Transat Jacques Vabre 2023 : deux tempêtes… et ça repart !

Par Figaronautisme.com

Demain, lundi, sera un deuxième grand jour pour les flottes de six Ocean Fifty et de 40 Class40 qui ont rendez-vous dans le courreaux de Groix au large de Lorient pour reprendre tour à tour, à 10h30 puis 10h45, le fil de leur course, huit jours après leur premier départ du Havre. Après leur escale forcée pour laisser passer les deux violentes tempêtes qui ont balayé la façade atlantique, 92 marins sont attendus demain pour s’élancer à nouveau sur les routes qui mènent à la Martinique, après avoir déjà parcouru 300 milles au départ de la baie de Seine pour se mettre à l’abri.

Au total :  4 500 milles pour les Ocean Fifty, 4 050 pour les Class40

Les trimarans devront d’abord rallier une marque virtuelle dans le Nord de l’archipel du Cap Vert, dont ils éviteront les dévents, pour un parcours depuis Lorient d’environ 4 200 milles (7 778 km).  Quant aux plus petits monocoques, c’est pour rejoindre d’abord l’île de Porto Santo à laisser à tribord, au Nord de l’archipel de Madère, qu’ils mettront les voiles. Devant leurs étraves : 3 750 milles (6 945 km) ; et  la promesse de disputer une transat rythmée par les alizés, dans la plus pure tradition de la Route du café.

Ce dimanche matin, il flottait à Lorient La Base une certaine solennité ; celle qui sied aux veillées d’armes des grands départs pour une course transatlantique. Mais, dans le ciel de traîne, où de franches éclaircies et de copieuses averses se succédaient, elle était aussi empreinte d’une sincère convivialité. Celle nourrie par cette escale lorientaise inédite, dans le cadre de cette Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre qui a su se mettre au diapason d’une impitoyable météo automnale pour préserver l’intégrité d’une flotte hétéroclite et multiclasse. D’un bout à l’autre du ponton, l’impatience de rentrer à nouveau dans le vif de la compétition océanique l’emporte pour les skippers engagés en Ocean Fifty et Class40.

Un nouveau départ, au propre et figuré, pour Crédit Mutuel et Seafrigo-Sogestran

Elle l’est d’autant plus pour le duo de Crédit Mutuel, victime d’un démâtage, qui a relevé le défi de mener une opération commando pour équiper son Class40 d’un nouveau gréement. Bien qu’ils écopent d’une pénalité de 6 heures ajoutées au temps de course du dernier bateau arrivé à Lorient, c’est avec la ferme intention de se faire une belle place au soleil à l’arrivée en Martinique que Ian Lipinski et Antoine Carpentier -  quatre victoires sur la course cumulées à eux deux -, s’apprêtent à remettre les voiles.

Quant à Cédric Chateau et Guillaume Pirouelle, dont le bateau a connu de gros dégâts lors d'un accrochage en baie de Seine, ils ne font pas mystère de leur immense satisfaction d’être au rendez-vous de Lorient. Non seulement, ils sont parvenus à remettre leur Seafrigo-Sogestran, en état de courir. Mais, c’est aussi avec la garantie de pouvoir jouer le classement final qu’ils s’apprêtent à se mêler à la flotte, puisqu’ils bénéficient d’une compensation accordée  par le jury suite à ce malheureux fait de course.

Privés de la possibilité de disputer la première étape, leur temps de course au terme du premier tronçon sera déterminé en fonction de leur place à l’issue de la deuxième étape au départ de Lorient. En effet, ils hériteront du temps de course correspondant à leur place à Fort-de-France . Ainsi, s’ils terminent xème du second tronçon, ils prendront pour la première étape le temps de course du xème à Lorient.  « Nous sommes dans le même état d’esprit que dimanche dernier et les jours qui ont suivis, combatifs. Malgré le peu d’occasions données de naviguer ensemble sur cette superbe machine, nous avons la ferme intention de saisir toutes les opportunités sur cette deuxième étape », confie Cédric, soulagé et pressé d’y aller après cette mésaventure qui l’a fait passer par une large palette d’émotions.

Quid de Dékuple et de Rêve à Perte du Vue ?

