Terminées les grandes chevauchées sur l’Atlantique avec records à la clé ! La flotte des IMOCA, à nouveau au complet - et rejointe par les VO65 qui disputeront les deux dernières étapes en Europe - dispute actuellement une étape de « seulement » 800 milles entre Aarhus (Danemark) et La Haye (Pays-Bas), via Kiel (Allemagne), mais truffée de pièges en tout genre. A cela s’ajoute une météo estivale et des vents erratiques.
Partie hier jeudi en fin de journée de Aarhus, à très faible allure, la flotte IMOCA progresse à petite vitesse vers Kiel où le public l’attend dans l’après-midi pour le fameux « fly-by », une marque à contourner avant de repartir au nord. Ce vendredi, après une première nuit dans du petit temps, 11th Hour Racing Team mène devant Holcim-PRB, Biotherm, GUYOT environnement – Team Europe et Team Malizia. Les cinq concurrents font route vers le sud et ne sont séparés que de 10 milles.
Les commandos
Décidément The Ocean Race n’est pas une course comme les autres. Après l’opération commando réalisée par le Team Holcim-PRB à Newport, suite à son démâtage au large du Brésil, c’est cette fois l’équipe GUYOT environnement - Team Europe qui, elle aussi victime du bris de son mât à quelques jours de l’arrivée sur la côte est américaine, a réussi l’exploit d’être sur la ligne de départ hier. « Rien n’est impossible. Seules les limites de nos esprits définissent certaines choses comme inconcevables… » aime à répéter le romancier français Marc Levy.
Benjamin Dutreux, skipper de l’ancien bateau d’Alex Thomson et son équipe viennent de le prouver en prenant le départ de cette sixième étape, après avoir ramené leur bateau d’Halifax, Canada, à Kiel en cargo, avant de le réparer et remâter. « Assembler toutes les pièces du puzzle en seulement cinq jours : voilà le pari qui a été tenu ! » savoure le Vendéen. « Cela a généré une adrénaline monstre chez chacun d’entre nous. La pression est un peu redescendue à notre arrivée à Aarhus, au terme du convoyage depuis Kiel qui s’est bien passé et qui nous a permis de valider le gros des travaux. »
Dans cette étape « côtière » où il faut louvoyer entre les plateformes pétrolières, les bancs de sable, les DST (Dispositifs de Séparation de Trafic) et de nombreux cargos, outre des courants violents, la présence à bord des deux Allemands Robert Stanjek, ancien vice-champion du monde de Star et Phillip Kasüske, champion du monde junior de Finn, qui connaissent également bien ces eaux, est un atout évident.
Franck Cammas en « guest star »
Charlie Enright, le skipper de 11th Hour Racing Team ne se refuse rien et sait manifestement s’entourer ! Après Charlie Dalin, double champion du monde IMOCA, l’insatiable Franck Cammas embarque sur le bateau américain, actuel leader au classement général. Entre deux sessions de navigation sur Charal 2 avec Jérémie Beyou, l’Aixois effectue une pige… « The Ocean Race me tient vraiment à cœur depuis notre victoire avec Groupama 4 en 2011-12. Je suis la course depuis le début et la montée en puissance de 11th Hour Racing Team. Je me suis entraîné avec eux à Lisbonne il y a deux ans lors des premières navigations du bateau. Je suis ravi de retourner à bord et d’en apprendre davantage sur les IMOCA en équipage. Être capable de pousser ces bateaux à 100 % est quelque chose que nous ne pouvons pas faire en double et je suis impressionné par la vitesse et la puissance des IMOCA. Partager nos différentes cultures et approches de la navigation est aussi toujours très intéressant et constructif » expliquait Franck Cammas quelques heures avant de larguer les amarres.
Turn over sur les cinq bateaux
Lors de cette courte étape où les IMOCA vont donc effectuer une virée à Kiel, haut lieu de la régate avec sa célèbre Kieler Woche (Semaine de Kiel), et où plusieurs milliers de plaisanciers et régatiers sont attendus cet après-midi pour encourager notamment Team Malizia, skippé par l’Allemand Boris Herrmann. Sur cette étape, des spécialistes de la Solitaire du Figaro ont été appelés en renfort. C’est par exemple le cas de Benjamin Schwartz, à bord de Holcim-PRB, accompagné de Yoann Richomme, double vainqueur de la Solitaire du Figaro et actuel skipper de l’IMOCA Paprec Arkéa en vue du Vendée Globe 2024, ou encore de Martin Le Pape.
Sur Biotherm skippé par Paul Meilhat, on note la présence d’Alan Roberts et d’Anthony Marchand, tous deux ayant disputé nombre de saisons sur le monotype. Un choix judicieux quand on sait que les minutes de sommeil seront rares. Pour sa sixième participation à The Ocean Race, le Britannique Simon Fisher, confirme : « En tant que navigateur, je ne m’attends pas à dormir beaucoup sur cette étape. Je vais devoir faire preuve d’intelligence pour me reposer lorsque nous naviguerons en ligne droite… car sur un bord de 20 milles à 20 nœuds de moyenne, c’est pile une heure de sommeil…»
Une météo vicieuse
C’est déjà l’été dans le nord de l’Europe. Les hautes pressions engendrent des vents de nord-est très faibles pour les IMOCA. L’imposant anticyclone au nord des îles Shetland devrait se décaler vers l’est, la Finlande puis l’Estonie ce vendredi 9 juin, mais les vents vont rester faibles et irréguliers le long des côtes. Il va falloir être patient et réactif sur les réglages.