Halte à l'orque : réagissons !, cinquième partie

Culture nautique

L’orque « ibérique » représente un danger pour la navigation des voiliers depuis trois ans de Brest à Tarifa. Ces animaux sauvages se sont habitués à ne pas être dissuadés de leur comportement nuisible à notre sécurité en mer. Quels sont les actions possibles ?

L’orque « ibérique » représente un danger pour la navigation des voiliers depuis trois ans de Brest à Tarifa. Ces animaux sauvages se sont habitués à ne pas être dissuadés de leur comportement nuisible à notre sécurité en mer. Quels sont les actions possibles ?

LA DEMARCHE ADMINISTRATIVE !

Et oui…et ça marche. Les autorités maritimes de Galice et d’Andalousie ont, à certaines époques, interdit la navigation dans les eaux territoriales qu’elles surveillent. C’était en en septembre 2020 pour les parages du Cap Finisterre sur près de 100 milles jusqu’à Estaca de Bares et concernait uniquement les voiliers de moins de 15 mètres. L’expert maritime venu de Cadiz constater les dégâts causés à PretAixte au chantier de Sotogrande nous a informé qu’au printemps dernier la navigation avait elle aussi été interdite entre Cadiz et Malaga.

Pas de proie, pas de dommage. Cette décision se justifie d’autant que l’orque est une espèce protégée, qui plus est la législation espagnole ne rigole pas du tout avec les dommages causés à ces carnassiers par les humains… Si vous voulez vraiment passer et vous défendre des attaquants, mieux vaut être dans les eaux internationales au risque d’avoir de gros soucis avec la justice ibère.

On peut même s’étonner que les compagnies d’assurance n’aient pas embrayé le pas et le contrat aux décisions territoriales. Soit en excluant des zones de navigations à certaines époques, soit en majorant les primes pour les bateaux qui s’entêteraient à se vouloir libre de naviguer sur la mer. On peut raisonnablement penser que les assureurs y ont songé ou y songent de plus en plus.

LE TRANSFERT EN CARGO !

C’était le souhait de ma femme. J’ai beaucoup lutté pour y échapper, peut-être à tort. Rester bloquer sur un terre-plein pendant presque trois semaines durant la saison de navigation c’est un peu trop. Les coûts générés par les dégâts sont aussi conséquents. Le transfert Atlantique-Méditerranée ou Canaries en cargo peut vraiment être une alternative autrement plus sûre et guère plus coûteuse tant que les états concernés n’assureront pas la libre circulation dans leurs eaux.

LA DISSUASION ULTRA-SONORE

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Le pinger qui ne nous a pas sauvé© Denis Chabassière

Le pinger est un appareil électronique qui au contact de l’eau émet des ultrasons qui éloignent les cétacés, la fréquence d’émission varie selon l’espèce que l’on veut écarter. Cet appareil d’environ 20cm est placé sur les filets par les pêcheurs professionnels pour dissuader les dauphins de se noyer dans leurs pièges à poissons. Notre pinger spécial orque, sa fréquence est sensée refouler ce cétacé-là, a été parfaitement inefficace, il était pourtant bien immergé.

On pourrait attendre des biologistes qu’ils expérimentent sur des orques en liberté ou en en captivité l’efficacité réelle de ces pingers. En faisant varier les paramètres, en indiquant les profondeurs idéales, sans négliger la vitesse du bateau qui par effet doppler fait varier la fréquence d’audition…

Nous avions décidé de ne pas mettre à l’eau le pinger en préventif, c’est-à-dire en le trainant en permanence à partir de notre arrivée dans les eaux galiciennes et jusque Gibralatar. En effet des pêcheurs ont remarqué que les pingers plutôt que de repousser les dauphins, et après un certain temps d’accoutumance, attiraient au contraire ce rusé cétacé : « Là où le bruit est désagréable il y a un garde- manger ».

