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Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre rôle concernant l'économie maritime au sein de l'Assemblée Nationale ? « Je siège à la Commission Développement Durable et Aménagement du Territoire. Le premier rapport qui est sorti au sein de notre Commission est l’évaluation de la loi sur l'économie bleue. Au début, il y a deux ans et demi, il n’y avait pas forcément beaucoup de volontaires et pour ma part, venant d’une circonscription littorale, je me suis sentie concernée par l’économie bleue et je me suis portée volontaire. J’ai été nommé co-rapporteur, nous étions deux, du rapport de la loi sur l'économie bleue. Ce rapport est paru et a fait l’objet de 56 propositions. Suite à cela, il m’est apparu assez inconcevable de s’arrêter là, afin de continuer à suivre les problématiques du monde maritime. J’ai donc mis en place la Team maritime. Il s’agit d’un groupe de travail, avec plusieurs de mes collègues députés, qui ne sont pas forcément de ma Commission mais celle des Finances, de la Défense, etc. Nous avons un rendez-vous hebdomadaire incontournable « les mercredis de la Team » : nous accueillons chaque mercredi à l’Assemblée Nationale un acteur de l’économie maritime, et notre agenda est bien rempli jusqu’à l’année prochaine ! Le but est soit de découvrir une activité ou une entreprise que nous ne connaissons pas, ou de rencontrer un acteur avec un problème spécifique dont il vient nous faire part afin que nous puissions lui apporter notre soutien, et faire le lien avec les ministères si besoin.
Nous organisons aussi énormément de colloques. Les deux derniers, qui ont bien entendu été reportés, concernaient la formation et l’emploi, ainsi que la propulsion vélique (le transport à la voile). Dernier projet mis en place l’année dernière : la Fête de la Mer et des Littoraux, qui a été un succès puisqu’elle a réuni plus de 300 évènements en France métropolitaine et territoires ultramarins. La deuxième édition de juin a été annulée mais j’espère, peut-être, organisée une fête un peu différente fin août… La SNSM, partenaire de cet événement, devrait tout de même organiser sa journée nationale fin juin. »
Comment réalisez-vous vos rapports ? « Nous avons commencé les auditions le 8 avril dernier, pendant une semaine, ce qui a donné lieu au premier rapport intitulé « Mayday, l’appel de détresse des entreprises de l’économie bleue ». L’idée était de faire un constat de l’économie des entreprises maritimes pendant le confinement. Il y a eu ensuite un deuxième rapport, qui vient d’être publié « 11 mai 2020, le D-day du déconfinement maritime », dont les auditions ont eu lieu du 15 au 28 avril. Enfin, il y aura un troisième rapport pour lequel les auditions commenceront le 18 mai prochain. Ce sera à nouveau tous les acteurs déjà auditionnés pour refaire un point sur la première semaine de déconfinement et sur l’après. L’axe principal sera la construction du développement durable de l’économie maritime. »
Quels constats pouvez-vous tirer de ces deux premiers rapports ? « Le premier rapport a permis de dresser un premier bilan économique et de lancer un appel de détresse pour ces différents secteurs : transport maritime et activités portuaires, construction navale, pêche, plaisance et yachting. Pour le deuxième rapport nous avons mis l’accent sur les volets social et environnemental, avec les ONG du maritime, les acteurs des énergies marines et de la transition énergétique, ainsi que les organisations syndicales. Ceci était un avant-propos à la sortie de crise. Quant au troisième rapport, l’idée est de tracer les contours d’un plan de relance et de recenser une première série de mesures dans toutes les filières du maritime, pour une relance vertueuse, pour que le jour d’après ne ressemble pas au jour d’avant. Les résultats de cette troisième concertation seront publiés fin mai et transmis au cabinet du Premier Ministre et au Président de la République. »
L'environnement est au coeur des réflexions ? « Lors des dernières consultations, les ONG nous ont alertés par rapport à la pollution plastique avec tous nos matériels de protection ainsi que sur la notion d’éco-conditionnalité. Notre Commission a déposé un amendement qui a été voté sur cela car on ne peut plus envisager des subventions de l’Etat sans cette éco-conditionnalité : tout soutien de l’Etat à un projet doit être conditionné par l’environnement, et que l’économie maritime soit de plus en plus vertueuse avec par exemple l’utilisation de matériaux durables dans la construction navale. Nous avons également auditionné les acteurs de la propulsion vélique, et je crois qu’il s’agit vraiment d’une filière d’avenir en France. Il y a une réelle opportunité de prendre le leadership à l’échelle européenne, voire mondiale. »
Par rapport aux croisières, il y a une difficulté par rapport au modèle que l’on connaît, avec de très gros bateaux. La crise a été extrêmement douloureuse et donc il va falloir repenser la croisière. J’ai discuté avec Jean-Emmanuel Sauvée, président d’Armateurs de France et de la compagnie de croisière Ponant, et il commence déjà à réfléchir là-dessus : quel nouveau voyage peut-on inventer ? Il va falloir trouver des solutions car la construction de ces grands paquebots est très importante pour les chantiers navals donc il faut trouver d’autres solutions pour pouvoir allier économie et écologie. »
Et concernant la plaisance ? « Quant à la plaisance, il faut la repenser également. Cela fait partie de la réflexion qu’ont aujourd’hui les acteurs de la plaisance. J’entends l’envie des plaisanciers de repartir à l’eau et c’est normal. Mais il va falloir jouer le jeu et réussir à concilier la protection de l’environnement et une plaisance peut-être différente. Ces réflexions feront partie de la troisième proposition, à partir du 18 mai, à savoir quelles propositions et quelles solutions ces acteurs vont pouvoir nous apporter. Et ils en ont énormément ! Il va falloir que cette crise serve à quelque chose… mais s’il y a déjà de belles initiatives, comme le zéro déchets dans les ports, je pense que l’ont peut aller encore plus loin. »
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« La communauté maritime est extrêmement soudée et solidaire, prête pour le jour d’après. Je suis assez confiante sur le troisième rapport et je pense que nous pourrons faire des propositions vraiment intéressantes au gouvernement. »
Appel à contribution pour la plaisance et le yachting : contactez Sophie Panonacle Sophie.Panonacle@assemblee-nationale.fr.