François Gabart : « il y a toujours une part extraordinaire d'aventure »

Par Figaronautisme.com
carte de la course Arkea Ultim en direct

Ils ont aussi parcouru les mers du globe, déjà affronté des conditions harassantes et regardent avec attention et bienveillance cet incroyable challenge. Nous donnons la parole à des marins qui décryptent la course. Aujourd’hui, place à François Gabart. Il a gagné le Vendée Globe, la Route du Rhum et détient pour quelques temps encore le record autour du monde en solitaire et en multicoque (42 jours et16 heures). Le skipper, incontournable au sein de SVR-Lazartigue, revient sur la course, les débuts tonitruants de Tom Laperche, les escales techniques des marins et la course du leader, Charles Caudrelier. François Gabart s’excuserait presque : il sera à l’étranger, la semaine prochaine et ne pourra pas assister à l’arrivée de Charles Caudrelier. Cela ne l’empêche ni de le féliciter, ni de se montrer admiratif et élogieux à son égard.

Dans une poignée de jours, Charles Caudrelier devrait franchir la ligne d’arrivée de l’Arkéa Ultim Challenge… Comment résumes-tu cette première édition ? Je pense que le mot « Ultim » résume bien cette course et ces bateaux. Nous en rêvions depuis longtemps de ce tour du monde en solitaire et en multicoque. Comme toutes les parties prenantes de la classe, c’est quelque chose qui m’anime depuis très longtemps. On sait que c’est compliqué, difficile, incertain, qu’il y a des imprévus. On peut parler de technique, d’innovation, de technologie et on se rend compte qu’il y a toujours une part d’aventure extraordinaire quand on fait un tour du monde à la voile. Il y a eu de l’aventure, des mésaventures aussi mais ça fait partie du jeu…

« Caudrelier, un incroyable challenge » Quel regard portes-tu sur la performance de Charles ? Ce qu’il fait est très beau parce que je sais que c’est très difficile. Ce n’est pas évident de juger avant la fin d’une course et le dernier tronçon qu’il doit parcourir n’est jamais simple. Mais il a fait un tour du monde assez incroyable. Je crois que c’est le reflet d’années de travail menées depuis plus de 10 ans par l’équipe Gitana. Ils ont commencé avec les Mod70, ont développé les plans porteurs, Franck (Cammas) a apporté ses connaissances et ça leur a permis d’avoir un bateau de référence. Charles a beaucoup appris aussi : d’une certaine manière, c’est un marin qui arrive à maturité. Il vient de réaliser un challenge incroyable et je lui tire mon chapeau. Il n’a pas été épargné par les conditions, a eu parfois un peu de réussite, il a su aussi ralentir… Je trouve que sa performance est assez complète et je lui souhaite de tout cœur que ça se termine bien !

Cela démontre aussi qu’avec ton record, la barre est particulièrement élevée… Oui et en même temps, il faut rappeler que personne ne serait partie pour un record le 7 janvier dernier. Et malgré cela, les temps de passage à l’équateur sont très corrects, à Bonne Espérance aussi et Charles était en avance sur le record dans les mers du Sud. Ce n’est pas simple d’avoir un alignement des planètes – et surtout de la météo- sur l’ensemble du parcours. Mais là, l’exercice était différent. Charles a reconnu qu’il était assez conservateur dans sa gestion du bateau. Mais on a vu que le fait de faire le tour du monde en moins de 40 jours n’est pas de l’ordre de l’impossible.

« On est tous déçu que ça se soit arrêté pour Tom » Tous les skippers ont dû procéder à une escale technique. Comment cela doit-il être interprété ? Ce n’est pas simple de faire un tour du monde sans escale en solitaire, en multicoque. Il y avait en effet cette règle qui permettait de s’arrêter un minimum de 24 heures. Que serait-il passé s’il n’y avait pas eu cette règle ? Peut-être que les marins auraient embarqué plus de matériel à bord. Mais on devrait avoir cinq bateaux à l’arrivée et c’est une grande chance, même si on est forcément déçu avec SVR-Lazartigue de ne pas y être.

Il n’empêche, Tom Laperche a réalisé un début de course exceptionnel… On suppose que tu n’es pas surpris de son début de course ? Non évidemment, je ne suis pas surpris par le niveau de performance du bonhomme comme du bateau. Je vois son aisance, sa facilité à bord de ce bateau mais aussi son plaisir, son bonheur, son épanouissement… Il y a beaucoup de fierté dans toute l’équipe parce qu’on était parti de loin. Nous avions subi une avarie majeure quelques semaines avant le départ et nous étions vraiment contents d’être sur la ligne de départ. On est tous déçu et triste que ça se soit arrêté, même pour Charles. Le scénario aurait été différent s’il avait pu continuer, ça aurait été chouette !

« Il faudra continuer à prendre des risques » Tom a dit qu’il s’agissait de son pire souvenir sur un bateau… Est-ce qu’il a vite rebondi, s’est vite replongé dans un nouvel objectif ? Nous avons beaucoup échangé avec Tom, on est au bureau ensemble et je connais sa force. Bien sûr, il a vécu quelque chose de dur, probablement le plus terrible de ce qu’il a vécu. Mais je n’ai aucun doute sur sa capacité à rebondir vite, à se concentrer sur un nouvel objectif. Savoir rebondir, se réadapter, enclencher à nouveau une dynamique positive, ça fait aussi partie de ses points forts.

Plus globalement, qu’est-ce que la course nous a appris sur les Ultim ? Nous avons appris beaucoup de choses, les marins ont vécu beaucoup de choses… J’imagine que les debriefs des équipes vont être riches, qu’ils vont permettre à tout le monde de progresser, de fiabiliser les bateaux. De façon global, ça a démontré que c’était difficile mais que c’était possible, qu’on peut faire le tour de la planète en solitaire, en multicoque et autour de la planète. Ce qu’on peut retenir en somme, c’est que c’est possible et que ça peut être fabuleux.

Est-ce que tu es optimiste sur la pérennité de la course ? Oui, on est en droit de l’espérer. On fera tous le bilan dans les prochaines semaines mais la conclusion globale est très positive selon moi. Il y a déjà une deuxième édition de prévu et on peut espérer que tous les bateaux qui sont partis soient à nouveau présents. Il devrait y en avoir un nouveau puisque Gitana a annoncé la construction d’un bateau qui devrait être opérationnel en 2028. La dynamique est sympa et incroyable. Il faudra continuer à prendre des risques, à faire preuve d’audace, à considérer que rien n’est acquis et à avancer. Ces bateaux ont un potentiel incroyable mais ils sont fragiles. La combinaison entre le potentiel et la fragilité, c’est justement ce qui est passionnant !

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Nathalie Moreau
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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