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En 1998, une célèbre marque automobile, vantait l’un de ses modèles phares par le slogan : "Et si le vrai luxe, c’était l’espace ?" Plus le temps passé à bord sera long, l’équipage nombreux, et plus il sera important en effet. Partir 15 jours à huit copains dans les Caraïbes sur un catamaran de 40 pieds se passe généralement très bien, pour peu que chacun y mette du sien. Lorsque l’on vit à bord en permanence, la promiscuité induite par une telle surpopulation deviendrait en revanche vite problématique. Le confort c’est avoir un espace pour chacun et pour chaque chose aussi.
Equipement : attention au surpoids et à la complexité
L’équipement de plus en plus pléthorique sur nos multicoques modernes, tendrait à laisser penser qu’on ne sait plus s’en passer. Si le ‘froid’ (frigos, congélateurs…) est désormais largement présent en standard partout, la liste des options proposées s’est considérablement allongée en équipements de confort ces dernières années. Et les évolutions technologiques nous ont parfois amené à revoir certains de nos vieux préjugés. Alors qu’un toilette électrique ou four micro-ondes par exemple frôlaient encore l’hérésie il y a 10 ans, ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui. Entre moyens de productions électriques doux (panneaux solaires, éolienne, hydrogénérateur) et qualité des batteries, il est presque plus rationnel de faire chauffer son mug de thé 2 minutes dans un four micro-ondes, que de faire chauffer une bouilloire entière sur la gazinière.
Batteries Lithium et dessalinisateur : les sauveurs
Avec le développement des parcs de batteries Lithium, de plus en plus de propriétaires vont même jusqu’à opter pour des plaques à induction, relayant ainsi aux oubliettes toutes les contraintes, risques et encombrement liés au gaz. Car le confort c’est aussi se libérer des corvées. Comme celle de l’avitaillement en eau, désormais produite en quantité par le dessalinisateur du bord sans aucun doute qui plus est sur sa potabilité. Un confort synonyme de performance, car ce sont autant de centaines de litres d’eau et donc de poids que vous n’aurez pas à stocker et à transporter. Finie également la recherche épuisante de l’introuvable lavomatique lorsque l’on a à bord sa propre machine à laver, à condition bien sûr d’utiliser des produits verts. Mais attention au surpoids induit qui pourrait avoir un impact sur le speedo des voiliers les plus légers. Attention surtout, à ne pas tomber dans le suréquipement et la complexité. Le confort c’est aussi avoir le temps de faire ce que l’on souhaite intimement (lire, écrire, cuisiner, plonger, surfer, ne rien faire…) pas de passer son temps à entretenir, réparer ou pire, chercher à faire réparer des systèmes complexes, loin de tout. Le célèbre navigateur Loïck Peyron a l’habitude de dire que « S'éloigner de tout rapproche un peu de l'essentiel ». A méditer…
Confort : avez-vous pensé à l’acoustique ?
Enfin, même si les temps de navigations sont loin d’être majoritaires en croisière, le comportement en mer de votre multicoque aura un impact important sur votre confort, de vie et de sommeil. Votre sensibilité au bruit pourra vous faire fuir certains matériaux (voir l’article sur ce sujet), certaines hauteurs de nacelles trop faibles vous faire craindre des chocs insupportables dès que la mer sera un tant soit peu formée, et un véritable essai vous révéler que celui qui vous avait tant séduit sur le papier, ne supportait pas bien la houle océanique. Son tangage important faisant pâlir votre moitié en moins de temps qu’il n’en faut pour sortir du port. Un mouvement nuisible au confort mais aussi au cap et à la vitesse de votre multicoque.
Performance : éloge de la lenteur
Si vous n’avez jamais été un acharné de la régate, du dixième de nœud, du VMG* et de l’AWA** au près, ces deux derniers critères peuvent vous paraître superflus. Le vent apparent, le bruit, l’humidité et les efforts plus importants dans les voiles induits par des vitesses élevées, peuvent même être vécus comme autant d’éléments de stress et d’inconfort. A contrario, quelques nœuds de plus au speedo et les miles quotidiens défilent plus vite, les traversées se font plus courtes, moins fatigantes, les systèmes météo moins fatals. Entre adeptes de Carl Honoré et son « Eloge de la lenteur » (Version originale : In Praise of Slow) et insatiables chercheurs de sensations les compromis sont multiples. Mais pour ce qui est de la performance sur nos multis, les curseurs sur lesquels nous pouvons jouer sont clairement identifiés : poids, longueur, surface vélique, formes et matériaux des voiles, le fardage, les appendices et la surface mouillée et l’état de propreté de dernière.
Performance et confort sont donc bel et bien intimement liés. A chacun de trouver l’équilibre qui correspond à son programme, son équipage et aussi son budget. Car si la taille peut tout réconcilier, le critère économique peut aussi tout écourter. Le meilleur des bateaux est avant tout celui que l’on a les moyens d’acquérir dirait Monsieur de La Palice. Car si « Un rêve de voyage, c’est déjà un voyage » (Marek Halter) - être sur l’eau et naviguer procurent un bonheur tel, qu’il mérite bien quelques compromis.
*VMG : Velocity Made Good ou Vitesse sur la route
**AWA : Apparent Wind Angle – Angle du vent apparent