
Partenariat prestigieux oblige, son nom officiel et complet est Rolex Fastnet Race. Mais sur tous les pontons d’Europe, et même dans les yacht-clubs du bout du monde, nul besoin de se lancer dans de grandes explications, évoquer « LA » Fastnet suffit. Tout régatier qui se respecte connaît et, toutes les années impairs, espère bien être au départ. Avec Sydney-Hobart dans l’hémisphère Sud, c’est LA course qu’il faut avoir fait au moins une fois dans sa vie. Parce que le Club organisateur, le RORC, né la même année que la course, en 1925 est une légende. Parce qu’au-delà du poids de l’histoire bientôt centenaire, il y a le poids de la tragique édition de 1979, dont la flotte fut décimée (86 voiliers classés sur 306 partants) par une très violente tempête, entraînant la disparition de 18 marins. Et puis qui n’a pas connu le départ avec 500 bateaux croisant dans l’étroit goulet que forme le Solent entre l’île de Wight et l’Angleterre, guettant le son et la fumée des canons alignés comme à la parade sur la terrasse du prestigieux club, a encore quelque chose d’important à vivre en tant que régatier. Parce que le parcours est réputé difficile, entre Manche, Mer d’Irlande, courants, et météo pas toujours estivale malgré un départ au cœur de l’été, prévu cette année le 8 août.

Rien ne change pour le départ et une grande partie du parcours qui verra toujours les concurrents laisser Lizard sur tribord et le fameux phare à bâbord, sans lesquels le Fastnet ne serait plus le Fastnet. Mais pour l’arrivée, révolution au très conservateur Royaume-Uni, Plymouth et son traditionnel casse-tête pour accueillir tout le monde laisse la place pour cette année (et pour 2023) à Cherbourg-en-Cotentin. Le port Normand verra donc les différentes classes invitées passer les digues érigées au XIX° siècle et qui forment la plus grande rade artificielle d’Europe. Les premiers à y pointer leurs étraves seront sans aucun doute les Ultims, dont le Maxi Edmond de Rothschild qui viendra défendre le record de l’épreuve (1 jour 4h 2min et 26 sec). Les Imoca, tout juste remis de leur Vendée Globe homérique et en guise de tour de chauffe avant la Transat Jacques Vabre automnale seront là également, tout comme les Class 40 et les Figaro. Mais c’est la flotte IRC qui apportera le plus gros contingent. En une heure ce sont 400 bateaux qui se sont inscrits dès le 12 janvier dernier. Si la majorité des concurrents arborera toujours l’Union Jack, 25 nations seront représentées et l’armada française croit de 49% en passant de 59 en 2019 à 88 bateaux cette année.

Les français ont une relation forte avec la plus célèbre des courses britanniques. Depuis la victoire en temps compensé d’Éric Tabarly sur Pen Duick III en 1967, les souvenirs ne manquent pas. De la victoire des Corum boys en 1991 dans l’Admiral’s Cup, véritable championnat du monde de voile, dont la Fastnet était l’épreuve de course au large, aux trois trophées rapportés sur les 4 dernières éditions par Didier Gaudoux (2017), Géry Trentesaux (2015) et Pascal Loison (2013). Ce dernier avait d’ailleurs comme équipier son fils, un certain Alexis Loison, aujourd’hui skipper en titre du monotype Figaro aux couleurs de la Région Normandie. Il ne pouvait manquer un tel rendez-vous et est donc bien entendu parmi les premiers engagés. Pas sûr en revanche qu’Halvard Mabire et Miranda Merron, troisièmes sur leur Class 40 Campagne de France en 2017 soient cette fois au départ sur leur Imoca portant les mêmes couleurs. Mais il est d’ores et déjà certain qu’aux côtés d’Alexis Loison c’est une vingtaine de bateaux Normands qui traverseront la Manche pour prendre le départ, virer le mythique rocher, avant de mettre le cap vers la maison !

La course aura donc lieu et se promet d’être belle. Espérons que les conditions sanitaires permettront au grand public de profiter pleinement de l’évènement, notamment des bateaux à l’arrivée et du village prévu pour les accueillir.
