600 milles à deux
Jean-Pierre Dick, toujours en tête des Rhum Mono sur cette Route du Rhum 2022, a débarqué Brieuc Maisonneuve aux Açores.
Il l’avait récupéré ce dimanche, suite au chavirage du catamaran de Brieuc, lui aussi en tête avant ce triste accident. Le JP54 « Notre Méditerranée - Ville de Nice » reprend sa course et Brieuc Maisonneuve va tenter de récupérer son bateau.
C’est une course en solitaire dont ils se souviendront certainement longtemps : voici près de 600 milles que les deux hommes partagent leurs vies à bord.
Jean-Pierre revient sur le sauvetage « Il ne fallait pas se rater. C’est quand Brieuc m’a dit depuis l’intérieur de sa coque à la VHF que j’étais sur son bâbord que j’ai pu le situer. Peu après, nous nous sommes regardés pour la première fois. Là, j’ai su que c’était le bon moment et qu’il fallait qu’il saute à l’eau. Je l’ai ensuite récupéré. »
Depuis, Brieuc, éprouvé physiquement par son chavirage puis son embarquement engagé – « Un excellent nageur ! », nous confie Jean-Pierre – a pu retrouver des forces et se concerter avec l’équipe de Jean-Pierre pour organiser une tentative de rapatriement de son catamaran retourné. Détail de taille, Brieuc nous informe quelques heures après que sa combinaison de survie s’était remplie d’eau.
Course contre la montre
La balise de localisation du multicoque de Brieuc n’émettra plus que pour quelques heures.
En parallèle, Jean-Pierre Dick, qui n’a pas eu le temps de sourciller, doit reprendre sa course pour accomplir sa volonté d’ajouter la Route du Rhum à son palmarès.
« J’espère que Brieuc et son équipe vont vite pouvoir se mettre à pied d’œuvre pour récupérer le bateau au plus vite, je sens que c’est important pour Brieuc » abonde Jean-Pierre, qui détaille ensuite ce qu’a été la traversée du front de vent fort nécessaire à l’atteinte du point de rendez-vous « Forcément, le bateau tape toujours autant, je m’attendais plutôt à être au calme dans les Alizés ! On a eu quelques frayeurs : un axe de mon hâle-bas a commencé à se détacher. Si je ne l’avais pas vérifié, j’aurais eu beaucoup de mal à résoudre ça »
Une traversée de deux jours agitée qui a permis aux deux hommes de faire connaissance : « J’étais un peu embêté, car je chausse du 46 mais Brieuc, lui, fait du 47, on ne trouvait pas de quoi le chausser ! » confesse Jean-Pierre après avoir réussi à exhumer un ensemble de cirés de ses années Vendée Globe. Et Brieuc Maisonneuve de reprendre « Jean-Pierre n’a pas volé sa réputation de Gentleman des Mers, je me sens bien accueilli. J’ai pu me remettre en forme et surtout travailler avec mon équipe pour tenter de sauver le projet. »
Toboggan en place
Trêve d’émotions, deux questions subsistent à ce jour :
• Jean-Pierre a-t-il raté le train d’Alizés qui l’aurait mené en Guadeloupe ?
• Comment le cas de Jean-Pierre va-t-il être compensé par la Direction de Course ?
À ce jeu-là, le Team Manager de Jean-Pierre Dick, Maxime Grimard, n’a pas chômé : « Nous avons été en relation permanente avec l’équipe de Brieuc, Christian Dumard qui nous accompagne sur la météo, et un ensemble de sympathisants des Açores qui se sont portés volontaires pour nous aider à organiser le débarquement. Il n’aura suffit que d’un bref passage au JP54 « Notre Méditerranée-Ville de Nice » à proximité des côtes des Açores pour déposer Brieuc. Jean-Pierre peut maintenant reprendre sa course et rattraper le flux d’Alizés encore établi à l’ouest. Il est bien placé » détaille-t-il avant de compléter « À ce stade, nous ne savons pas encore quelle compensation nous sera accordée. Nous avons fait une demande de redressement que le jury va étudier pour rendre une décision équitable. ».
En effet, Jean-Pierre devrait, comme cela s’est déjà produit sur d’autres épreuves, bénéficier d’une compensation en temps sur sa performance, qui prendra en compte la modification de sa trajectoire, l’état de ses stocks de nourriture ainsi que les éventuels impacts sur son bateau.
Ce qui est sûr, c’est que ces événements n’ont eu que peu d’influence sur les ambitions du marin Niçois « J’ai reçu beaucoup d’encouragements en ligne et de mes partenaires, j’ai envie d’accomplir ce pourquoi je suis venu. ».
Inéluctable séparation
C’est sur ces hypothèses que les deux hommes se sont séparés aujourd’hui : Brieuc Maisonneuve a embarqué à bord d’un semi-rigide dépêché par les équipes d’Adrien Hardy au large de Punta Delgada, aux Açores.
Pour lui, dirigeant d’entreprise reconverti qui avait tout investi dans ce projet Rhum Multi, une autre course commence : celle de tenter de localiser son bateau, puis, tous l’espèrent, de le sauver.
Jean-Pierre, fidèle à ses origines niçoises, n’a qu’un mot pour l’encourager : « Forza ! ».