Dans cette affaire rendue par la Cour de cassation, alors que son navire était amarré dans un port, son propriétaire a jeté à l'eau un réchaud à gaz qui avait pris feu à bord pour une cause indéterminée. Le réchaud a coulé à pic avant que la nappe de gaz enflammé s'en échappant ait progressé jusqu'à un navire voisin et en a endommagé la coque composée de polyester stratifié.
Le propriétaire du navire faisait valoir que le fait que des bulles de gaz se soient échappées de son réchaud lorsqu'il l'a jeté à l'eau et se soient enflammées à la surface constituait un événement fortuit de sorte qu'aucune faute ne lui était imputable.
L'assureur du navire endommagé soulevait plusieurs éléments sur le fondement notamment de l'article 1242 du Code civil qui énonce :
"celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable."
- Il est indifférent que le feu ne se soit pas propagé de bateau à bateau mais procède de ce que le propriétaire a jeté le réchaud à la mer et que la nappe de gaz enflammé s'en échappant a progressé jusqu'au bateau voisin. En conséquence, il existe une relation directe et certaine, sans autre source d'inflammation entre cet incendie et les dommages subis par le bateau voisin
- La circonstance que le réchaud ait été jeté à la mer est impropre à faire perdre la garde de celui-ci par le propriétaire
- Le fait de jeter par-dessus bord, dans un port et à proximité d'autres bateaux un réchaud dont s'échappait du gaz enflammé constitue indubitablement une imprudence. En effet, pour tenter d'éteindre l'incendie à bord de son voilier en aluminium, le propriétaire a pris le risque de lancer son réchaud en feu à la mer alors que se trouvait à proximité un navire dont la coque était composée de polyester stratifié. Il aurait été plus avisé d'utiliser les extincteurs dont il disposait à bord de son navire. Cette imprudence mettant enjeu la sécurité des autres navires au port, constitue un comportement fautif engageant sa responsabilité ce qu'il a par ailleurs spontanément admis dans son rapport de mer.
Au contraire, la Haute Juridiction a considéré que les faits relevaient d'un événement fortuit.
Le réchaud ayant pris feu pour une cause indéterminé et le fait pour le propriétaire de le jeter à la mer ne pouvait caractériser une faute d'imprudence puisque qu'il ne pouvait lui être reproché d'avoir jeté son réchaud enflammé dans la mer par nécessité sans avoir pu prévoir qu'une nappe de gaz enflammée s'en échapperait et se propagerait jusqu'au bateau voisin.