LA PYROTECHNIQUE VISUELLE ET SONORE

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© Bloc Marine

C’est un ami, navigateur de renom, qui m’avait indiqué avoir chassé des orques un peu trop collantes dans les eaux antarctiques en balançant une fusée parachute rouge devant le museau du plus intrusif. « Les animaux sauvages ont peur du feu » justifiait-il.

Voici pourquoi nous avons utilisé nos feux à mains blancs puis rouge. On ne peut que constater que les attaques ont cessé après le tir de la fusée rouge, mais pas prouver que cette méthode est définitive. Là aussi des études peuvent être menées.

Pour améliorer le système il faut en prévention amarrer le corps du feu à main à un bout’ d’au moins quatre mètres et balancer le tout à l’eau après ignition. Le phosphore continue de brûler dans l’eau. Le feu et la lumière rouge peuvent peut être les décourager définitivement.

Le pétard de rappel est utilisé par les plongeurs pour avertir la palanquée. Je voulais nous en munir, le discours sur la fusée rouge m’avait fait écarter cette solution. Je le regrette, il faut avoir des pétards de rappel. Les défenseurs des tueurs de baleine prétendent que cela leur détruit définitivement leur système d’écholocalisation. Là aussi on attend qu’ils nous montrent les audiogrammes des bêtes avant et après l’explosion…

LA METHODE TRADITIONNELLE ANDALOUSE

Depuis 2007, il n’est pas été décrit par les pêcheurs espagnols du détroit de Gibraltar de dévastation des thonaires par les orques, ni d’attaque de bateau de pêche. De 2004 à 2007 les pêcheurs, essentiellement ceux de Barbate, ont abattus pas moins de quatorze orques. Les viandes étaient commercialisées, on ignore sous quelle appellation. Comme le relate cet article paru le 26/04/2007 sous la plume d’Eric Garletti  dans www.Cetacé.info « …le ministère de l’environnement refuse tout commentaire malgré la publication, en 1999, d’un rapport faisant état des relations houleuses unissant Orques et pêcheurs dans le détroit ».

On laissera à chacun l’appréciation de savoir si, l’orque étant réputé un animal ayant une bonne mémoire et communiquant avec ses pairs, la leçon a été retenue et la meute furieuse n’importune plus les professionnels, ou bien si ces mêmes professionnels pratiquent toujours la méthode ancestrale mais sans communiquer eux !

SI C’ETAIT A REFAIRE

J’embarquerais PretAixte sur un cargo, sans hésiter. Les désagréments qui suivent la destruction du bateau sont trop pesants.

Pour celui qui comme nous croit penser passer au travers des attaques, on pourrait lui conseiller, au fruit de notre expérience :

Utiliser Orcinus uniquement pour renseigner une cartographie actualisée des positions des orques, se méfiant quand même de la qualité de l’information.

Impérativement approcher de la zone dangereuse de jour, afin de les repérer et de pouvoir les affronter.

Longer, à distance raisonnable, la zone de Dispositif de Séparation du Trafic, à la fois pour noyer notre signature sonore au milieu de celles des tankers et des cargos qui franchissent le détroit de Gibraltar ou le cap Finisterre, et se mettre sous la protection des eaux internationales.

Rester sous voilure réduite, moteur embrayé à moins de 5 nœuds, pour éviter les grandes embardées mais continuer à faire route.

Libérer le pilote automatique et faire attention à ne pas se blesser à la barre.

Balancer, avant qu’elles arrivent sur le bateau, au moins un pétard de rappel dans l’eau pour les éloigner.

Balancer les feux à main rouge remorqués au bateau, comme décrit précédemment, si elles s’approchent.

Envisager à quel endroit s’arrêter pour faire un point d’inspection des appendices s’il y a eu contact, même minime.

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© Denis Chabassière

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Un feu à main rouge armé en répulsif à orques. Prêt à être jeté à l'eau© Denis Chabassière

L'équipe
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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