, se souvient Jean, qui tient cette histoire de son grand-père. « Ils se mettaient au travers, moteur stoppé, moteur auxiliaire en route pour avoir de l’électricité, raconte-t-il. Une guirlande décorait la porte de la cambuse et chacun s’attablait pour le festin : huîtres, pinces de crabe mayonnaise, dinde aux marrons, bûche et champagne offert par l’avitailleur… Après le repas, les bateaux choisissaient la même fréquence radio et tous les marins se rassemblaient à la passerelle pour chanter des cantiques de Noël jusqu’à tard dans la nuit.» Le lendemain, le branle-bas était souvent quelque peu difficile. Mais le chalut était à nouveau mis à l’eau.
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