La Gambie cherche à réinventer son tourisme, au-delà des Britanniques et du Covid

Par Figaronautisme.com

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Face à l'océan, Malleh Sallah, patron d'un hôtel de luxe, ouvre les bras comme pour embrasser le paysage somptueux: "Voilà une plage caractéristique de la Gambie. Avant le Covid, elle était pleine".

Les convertibles en plastique blanc sous les palmiers et les parasols en paille sont vides. Pourtant au Tamala, établissement quatre étoiles près de Banjul, et ailleurs en Gambie, la saison touristique est lancée depuis octobre.

Seuls un producteur ivoirien et son artiste, ainsi qu'un couple qui passe ses dernières heures ici avant de rentrer aux Pays-Bas "où ça gèle" apprécient la vue. Il faut s'éloigner de la plage vers le restaurant et la piscine, pour trouver plus de monde.

Des Néerlandais, des Africains, l'avenir est peut-être là. L'industrie touristique gambienne veut rompre avec sa dépendance aux charters de Britanniques attirés par le "sea, sun and sand" (mer, soleil et sable) et la modicité des prix.

Elle entend attirer une clientèle venue d'ailleurs en Europe, mais aussi d'Afrique, voire de Gambie même, amateurs d'oisiveté ou hommes d'affaires.

"Nous étions trop concentrés sur le marché européen et négligions la sous-région", dit Adama Njie, directeur marketing du Gambia Tourism Board, l'office national, "nous misons beaucoup en ce moment sur le marché de la sous-région et le tourisme gambien".

Consciente de sa vulnérabilité, la Gambie avait déjà entrepris, avant la pandémie, de diversifier sa clientèle.

Le virus l'a prise de vitesse et a durement frappé le tourisme du petit pays, surnommé avec ses 80 km de rivages et de plages immenses sur l'Atlantique, la "côte souriante" de l'Afrique.

Le ministre du Tourisme Hamat Bah chiffrait en 2019 à 30% la part directe et indirecte du tourisme dans le PIB. Les institutions internationales l'évaluent aux alentours de 20%, une manne pour un pays pauvre de deux millions d'habitants qui tire principalement ses autres revenus de l'agriculture et des virements de la diaspora.

Pertes colossales

En 2019, la Gambie s'était démenée pour surmonter la faillite de Thomas Cook, survenue juste avant le début de la saison pendant laquelle le voyagiste britannique déversait presque quotidiennement des centaines de visiteurs.

Avec le Covid en 2020, "tout s'est arrêté du jour au lendemain", se souvient Malleh Sallah, copropriétaire musculeux du Tamala, un fleuron du parc hôtelier avec ses 140 chambres et ses prestations haut-de-gamme.

"Nous avons perdu des milliards de dalasis (100 dalasis = 1,6 euro), plus de 200.000 emplois, directs ou indirects, ce qui a causé des problèmes sociaux; on a vu apparaître une délinquance que nous ne connaissions pas", dit à l'AFP le ministre du Tourisme.

Les arrivées de touristes ont chuté de plus de 235.000 en 2019 à moins de 90.000 en 2020, 19% des affaires ont fermé et après des années de croissance, la Gambie a subi la récession, selon le Fonds monétaire international; 25.000 personnes supplémentaires ont basculé dans l'extrême pauvreté, près d'1% de la population.

"L'an dernier à la même époque, l'industrie hôtelière était morte", dit Malleh Sallah, copropriétaire de cinq hôtels: sur le millier d'employés du Djeliba Leisure Group, seuls 250 ont gardé leur travail.

Trois des établissements du Djeliba Leisure Group, fermés pendant sept mois, ont rouvert. Habituellement complet en cette saison, le Tamala n'est occupé qu'à 70%. Globalement, l'activité représente 30% de ce qu'elle devrait être et de très nombreux établissements n'ont pas rouvert, affirme M. Njie, de l'office national.

Tournée vers l'Afrique

La Gambie s'est tournée vers l'Afrique: le voisin sénégalais, le géant nigérian, le Ghana.

Promouvant l'image de destination hospitalière et peu touchée par le Covid-19, elle cherche aussi à attirer à l'aéroport de Banjul plus de vols réguliers et moins de charters.

La récente desserte par Air France relie la Gambie à de grands marchés, comme les Etats-Unis. C'est la promesse d'un tourisme plus souple et plus dépensier que celui des tour-operateurs.

Le voyagiste allemand TUI "est petit à petit en train de remplacer Thomas Cook", dit Adama Njie. Les touristes néerlandais, et dans une moindre mesure allemands et scandinaves, commencent à supplanter les Britanniques, dit-il, même si ces derniers restent visibles sur les plages et dans les bars.

"Les touristes britanniques sont importants pour nous, mais ils ne sont plus les seuls sur lesquels nous comptons", dit le patron du Tamala, "en ce moment, 80% de nos chambres sont occupées par des gens de la sous-région".

Les derniers mois, avec la pandémie mais aussi la présidentielle en Gambie et le risque de troubles, ont montré que le marché européen était "très sensible".

"La nervosité est moins grande sur le marché intérieur ou régional, nous autres Africains sommes mieux immunisés aux évènements politiques et à certains de ces virus", plaisante-t-il.

M. Njie voit "des signes très positifs", mais "c'est la nouvelle norme: la suite des évènements nous sera dictée par ce que le Covid nous réserve".

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
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Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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