Il a dominé toute la Route du Rhum - Destination Guadeloupe, a gagné mille après mille sur ses concurrents, mais sans jamais parvenir à les décrocher complètement. Avec une avance qui varie de 60 à 80 milles au gré des pointages et des empannages, Charles Caudrelier ouvre toujours la voie vers la Tête à l’anglais qu’il pourrait atteindre en début de nuit, entre 22 h00 et 1h00 du matin, heure locale. Mais il n’a pas tué le match. Le contournement de la Guadeloupe se fera de nuit, le pire moment pour contrôler ses deux adversaires qui savent que tout reste possible.
Après son joli recalage dans les Açores qui lui avait permis de reprendre la main sur la course vendredi, c’est finalement dans le Sud de l’anticyclone que Charles Caudrelier a gagné le plus de milles sur ses adversaires. Dans cette bataille d’empannages, le skipper du Maxi Edmond de Rothschild s’est montré véloce « Il a quatre ans d’avance sur nous. C’est Gitana qui a initié le vol et a poussé tout le collectif dans cette voie. Il démontre aujourd’hui son avance » disait hier Thomas Coville, troisième, qui pointait à 168 milles du leader au classement de midi (heure française).
Navigant plus vite et plus bas que ses adversaires, le Maxi Edmond de Rothschild a vu son avance culminer à110 milles sur SVR Lazartigue avant de se lancer sur le dernier grand bord bâbord amures vers la Guadeloupe. Mais ce matin, à l’occasion d’un nouveau recalage (deux empannages) pour réduire l’écart latéral avec Gabart ou négocier un nuage, Caudrelier voyait son avance réduite à 69 milles. Il a depuis repris une quinzaine de milles à son adversaire direct mais ces variations montrent bien que la partie n’est pas gagnée.
Dans un alizé modéré, chacun va soigner sa trajectoire qui ne se fera pas d’un trait dans un vent adonnant. L’atterrissage sur la Tête à l’Anglais, avant dernière marque de parcours avant la bouée de Basse Terre, à quelques encablures de l’arrivée, sonnera la fin de la bataille de l’Atlantique mais ne dira peut-être rien du verdict final. L’erreur ou l’aléa technique se paiera très cher sur ce dernier segment mais ce qui inquiète le plus Charles Caudrelier, « c’est le tour de la Guadeloupe confiait-il ce matin en vacation. _J’ai peur que François me fasse une Joyon, qu’il se venge de la dernière fois ! _» disait le leader non sans humour, clin d’oeil au finish d’anthologie de 2018.
Pour mémoire, François Gabart avait près de 150 milles d’avance en approche de la Tête à l’Anglais, fragile matelas qui avait fait pshitt dans la moiteur de la nuit guadeloupéenne,…
«_Sur nos bateaux, s’il te manque le moindre truc confirmait Thomas Coville, un flap de safran, une électrovanne de foil, tout s’arrête. Donc la seule façon de naviguer, c’est à fond jusqu’à la ligne _».
Et à 1700 milles de là, dans les parages des Açores qu’il vient de dépasser, Armel Le Cléac’h qui s’était programmé à ce genre de finish, notait quant à lui : « J’ai quand même l’impression que Charles a la pleine possession de son bateau ce qui n’était pas le cas de François il y a quatre ans. Mais c’est vrai que ça peut aller très vite et perdre 100 milles en 3 heures est possible. Tant que la ligne est pas franchie … »