
EVASION. De plus en plus de plaisanciers s'aventurent sur cette voie maritime que le réchauffement climatique rend chaque année plus praticable.
Cette navigation est un rêve pour beaucoup de marins. Uniquement franchissable pendant le court été arctique, le passage du Nord-Ouest, situé entre le détroit de Davis et la mer de Beaufort, attire de plus en plus de plaisanciers fascinés par ce défi à la fois maritime et culturel. Un intérêt accru depuis que le réchauffement climatique rend la traversée plus facile. Plus facile, certes, mais toujours sujette aux aléas climatiques.
«L'ouverture est très variable d'une année sur l'autre, explique Frédéric Lasserre, professeur au département Géographie de l'université de Laval, au Québec. Pendant longtemps, les chenaux les plus au sud s'ouvraient. Depuis 2009-2010, ce sont ceux du nord, comme le détroit de McClure, qui s'ouvrent le plus longtemps.» Chemins rares, chenaux souvent barrés par la glace, le passage du Nord-Ouest se renouvelle chaque année, faisant de chaque traversée une aventure différente.
En 2009, une vingtaine de voiliers avaient réussi le transit. Cette année, 20 bateaux y sont à nouveau parvenus. Et le chiffre ne devrait qu'augmenter.
Il était en effet quasiment impossible de s'aventurer dans cette région en bateau à voile dans les années 1980 du fait des glaces dérivantes, ou alors il fallait prendre le risque de devoir hiverner pendant plusieurs années. Mais aujourd'hui, la donne a changé: il y a beaucoup moins de glace et plusieurs chenaux sont empruntables pendant quelques jours ou quelques semaines en été.
Mieux vaut être un marin aguerri pour s'aventurer dans le passage du Nord-Ouest. Même si la navigation n'est pas intense, elle n'est pas sans risques. On peut rencontrer des glaces dérivantes, des bancs de brouillard épais, du blizzard soudain. D'où l'importance de signaler sa présence à la garde côtière, qui envoie des cartes des glaces. Attention également aux cartes marines qui ne sont pas toujours précises. Mieux vaut ne pas sortir des chenaux de navigation: des navires s'échouent régulièrement.
Il ne faut pas non plus oublier la présence possible d'icebergs ou de growlers que les radars détectent mal. Si l'on progresse vite avec une faible visibilité, le risque de collision est élevé.
Ce type d'incident arrive encore chaque année, même s'il n'y a pas eu de naufrage depuis longtemps. En cas de problème, il faut s'armer de patience et attendre les secours, qui décollent du Canada. «Cela se mesure en heures, voire en jours, tout dépend des conditions météorologiques», prévient Frédéric Lasserre.
Difficilement prévisible, la météo rend également l'aventure assez compliquée d'un point de vue logistique. En effet, impossible de savoir à l'avance quand on va pouvoir traverser. «Il peut faire beau et tiède - entre 5 et 10 °C - mais la température peut aussi atteindre 30 °C en juillet, même si cela reste exceptionnel. On peut aussi bien avoir un coup de blizzard, une tempête de neige ou être sous le point de congélation pendant un ou deux jours», explique Frédéric Lasserre. Si, en général, il est rare de rencontrer des vents forts, la donne est différente sur la mer de Beaufort ou celle du Labrador, qui peuvent s'avérer très houleuses.
S'y rendre en avion:aéroport d'Iqualuit opéré par le gouvernement du Nunavut, desservi par plusieurs compagnies aériennes dont Canadian North, First Air ou encore Calm Air.
Où dormir en cas d'hivernage forcé? Le Qausuittuq Inns de Resolute Bay accueille chaque année de nombreux scientifiques ou aventuriers. www.innsnorth.com
Monnaie: dollar canadien