"Il faut être un peu téméraire pour se lancer dans une telle aventure!" Etienne Garcia, commandant du Soléal, premier navire de croisière français à avoir franchi, cette semaine, le passage du Nord-Ouest, dans l'Arctique, témoigne de la "difficulté" d'une route rendue possible par la fonte des glaces.
Parti de Kangerlussuaq, au Groenland, le 26 août, le navire de 142 mètres de long et 18 de large, avec à son bord 215 passagers et près de 150 membres d'équipage, était attendu lundi à Anadyr, en Russie, dernière escale de ce périple de luxe.
L'expédition polaire a rejoint l'océan Pacifique en huit jours, entre le 2 et le 10 septembre, sans assistance, suivant au plus près la route ouverte en 1906 par l'explorateur norvégien Roald Amundsen (1872-1928). Le passage du Nord-Ouest -convoité, comme son pendant à l'Est, au nord de la Russie, par nombre d'armateurs désireux de raccourcir le temps de trajet de leurs navires- est désormais praticable pendant quelques semaines durant l'été arctique en raison de la fonte des glaces.
Mais le commandant Garcia, qui a conduit le paquebot le long d'une périlleuse route vers l'ouest, estime que la navigation dans cette zone du globe reste "difficile", et ce malgré des "bateaux et des instruments de navigation de plus en plus performants". "Je ne pense pas qu'on ait ouvert une voie, car il faut être un peu téméraire pour se lancer dans une telle aventure!", avoue-t-il. "Pendant plusieurs heures, nous avons vraiment navigué au ras, entre la banquise en train de se refermer et la terre", évoque-t-il. "Dans des endroits très étroits, on a parfois eu quatre petits mètres sous la quille", assure-t-il, reconnaissant avoir parfois eu "un peu la boule au ventre", notamment lorsqu'il s'est aperçu que sa voie était fermée par la glace.
Le commandant ne cache néanmoins pas sa joie d'avoir au final réussi à emprunter la même route qu'Amundsen. "Ça a été un voyage fabuleux et on a un peu de mal à réaliser qu'on a vécu une telle aventure!" Une aventure d'autant plus unique que la Compagnie du Ponant, seul armateur Français à posséder trois navires proposant des croisières polaires, laisse une grande autonomie au commandant.
"J'ai carte blanche de ma compagnie et ça c'est vraiment du pain bénit. Je crois qu'on doit être la dernière compagnie ou ça se passe comme ça", se réjouit le chef de bord, qui, malgré ses années d'expérience, estime avoir réalisé "un vrai voyage nautique, une expédition maritime" bien loin de l'image de la "Croisière s'amuse", pour des passagers qui se sont acquittés d'au minimum 10.000 euros pour cette expérience.