Pour deux équipages, le doute persiste encore sur leur faculté à franchir aussi cette deuxième ligne de départ, qui reste ouverte 72 heures. C’est le cas du tandem de Dékuple (Mathelin-Moreaux-Luciani), toujours occupé à réparer un problème structurel. Il en est de même pour le duo de Rêve à Perte de Vue (Paris-Ragimbeau), toujours en escale au Havre. Ces quatre co-skippers ont néanmoins jusqu’à jeudi, 10h45, pour rejoindre aussi  les chemins menant à la Martinique depuis les courreaux de Groix. Mais il ne leur faudra pas tarder pour s’élancer aux trousses des 40 autres bateaux de la Class40. Ceux-ci  partiront  demain dans des conditions soutenues, mais néanmoins maniables, promettant de vite prendre un tour plus stratégique avec le passage de plusieurs phénomènes ne facilitant pas la grande descente vers les alizés…

Les impressions au ponton de Lorient La Base

Basile Bourgnon (Endered), Class40

«  C’est presque un nouveau départ vers la destination qu’on attend, même si ça fait un peu bizarre de rentrer chez soi au milieu d’une course. On a ramené le bateau à Lorient dans  l’état dans lequel on le voulait au terme du premier tronçon.  On n’est pas très loin derrière les premiers. On est toujours mobilisés, bien attentifs à l’évolution de la météo, avec début de course assez compliqué en termes stratégiques avec des des phénomènes qui peuvent créer des écarts. Les fichiers ne sont pas très raccords les uns avec les autres.

Même si on n’a plus peur du vent maintenant, le début va être assez rapide, ce qui n’est pas plus mal, parce qu’on n’aime pas rester longtemps dans le golfe de Gascogne. On aura du vent de travers les premières 24 heures pour un passage au cap Finisterre après 48 heures de course environ. Mais on est prêts, on n’a plus que le frais à ajouter à notre avitaillement qu’on prévoit pour 14 jours. »

Fabrice Cahierc (RÉALITÉS), Ocean Fifty  : «  On est  parti du Havre en configuration « safe » avant de lâcher les chevaux. Mais le bateau est arrivé à Lorient, complètement sain et sauf, sans dégâts à bord. C’est super satisfaisant ! Au début de ce retour en course, il va falloir se méfier, il  y aura des grains, et il ne faudra pas traîner pour éviter la dépression qui arrive. Ce sera assez schizophrénique comme début. Il faudra à la fois être rapides et très prudents, avec potentiellement des bonnes rafales et surtout des vagues et beaucoup de mer.  Après 24-48 heures, on devrait être sortis des ronces. Mais la course va aussi prendre très rapidement un tour très  tactique. On va traverser une dorsale, des molles, dans des conditions plutôt favorables pour le bateau, très à l’aise dans les airs médium à faibles. »

Aurélien Ducroz (Crosscall), Class40  : «  Cette fois, ça y est, on va partir pour faire de la Transat Jacques Vabre. Cela fait plaisir, parce que ça reste un peu bizarre de prendre deux départs. Cela demande à chaque fois un peu d’énergie. Se remobiliser pour repartir, c'est à chaque fois un petit exercice. Il y a une jolie fenêtre météo à exploiter. Il y aura du vent et surtout de la mer le premier jour de course avec ensuite un passage de front au niveau du cap Finisterre, mais qui est un peu moins violent qu’il ne l’était encore hier. Les conditions restent correctes  pour partir, même si ce sera costaud. »

Quentin Vlamynck (Solidaires en Peloton), Ocean Fifty  : « La météo n’est pas que simple, même si le golfe de Gascogne s’annonce un peu plus sage que celui auquel on aurait eu droit au départ du Havre. Mais il y aura un peu de vent, des grains à passer. Et la suite, on verra mieux demain matin et les jours qui viennent avec nos routeurs. On y va étape par étape. Pendant cette escale, on a eu la chance de pouvoir continuer notre préparation, régler les petits soucis, et améliorer encore le bateau. On profite de ce beau dimanche ensoleillé pour finir nos sacs et de tout préparer. Même si on a un peu d’avance, on va faire en sorte d’arriver les premiers en Martinique pour ne pas avoir à calculer. C’est un petit avantage plus psychologique qu’autre chose. Il y avait beaucoup de risques de casse sur la première étape. Là, avec moins de vent annoncé, cela devrait rehausser le niveau de jeu global. »

Axel Trehin (Project Rescue Ocean), Class40 : «  C’est parti, on est prêts, tout est en place à bord. On aura 4-5 mètres de mer demain, mais ce sera au travers, et ensuite il y aura une zone de transition la première nuit, où ça risque de tomber un peu. L’objectif sera d’aller le plus vite possible vers le cap Finisterre, notamment vis à vis du passage d’un front qui risque d’être plus compliqué. Mais on repart à zéro, les écarts restent très faibles dans un sens comme dans l’autre. Le but du jeu reste d’aller le plus vite possible, et d'arriver avant les autres en Martinique. La marque de Madère change la physionomie de la course. Elle va la rallonger un peu, mais la rendre plus courte à vivre. Par les Açores, on aurait enchaîné les dépressions au près. Alors qu’au portant, au soleil, à faire des grandes glissades, cela ressemblera plus à la Route du café ! » 

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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